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Au lieu d’apprendre aux femmes comment s’habiller, apprenez aux hommes à ne pas violer

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17 octobre 2019

Crédit visuel : Andrey Gosse – Directeur artistique

Chronique par Camille Cottais – Bénévole

La « culture du viol ». Le terme paraît, de prime abord, choquant. Le viol est un crime, que viendrait donc faire la culture là dedans ? En fait, la loi a beau interdir le viol, il n’en reste pas moins une réalité quotidienne. Cette culture est encouragée indirectement, justifiant et banalisant le viol.

Le mot culture fait référence au phénomène culturel et collectif, omniprésent dans notre société actuelle. La culture du viol ne signifie pas pour autant que nous ne considérons pas le viol comme grave. Elle dénote nos comportements sociaux et notre culture qui tendent à perpétuer des violences sexuelles et sexistes. 

Pourquoi sexiste? Car les agresseurs sexuels sont principalement des hommes et les victimes sont principalement des femmes ou des enfants.

La culture du viol est le résultat de nombreux stéréotypes de genre et de mythes sur la sexualité, qui soutiennent soit que la victime a aimé être violée, soit que le violeur n’a pas pu résister à ses pulsions. Ces idées reçues reposent sur l’idée de la femme passive et de l’homme aux besoins sexuels incontrôlables. Selon une étude de l’association Mémoire traumatique et victimologie datant de 2018, 21% des Français.e.s ont pour opinion que les femmes peuvent prendre du plaisir à être forcées.

Le viol, mal compris ?

Le phénomène du viol reste extrêmement tabou. On aurait en tête le stéréotype du violeur inconnu déambulant dans des ruelles sombres pour agresser des jeunes femmes, alors que 91% des victimes connaissent leur violeur, d’après l’ouvrage En finir avec la culture du viol de Noémie Renard, publié en 2018.

Par ailleurs, il ne s’agit absolument pas toujours de malades mentaux ou de dangereux psychopathes. Seulement 7% sont reconnus comme atteint d’une maladie psychiatrique, note l’ouvrage de Renard. La plupart sont des hommes ayant été élevés dans une société patriarcale où ils n’ont pas appris le consentement et la distinction entre la séduction et l’harcèlement.

On a tendance à oublier à quel point le viol est courant. En France, par exemple, 63% des jeunes filles déclarent avoir été victimes d’harcèlement ou d’agressions sexuelles, selon l’enquête de Renard. Il y aurait eu 250 000 viols ou tentatives de viol rien qu’en 2017, ce chiffre étant sous-estimé en raison des milliers de victimes n’osant pas porter plainte. Cela signifie qu’autour de toi, dans un de tes cours ou même dans ta famille, il y a sûrement une personne qui en a été victime.

La culture du viol contribue d’ailleurs au tabou, puisqu’en culpabilisant les victimes, ces dernières n’osent pas parler de leur agression. Le fait de garder le silence, ajouté au traumatisme vécu, est souvent dramatique pour la santé mentale des victimes.

Des violences sexuelles comme punition 

Le viol est non seulement l’expression d’une hiérarchie existante entre hommes et femmes, mais également un outil pour la maintenir. Ainsi, il est utilisé par les hommes comme punition pour la femme ne respectant pas les règles, par exemple de soumission, d’hétérosexualité, de fidélité et j’en passe. C’est ce qu’on appelle le viol « punitif » ou « correctif ». 

Si les violences sexuelles ne sont bien sûr pas autorisées dans les pays occidentaux, cela ne les empêche pas d’être banalisées et dédramatisées. Légitimer un viol en raison de la tenue ou de l’attitude d’une femme, c’est accorder un caractère punitif à l’acte. Pourtant, punir légalement est un rôle accordé à la police selon la loi. N’étant pas illégal de porter une jupe courte, le viol comme acte punitif agit comme problème culturel plus que comme problème légal.

La peur du viol et des violences en général permettent de contrôler le comportement d’individus principalement visés par ces violences.

Responsabilités évidentes

Le fondement de la culture du viol consiste principalement sur le fait de blâmer non pas l’agresseur mais l’agressé.e. Par exemple, l’ouvrage de Renard révèle que 27% des Français.e.s considéraient en 2017 que l’auteur d’un viol était moins responsable si la victime portait une tenue révélatrice. 

Nombre de femmes ayant été victimes de ce traumatisme et qui osent en parler ne reçoivent donc pas l’empathie et le soutien nécessaire mais des jugements et des reproches. Ce n’est donc pas étonnant qu’une grande partie n’ose ni en parler à ses proches, ni à la police. En fait, 10% des viols seulement débouchent sur une plainte, d’après Renard.

On se fatigue à apprendre aux filles et aux femmes à ne pas se faire violer et non aux hommes à ne pas violer. Prenons par exemple des parents qui interdisent à leur adolescente de sortir avec une jupe courte jugée provocante. Les femmes seraient responsable de s’habiller d’une façon ou d’une autre pour éviter de s’attirer des problèmes. C’est d’autant plus grave lorsqu’on s’adresse à une mineure, puisqu’on lui rappelle qu’aux yeux de certains hommes, elle n’est qu’un objet sexuel.

De surcroît, le sujet ne doit plus être tabou. Il faut ouvrir le débat et cesser d’ignorer volontairement le viol, trop présent et à la fois trop caché. À plus grande échelle, il est primordial d’améliorer la prise en charge psychologique des victimes en leur rappelant qu’elles ne sont jamais les fautives, peu importe les circonstances. 

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