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Bataille pour l’accessibilité des manuels scolaires

Hai Huong Le Vu
14 novembre 2024

Crédit visuel : Sophie Désy — Photographe

Article rédigé par Hai Huong Lê Vu — Journaliste

Une enquête de 2023 menée par la Bibliothèque de l’Université d’Ottawa (U d’O) a révélé l’ampleur des défis en matière d’accessibilité des ressources pédagogiques à l’U d’O. Les obstacles identifiés, tels que le coût prohibitif des manuels et l’offre limitée en langue française, pèsent lourdement sur le porte-monnaie et la réussite des étudiant.e.s. 

Les manuels, un lourd fardeau

L’enquête menée révèle que les étudiant.e.s dépensent en moyenne 234,61 $ par trimestre pour l’achat de manuels scolaires. D’après ce projet, ce coût représente une charge financière importante, qui s’ajoute aux frais de scolarité, de logement et de subsistance des étudiant.e.s.

Maria-Jose Villegas Jimenez, étudiante en troisième année en sciences de la santé, estime que l’Université devrait fournir gratuitement les manuels aux étudiant.e.s, et que leur coût devrait être inclus dans les frais de scolarité, sans augmentation de ceux-ci.  

Abigaëlle Pinsonneault, étudiante en première année en lettres françaises, souligne que l’achat de manuels est souvent inévitable, car ils sont obligatoires pour ses cours et contiennent des œuvres essentielles qui seront utilisées pour les examens. Damaris Barbosa, étudiante en deuxième année en criminologie, nuance toutefois ce propos en soulignant que l’importance des manuels varie d’un cours à l’autre. Elle ajoute que les professeur.e.s, dans certains cours, offrent des alternatives aux manuels traditionnels.

Pinsonneault note que certain.e.s enseignant.e.s sous-estiment le coût des manuels. Profitant des livres prêtés par une ancienne camarade, elle a dépensé 45$ pour des manuels. Barbosa reconnaît que la bibliothèque propose les manuels nécessaires, mais qu’avec un seul exemplaire pour des milliers d’étudiant.e.s, ceux-ci restent souvent inaccessibles pendant des mois.

Des ressources en français au premier plan ? 

Liz Hayden, bibliothécaire associée en contenu et accès, affirme qu’une petite part des publications savantes dans le monde est en français, mais son équipe privilégie ces publications dans sa stratégie de sélection et d’acquisition. La Rotonde a contacté et a reçu cette déclaration de la part de Yves Pelletier, vice-recteur associé aux affaires francophones de l’U d’O :

« Je peux vous confirmer que notre université dispose d’un budget impressionnant pour l’achat de ressources, et que presque toutes les ressources publiées en français sont rendues disponibles aux membres de notre communauté universitaire. Nous avons une excellente bibliothèque. »

Pour autant, Mélanie Brunet, bibliothécaire de l’éducation ouverte qui a travaillé sur cette enquête, rétorque en avouant que le budget de la bibliothèque est restreint pour obtenir des manuels physiques et numériques. « Quand je suis allée à la librairie au Centre universitaire Jock Turcot, je n’ai pas trouvé de section spécifique pour les livres en français », raconte Pinsonneault. 

Brunet note que certains manuels disponibles en français ciblent les publics du Québec ou de la France, ne reflétant ainsi pas le contexte ontarien. La bibliothécaire observe que les étudiant.e.s francophones à l’U d’O doivent donc jongler avec des ressources principalement anglophones et peu adaptées, ce qui complique leur apprentissage. 

Pelletier d’ajouter que les enseignant.e.s doivent se conformer au Règlement académique A-1, qui stipule que les ressources pédagogiques doivent être dans la langue de l’enseignement. Si le matériel scientifique n’est pas disponible dans cette langue, les professeur.e.s doivent expliquer verbalement les informations de cette ressource pédagogique dans l’autre langue, renchérit-il. 

Des solutions d’accessibilité aux manuels 

« Une initiative pour revendre ou donner des livres usagés serait bénéfique pour les étudiant.e.s », suggère Pinsonneault. L’application UoSwap a été créée par des uottaviens en Septembre 2022 pour répondre à cet enjeu. 

Brunet met en avant les ressources éducatives libres (REL). Hélène Carrier, bibliothécaire associée en apprentissage et service aux usagers, ajoute que, dans le cadre de l’initiative Transformation 2030, plus de 11 projets REL francophones ou bilingues sont en développement . 

La bibliothécaire de l’éducation ouverte continue en soulignant que les réserves de cours gratuites comme ARES facilitent l’accès des étudiant.e.s aux ressources pédagogiques, bien que l’achat de manuels numériques soit parfois freiné par les modèles d’affaires des maisons d’édition. Catherine Lachaîne, bibliothécaire intérimaire en éducation ouverte, ajoute que le corps professoral joue un rôle crucial en veillant à rendre ces ressources accessibles aux apprenant.e.s. Cependant, aucune des étudiantes interrogées ne connaissait ces alternatives. 

Face au défi financier, Brunet informe que de nouvelles directives du ministère des Collèges et Universités de l’Ontario et de l’U d’O imposent aux professeur.e.s de mentionner le prix des manuels dans leurs plans de cours.

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