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Éditorial

Écologie politique, à la jeunesse de jouer

Rédaction
18 mars 2019

Éditorial

Par Mathieu Tovar-Poitras –  Rédacteur en chef

Une étudiante suédoise de 15 ans décide, le 20 août 2018, de ne pas aller à l’école jusqu’au 9 septembre 2018. Elle s’assoit devant le Parlement suédois chaque jour. Elle fait la grève pour le climat et la réduction des émissions de carbone tel que prévu dans l’accord de Paris de la COP 21. Cette jeune se nomme Greta Thunberg et ce qu’elle a déclenché, c’est un mouvement mondial.

L’image de sa protestation s’est mise à circuler sur le web et très rapidement, elle devient l’emblème d’une jeunesse qui se bat pour le futur de la planète, pour son propre futur. D’un point de vue symbolique, elle reprend en quelque sorte le flambeau de Severn Cullis-Suzuki qui, en 1992, s’était adressé au Sommet de la Terre des Nations-Unies. La Canadienne avait 12 ans lorsque pendant six minutes, elle a fait son plaidoyer devant le monde.

Cullis-Suzuki et Thunberg sont devenues des symboles d’une jeunesse revendicatrice. Suite à la première action de la suédoise, la grève étudiante pour le climat s’est répandue rapidement. Les rassemblements du 15 mars dernier en sont probablement, à date, le point culminant. Des millions de jeunes des quatre coins du globe, dont 150 000 à Montréal, ont fait entendre leur voix, haut et fort.

Ces mobilisations ont certes attiré l’attention des politiciens et des médias, mais mèneront-elles à des actions politiques concrètes ? C’est la question qui revient souvent lors des manifestations et autres mobilisations citoyennes. Parfois c’est vrai qu’on a ensuite l’impression que nos efforts sont passés dans le beurre. Mais cette fois-ci, la réaction devrait être différente.

Pas nécessairement parce que les politiciens ont soudainement découvert l’environnement comme un enjeu politique central au lieu d’une variable électorale, ce serait tout un tour de magie. Toutefois, il paraît que certains sont des adeptes de sorcellerie. Tapez donc Sarkozy et l’environnement, ça commence à bien faire sur Google, vous verrez avec quelle rapidité les positions peuvent changer sur le sujet.

Projet de société

La conversation suivant cette mobilisation mondiale a aussi ravivé le sujet de l’écologie politique à plus grande échelle. Cette optique visant la transdisciplinarité des enjeux sociétaux telle qu’illustrée par Arnaud Diemer cherche à transformer profondément le modèle socio-économique actuel. Pour comprendre davantage le mouvement, plusieurs nuances sont expliquées.

André Gorz distinguait l’écologie politique de l’écologie scientifique. La dernière vise à calculer les seuils liés aux excès du capitalisme – c’est un résumé très court de sa définition, j’en conviens. La première cherche plutôt à mettre sur pied un modèle de société fondé sur de profondes réformes systémiques des rapports entre les humains et la nature.

Seconde distinction, tandis que l’écologie politique cherche à faire développer la conscience humaine sur son empreinte sur la nature par l’entremise d’actions sur les systèmes, l’environnementalisme se veut plus pragmatique.

Bien que ce soit des principes qui se mélangent assez naturellement, c’est particulièrement au niveau de l’écologie politique que l’empreinte de ces initiatives s’inscrit. Les jeunes qui sont sortis dans la rue ont fait bien plus qu’exprimer leur volonté de préserver l’environnement. Ils et elles ont agi pour pousser la mise en place de doctrines concrètes qui chambouleraient le système existant pour le réformer en prenant compte des enjeux écologiques présents et futurs.

Balkaniser le système

Pour reprendre les mots de Dimitri Roussopoulos, « soyons honnêtes ». Ce mouvement va prendre de l’ampleur et les jeunes vont grandir avec. Les réformes inspirées de l’écologie politique seront tôt ou tard mises en vigueur. Si ce ne sont pas les politiciens et décideurs actuels qui le font, ce seront les jeunes qui les remplaceront éventuellement et qui ont poussé ce mouvement.

L’environnement était autrefois considéré comme un boulet au productivisme qui était perçu comme étant entrelacé avec le développement. Aujourd’hui, c’est encore un boulet, mais plutôt celui d’un canon dont la poudre a été enflammée par la fougue de la jeunesse.

Certains se sont demandés si cette grève scolaire était un « renouveau de l’imaginaire contestataire ». Que ce soit des jeunes qui animent le mouvement n’est pas en soi un renouveau, ou l’objet de leurs revendications. Le renouveau doit être le résultat de ces actions par l’entremise des réformes systémiques qu’elles apporteront.

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