Crédit visuel : Marie-Ève Duguay – Rédactrice en chef
Article rédigé par Mabinty Touré — Journaliste
Du 6 au 10 mars 2023, l’École de travail social de l’Université d’Ottawa (U d’O) a organisé des événements dans le cadre de la Semaine nationale du travail social. Le thème de cette année, « Pratiques et approches innovatrices en travail social », visait à « sensibiliser et conscientiser les personnes sur les multiples réalités du travail social, particulièrement en Ontario francophone ». Afin de découvrir ce domaine, La Rotonde explore le métier de travailleur.se social.e.
Travail social : qu’est-ce que c’est ?
Valérie Marceau, étudiante au doctorat en service social à l’U d’O et travailleuse sociale depuis 20 ans, explique que le travail social a pour mission « de venir en aide aux personnes les plus vulnérables de notre société ». Pour elle, les travailleur.se.s sociaux.ales aspirent à apporter des changements afin de pouvoir améliorer les conditions de vie des membres de la société.
Afin d’éviter les confusions, Marceau rappelle que contrairement aux travailleur.se.s sociaux.les, les psychologues ont la possibilité de faire des diagnostics. Les psychologues travaillent surtout en pratique privée, auprès des personnes, de façon individuelle, tandis que les travailleur.se.s sociaux.les ont un rôle plus large. Dahlia Namian, professeure à l’École de service social de l’U d’O, évoque le fait que la pratique du travail social peut se faire dans divers milieux, ce que démontre sa formation en service social et en sociologie. Les travailleur.se.s sociaux.les peuvent être retrouvé.e.s dans les domaines de la santé, de l’éducation et de l’analyse des politiques sociales et publiques.
Elle indique que la formation à l’U d’O est à la fois pratique et théorique. Les étudiant.e.s en service social font des stages tout au long de leur parcours afin d’apprendre de leurs expériences. L’aspect académique se focalise sur l’apprentissage des réalités sociales des groupes sociaux les plus marginalisés.
S’orienter dans le domaine
Dans sa discussion avec La Rotonde, Marceau indique que le travail social constitue une profession très valorisante pour sa personne, « surtout quand on peut redonner une qualité de vie à ses clients », ajoute-t-elle. Ancienne membre des forces canadiennes comme travailleuse sociale pendant dix ans, elle se spécialise aujourd’hui dans l’accompagnement du personnel militaire dans ses difficultés psychologiques. De son côté, Namian s’est orienté dans le service social en raison de ses attaches dans différentes causes sociales.
Choisir de travailler dans ce milieu demande une forte empathie, insiste Marceau. Elle énonce « qu’il faut être enclin à comprendre l’autre personne ». Elle ajoute qu’il est aussi important d’être curieux.se afin de rester informé.e sur les contextes sociaux changeants. En outre, Namian précise qu’il est essentiel d’avoir une volonté de travailler pour le bien-être collectif. Pour elle, « la profession demande plus ce type de capacités que des compétences techniques ». Le programme de l’U d’O insiste sur le développement chez les étudiant.e.s d’un regard critique sur la société, ainsi que de la capacité d’analyser des problèmes sociaux qui vont au-delà des individus.
Les deux sources signalent que la profession de travailleur.se social.e demande de maintenir une bonne balance entre sa carrière et sa personne. D’une part, Namian confie que la profession n’est pas reconnue à sa juste valeur. Elle établit également un lien entre ce manque de reconnaissance et la forte présence de femmes dans le domaine. D’autre part, Marceau recommande de poser des limites dans son métier afin de ne pas se « laisser avaler » par la profession. Pour la travailleuse sociale, « il faut également croire en ce qu’on fait » et prendre soin de sa santé physique et mentale. Elle favorise la balance entre les sentiments d’empathie, soit ressentir les émotions de la personne, et de sympathie, soit éprouver du soutien et de l’intérêt pour le problème de la personne, afin de ne pas faire un burnout.
Évolution au fil des années
Le domaine a particulièrement évolué ces dernières années, remarque Marceau. Elle constate qu’au début de sa carrière, il n’y avait presque pas de possibilités d’emploi. Aujourd’hui, la charge de travail est nettement plus élevée en raison de l’augmentation des problématiques sociales, comme le vieillissement de la population, les personnes itinérantes, la pandémie de la Covid-19, les pénuries de main-d’œuvre, etc. Pour elle, l’État-providence est en retrait dans la mise en place de ressources de soutien envers les populations : il préconise plutôt la responsabilisation individuelle de chacun.e face à ses difficultés.
Namian observe un changement de la perception sociale autour de la profession. Elle précise qu’aujourd’hui, « on reconnaît que l’on peut être des alliés des mouvements sociaux et même en faire partie ». La professeure ajoute que la discipline et le département de l’U d’O s’engagent dans un processus de décolonisation, notamment dans la reconnaissance du rôle des travailleur.se.s sociaux.les dans les pensionnats autochtones et les systèmes de protection de l’enfance.