Inscrire un terme

Retour
Éditorial

Malgré la diversité, où est la nouveauté?

Rédaction
16 septembre 2019

Éditorial

Concept visuel : Emmanuelle Gingras & Andrey Gosse 

Par Emmanuelle Gingras – Rédactrice en chef

Nous célébrons ce 25 septembre 2019, la journée des Franco-Ontarien.ne.s. Après environ 50 ans de tentatives de concrétisation au niveau de son identité, que peut-on en dire aujourd’hui? Et, plus précisément, sur quoi repose sa culture? Portons donc ici un regard critique sur la chose, car toute culture se doit d’être discutée et remise en question afin de proprement évoluer.

C’est au début des années 70 que le théâtre et la littérature ont été le fer de lance dans le nord de l’Ontario. La culture franco-ontarienne tentant de se distinguer, c’est une voix identitaire parmi les autres communautés franco-canadiennes que celle-ci se recherchait. Une chose est toutefois indéniable selon Michel Bock, professeur d’histoire à l’Université d’Ottawa, c’est que celle-ci sera toujours inspirée par sa descendance franco-canadienne.

Celui-ci parle aussi entre autres de « pôles qui s’attirent », où les communautés francophones éloignées de la province n’ont nul autre choix d’évoluer culturellement selon leurs réalités individuelles. Nous parlerions donc ici d’une culture fragmentée où plusieurs petites minorités se battent chacune de leur côté pour ce qu’elles ont à réclamer et dénoncer, sans nécessairement pouvoir se concrétiser ensemble.

C’est pourquoi, entre autre, que des évènements comme la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), Théâtre Action et Quand ça nous chante ont lieu chaque année. Servant de moyens de contacts entre chacune des communautés secondaires francophones de l’Ontario.

Une communauté diversifiée

Mentionnons ici que sur environ 700 000 Francos-Ontarien.ne.s, environ 25 % de ses francophones sont alimenté.e.s par l’immigration. « Il est très rare qu’une minorité accueille une autre minorité », souligne Bock.

Dans cette optique d’ouverture, semblerait qu’une diversité très positive a lieu. Par contre, la culture n’a nul autre choix que d’avoir quelques difficultés à se concrétiser. Est-ce pour autant problématique? 

Aucunement. Une culture n’a pas nécessairement à se concrétiser. Elle peut devenir à peu près ce qu’elle veut et surtout si l’on considère l’art comme quelque chose de relatif. Et encore plus si on considère qu’elle se doit d’évoluer; ouvrir son discours à la nouveauté l’empêche au contraire de baigner dans sa propre eau trop longtemps.

D’ailleurs, le milieu culturel franco-ontarien demeure toujours peu culturellement diversifié. Denis Bertrand, coordonnateur général de l’Alliance culturelle de l’Ontario (ACO), souligne ce point dans une entrevue avec Radio Canada en précisant que la diversité serait un peu plus présente au niveau de la littérature et la musique, mais qu’au niveau du théâtre, celle-ci est encore presque totalement absente. 

« On a souvent l’impression que les arts en Ontario français s’adressent à un certain public en particulier un peu plus traditionnel blanc, de souche européenne » affirme-t-il lors de son entrevue. Celui-ci souhaite apporter une diversité chez les productions artistiques, mais aussi au niveau du public.

Ce manque de diversité n’est toutefois pas le seul, si nous parlions maintenant du manque d’exploration et de nouveauté sur un point de vue purement artistique?

L’art du petit milieu

Il y a à considérer l’humble taille des communautés, ne leur permettant peut-être pas nécessairement d’explorer autant qu’elles le voudraient. Peut-on vraiment se permettre de se « péter la yeule » et oser la nouveauté quand une culture est en danger? 

Mentionnons ici entre les outils très limités, de petits milieux parfois corrompus et un petit public habitué de voir certaines choses et pas d’autres. Mais surtout, craindre d’oser sous l’œil d’une communauté artistique trop proche les unes des autres.

Une fermeture quant à la discussion

Pendant l’été, La Rotonde avait entre autres fait une statistique sur Facebook avec une trentaine de Franco-ontarien.ne.s sur leur écoute et appréciation de la musique franco-ontarienne. L’on peut s’entendre sur la prochaine réalité; la scène musicale, comme les autres formes d’art, n’est pas la plus vaste et donc pas la plus diversifiée, ce qui fût l’un des commentaires constructifs récurrents.  

D’après les résultats, ceux qui consommeraient le plus cette culture y auraient été exposés en grandissant. L’initiative de faire promouvoir la culture francophone dans le contexte secondaire s’avère ainsi des plus pertinentes considérant en plus que pour plusieurs, il s’agit de la seule opportunité de consommer la culture francophone. Comme le mentionne Éric Barrette, gestionnaire des animateurs culturels des écoles du Nord-Ouest de l’Ontario, la rigueur et l’approche varient d’une école à l’autre. Cela serait entre autres dû au fait que les réalités ne sont pas les mêmes partout. 

De son côté, Éric Barrette ne concentre pas nécessairement son mandat sur valoriser la musique franco-ontarienne, mais bien francophone en général; « j’y vais en fonction de ce que l’élève va apprécier ».

Bref, tout ça pour en venir que ladite enquête qui a souligné un enjeu qui expliquerait peut-être une certaine stagnation au niveau de l’évolution culturelle franco-ontarienne. Il s’agit de la fermeture quant à la discussion. Quiconque remettant en question moindrement celle-ci était automatiquement attaqué et très peu de ceux la remettant en question ont souhaité être cités pour ladite enquête.

Il ne faut pas ignorer les exploits, mais serait-ce possible de discuter ouvertement des enjeux culturels pour aller de l’avant?

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire