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Comment lutter contre un racisme omniprésent en éducation ?

Rédaction
15 août 2021

Crédit visuel : V-TRaClab – Courtoisie

Article rédigée par Emmanuelle Gingras – Journaliste

« Pour vivre dans une société sans racisme, il faut être anti-raciste. » C’est la conclusion qu’a faite l’équipe du Laboratoire de recherche vulnérabilité, trauma, résilience et culture (V-TRaClab) de l’Université d’Ottawa (U d’O). Leur solution ? La création d’une formation vidéo qui se veut accessible pour tou.te.s, surtout dans des cadres éducatifs. Là où la discrimination raciale serait la plus élevée au Canada. 

C’est le 29 juillet dernier que l’équipe a inauguré la formation vidéo adaptée au public canadien. Cette dernière pourra être utilisée gratuitement dans des cadres éducatifs et professionnels.

« Leur travail [ du V-TRaClab] est vraiment important : ils avancent à la fois la recherche et la mobilisation des connaissance sur (i) la vulnérabilité et trauma, (ii) sur les disparités raciales dans les services sociaux et de santé, et (iii) sur la santé mentale globale afin de créer une société plus inclusive. », décrit Victoria Barham, doyenne de la Faculté des sciences sociales (FSS) de l’Université d’Ottawa. 

D’abord disponibles sous forme de PowerPoint pour des fonctionnaires fédéraux, des écoles ont trouvé V-TRaClab et ont fait la demande d’une version de la formation plus accessible. « Les enseignant.e.s ne se sentent pas [toujours] à l’aise de parler des enjeux liés au racisme. [Ils avaient] besoin d’un outil beaucoup plus adapté », explique Jude Mary Cénat, directeur du V-TRaClab. 

L’équipe a fait la demande et a bénéficié des fonds de l’Agence de santé publique du Canada pour ajouter des aspects audiovisuels à la formation, qui se penche sur l’histoire du racisme au Canada, ses impacts et essaie d’engager les apprenant.e.s dans une dynamique antiraciste.

Statistiques de la recherche

La formation, basée sur une enquête V-TRaClab, prouve l’existence du racisme ainsi que ses impacts sur la santé mentale. Il s’agit de « la première enquête sur la santé mentale des Noir.e.s au Canada », confirme Cénat. Au total, selon son étude, 860 personnes à travers le pays ont participé à la recherche et la majorité d’entre eux ont déclaré avoir été victimes de différentes formes de discrimination raciale.

56,70 %, en auraient vécu dans leur milieu de travail.

55, 20 %, lors de demande d’emploi.

55, 50 %, ont  subi du profilage racial.

47, 50 %, dans la recherche d’un logement.

46, 30 %, lors de près bancaires.

J53, 10 %, de la part de certains services de santé.

et 60, 50 %, en auraient vécu dans un cadre éducatif, au niveau secondaire ou universitaire.

« On a envie de dire qu’on n’a pas recruté assez de personnes mais il faut dire que ce sont des communautés qui sont extrêmement réticentes à participer dans la recherche pour plusieurs raisons qu’on peut comprendre. […] C’est pas assez, mais c’est déjà ça ! », exprime Cénat.

Ceux et celles souffrant de racisme sont 36 fois plus à risque de développer des symptômes sévères de dépression, précise-t-il.  De plus, la vidéo instructive démontre qu’il existe une prévalence de 48 % de gens souffrant de symptômes dépressifs en réponse à de la discrimination majeure raciale en éducation. 

En considérant les statistiques et en réponse aux multiples incidents à caractère raciste dans les dernières années à l’U d’O, Cénat ainsi que Bahram croient que l’U d’O devrait considérer rendre cette formation obligatoire dans leur institution.

« Il n’y a aucun doute que la formation développée par Jude Mary sera proposée à nos collègues ici à FSS , et j’espère qu’elle sera proposée également à travers le campus, éventuellement dans un format adapté pour le milieu universitaire. Nous avons vraiment de la chance d’avoir cette expertise “à l’interne”. », exprime Bahram.

De son côté, Cénat ajoute que  l’Université devrait être capable d’évaluer l’efficacité des initiatives prises pour contrer le racisme, sur le long terme. « Il faut être en mesure d’évaluer au fur et à mesure qu’on les applique [les initiatives antiracistes] et voir les changements qui méritent d’être fait  », renchérit-il. 

Racisme en éducation

Bien que Cénat n’ait pas été surpris par les statistiques de sa recherche, ce dernier affirme avoir trouvé marquant les proportions des statistiques. Il s’étonne notamment des statistiques dans les services de santé et en éducation.

Les raisons seraient, d’après lui, reliées à un problème de représentation : «  à chaque fois que tu vois le mot “Noir”, tu vois les mots “police” [et] “violence” à côté. » Le spécialiste s’intéresse particulièrement au rôle des facteurs culturels sur le racisme. Il fait notamment référence à la récurrence de ces associations dans les journaux canadiens, les pièces de théâtre et ouvrages, même pour enfants. Ces derniers, étant souvent étudiés dans des cadre éducatifs. Ceci perpétue des appréhensions péjoratives face aux membres de communautés noires, d’après Cénat.

À l’école [secondaire et universitaire], le racisme se manifesterait de différentes façons, ajoute-t-il ; « Ce sont des enseignant.e.s qui vont donner de [moins bonnes] notes, qui ne vont pas donner la parole [aux étudiant.e.s noir.e.s], qui ne vont pas [leur] poser de questions ou [les inciter] à la participation.»

Cénat fait aussi référence aux interactions discriminatoires entre étudiant.e.s. Il remarque qu’« il y a des étudiant.e.s qui ne veulent pas prendre un.e étudiant.e noir.e [dans leur groupe] parce qu’ils pensent qu’ils.elles sont moins intelligent.e.s qu’eux. » C’est sans oublier que les enseignant.e.s noir.e.s représenteraient 2 % des enseignant.e.s universitaires. 

 

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