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L’IA au service de l’enseignement et de l’apprentissage

Tom Chazelle Schulze
5 novembre 2024

Crédit visuel : Hidaya Tchassanti Directrice artistique

Article rédigé par Tom Chazelle Schulze — Journaliste

L’intelligence artificielle (IA) connaît depuis quelques années une croissance rapide et présente à la fois une opportunité et un défi pour l’apprentissage. Le premier novembre dernier, l’Institut des langues officielles et du bilinguisme (ILOB), avec comme présentatrice la professeure de français langue seconde Martine Rhéaume, a tenu un webinaire sur l’IA au service de l’enseignement et de l’apprentissage des langues.

Défis et opportunités

L’utilisation de l’IA dans le domaine de l’enseignement peut représenter un atout inestimable pour un apprentissage effectif : d’après Rhéaume, une littératie en IA favoriserait le développement de la pensée critique et aiderait les étudiant.e.s à devenir des citoyen.ne.s numériques responsables. Cela permettrait aux étudiant.e.s de prendre des décisions éclairées et de participer de manière sécurisée et éthique dans un monde de plus en plus numérique.

D’après les données partagées lors de la présentation, 75 % des professionel.le.s utilisent déjà l’IA dans leur travail, dont 46 % ont commencé à l’utiliser il y a seulement six mois. L’acquisition de compétences en littératie en IA contribuerait donc à l’employabilité, puisque 68 % des dirigeant.e.s interrogé.e.s auraient déclaré ne pas embaucher de candidat.e.s ne possédant pas ces compétences.

Cependant, l’utilisation excessive de l’IA pourrait conduire à un phénomène d’« amnésie numérique », selon la présentation de l’ILOB. Les utilisateur.ice.s deviendraient dépendant.e.s de l’IA et « cognitivement paresseux.ses », en déléguant des tâches aux divers outils numériques. Cela entraînerait une perte de compétences cognitives importantes. 

Selon la présentation de l’ILOB, un défi important demeure pourtant dans le domaine de l’enseignement : la difficulté d’intégrer des instruments de l’IA utilisables par les enseignant.e.s. La professeure de français langue seconde affirme que certain.e.s enseignant.e.s éprouveraient de la réticence à intégrer ces outils dans leurs cours. D’une part, les enseignant.e.s auraient peur que l’IA prenne le dessus et remplace l’enseignement traditionnel, et d’autre part, ils.elles craindraient que les étudiant.e.s utilisent des outils d’IA pour produire leurs travaux. Cela présente pour les enseignant.e.s un risque additionnel en lien avec la fraude académique.

Une question d’éthique 

S’ajoute à ces risques et opportunités la considération éthique dans l’utilisation des outils d’IA.  Lors du webinaire, il est ressorti qu’il demeure important d’assurer que la vie privée et que les données personnelles soient protégées : lorsque les utilisateur.ice.s ont recours à des outils d’IA, il serait essentiel d’éviter de partager des informations sensibles.

Toujours d’après le webinaire de l’ILOB, il est important de citer correctement toutes les sources utilisées dans les travaux écrits. Cela inclut donc la mention dans la bibliographie et en annexe des « prompts utilisés » lors de l’utilisation d’outils d’IA, tels que les chatbots (dialogueurs), afin d’éviter la confusion quant à l’origine des idées mentionnées. Il a également été soulevé lors de la présentation l’importance de vérification des données obtenues par l’IA : utiliser l’IA serait pouvoir reconnaître les biais potentiels dans les réponses générées.

Perspective universitaire

L’utilisation d’outils d’IA ne se limite pas seulement à l’éducation et l’apprentissage des langues, domaine dans lequel Rhéaume est experte. L’usage de l’IA est très répandu dans tous les domaines. Jan Claudius Völkel, professeur en sciences politiques à l’Université d’Ottawa, explique d’ailleurs à La Rotonde voir l’IA comme une opportunité riche, que l’on devrait utiliser de la meilleure façon possible.

D’après lui, l’IA présente d’un côté une « ouverture de nouveaux mondes », qui peut stimuler de nouvelles façons de réfléchir. De l’autre côté, il voit un danger potentiel dans la possibilité que l’IA prenne le dessus de la réflexion humaine et que les utilisateur.ice.s régurgitent tout simplement les informations obtenues. Cela représenterait, selon lui, une perte importante de la capacité à réfléchir et à construire le savoir. D’après Völkel, en se faisant dicter rapidement les informations par un outil d’IA, la société perdrait une compétence importante.

Jusqu’à présent, Völkel utilise l’IA seulement dans l‘objectif de mieux comprendre la structure et le fonctionnement de celle-ci. Il affirme le faire afin de mieux pouvoir juger l’exactitude des travaux qui lui sont soumis par des étudiant.e.s. D’après lui, cela constitue le plus grand défi dérivé de l’IA, surtout dans le domaine des sciences sociales, où la production d’écrits bien réfléchis, soutenus par une réflexion humaine, est requise.

Dans un monde en constante évolution et avec un progrès de l’intelligence artificielle très rapide, il serait donc important de l’utiliser avec modération et en s’assurant de ne pas perdre l’humanité des réflexions, conclut le professeur en sciences politiques.

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