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Éditorial

Il faut être deux pour danser le tango

Web-Rotonde
20 mars 2017

Comité éditorial

À moins que vous n’hiberniez les derniers mois, vous avez surement remarqué quelque chose de louche dans le discours social environnant. Que ce soit le nouvellement élu Cheetos en chef des États-Unis, les candidats populistes aux élections européennes, ou la sénatrice canadienne qui critiquait récemment la couverture médiatique de ses remarques très polémiques sur les écoles résidentielles, le monde politique ne peut plus se passer des « fake news ».

Nous ne parlons pas ici de la vrai fausse nouvelle; celle qui envahit les murs Facebook de nos connaissances les plus crédules. Non. Nous parlons du « fake news » comme processus rhétorique visant à délégitimer toute parole médiatique, critique, ou simplement dérangeante.

Il semble en effet qu’à mesure que se délie la parole politique et que les barrières de la décence tombent de plus en plus bas, le journaliste est le premier à en recevoir les contrecoups. Et il faut avouer que c’est une proie facile.

Les pertes de revenus dans la presse écrite comme la pression de l’exclusivité mènent les médias, privés surtout, à chercher de plus en plus le profit et le sensationnalisme au détriment de l’intérêt public et de la vérité. À mesure que le commercialisme envahit le système médiatique, la confiance du public à son encontre s’érode. Comment leur faire confiance ? Ne pas penser qu’ils sont « tous pourris, tous biaisés »?

Une fois la table mise, il suffit qu’un politicien en mal de bonne presse énonce quelques mots pour que le peu de confiance restant du public envers les médias vole en éclats. Simple, efficace.

Mais soudainement, les faits avérés sont relégués au domaine du futile, les statistiques balayées d’un revers de la main, et tout ne devient plus qu’un jeu de He said, She said.

Bon, et nous dans tout ça?

En moins d’une semaine, La Rotonde a été accusée tantôt d’être raciste, tantôt d’être trop politiquement correcte, et en ultime apothéose, lors d’une inattendue sortie média de la FÉUO, de journal de « fake news » dont les employés devraient travailler pour Donald Trump.

La vidéo en question s’est répandue comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, accumulant en quelques jours plus de 5 000 vues. Dans celle-ci, le vice-président aux affaires sociales Hadi Wess, nouvellement élu à la présidence de la Fédération étudiante, nous accuse de propager des calomnies à son sujet.

L’objet de la controverse ? La Rotonde publiait il y a quelques semaines un article dévoilant que des membres de l’exécutif se seraient octroyé.e.s des U-Pass sans être admissibles au programme. Cela, sans qu’on sache si, comme les 35 000 étudiants qu’ils disent représenter, ces personnes se sont acquittés de la somme de 395 $ afin d’obtenir le laissez-passer universel tant convoité. 

Précisons tout de même qu’aucun des membres de la FÉUO n’ont accepté de répondre aux multiples demandes d’entrevue de la journaliste. Qu’il est pratique, dès lors, de répéter à qui veut bien l’entendre que sa version de faits ne figure nulle part dans l’article. Que La Rotonde est biaisée. Que son histoire est confectionnée de toutes pièces.

Ces pièces, par précision, sont des entrevues avec des sources proches de la Fédération étudiante, de l’Université d’Ottawa et de la OC Transpo. Tout le monde aurait menti, semblerait-il.

Peu importe, le journal indépendant francophone semble être confiné à son statut de paria de la sphère politique étudiante. Sans censure. Sans blabla inutile. Sans tourner autour du pot.

Nous ne voilons pas la face.  D’expliquer une énième fois la relation entre journalisme et politique serait redondant. De rappeler le rôle les médias dans une société démocratique serait tout aussi répétitif. En tant que journalistes, nous n’avons qu’un seul objectif : l’intérêt public et la défense de la vérité, sans faits alternatifs. D’autant plus que La Rotonde est un petit journal étudiant, qui n’a rien à gagner du sensationnalisme. Des titres tabloïdesques ne nous rapporteront pas plus d’argent, de publicité, ou de quoi que ce soit d’ailleurs.

Les journalistes ne cherchent pas à créer les nouvelles, mais bien à traiter de celles-ci. Il faut être deux pour danser le tango, et notre partenaire par excellence, la FÉUO, est à l’origine de mille-et-un articles.

Nous sommes loin d’avoir un agenda politique. Ce que nous avons, c’est une ligne éditoriale. Celle d’agir à titre de chien de garde et de tenir le pouvoir responsable de ses actions. Les médias et les politicien.ne.s ont bien beau former un tandem de l’enfer, aucune clause du contrat ne les forcent à s’aimer.

Mettre les médias sur la liste noire ne règle pas les problèmes, mais en crée de nouveaux.

La Rotonde a quitté l’aile protectrice de la Fédération étudiante en 2008 pour de simples raisons : par souci de liberté de presse, d’intégrité et de transparence, valeurs au cœur de sa constitution. En ce lundi de publication, La Rotonde sait qu’elle a eu raison de le faire, parce que la vérité est bien plus forte que le silence.

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