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Mason fait le point sur le racisme à l’U d’O

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30 septembre 2019

Crédit visuel; Andrey Gosse – directeur artistique 

Par Maeve Burbridge – Cheffe du pupitre Actualités

Un incident de profilage racial a été signalé à l’Université d’Ottawa (U d’O) samedi le 14 septembre dernier. Wiliston Mason, étudiant en éducation et conseiller communautaire de la résidence Annex, a été arrêté par un garde au rez-de-chaussée de cette même résidence. La Rotonde met en lumière le point de vue de de Mason vis-à-vis l’incident.

La Rotonde: Pouvez-vous décrire la situation qui a eu lieu le 14 septembre dernier?

Wiliston Mason: Le samedi 14 septembre, à environ 22h, je suis arrivé à ma résidence avec ma valise pour retourner à ma chambre. J’ai utilisé ma carte d’accès pour entrer par la porte principale de l’édifice. Lorsque la porte s’est ouverte, un homme blanc est entré derrière moi sans taper de carte d’accès. Lorsque je suis entré au rez-de-chaussée, le garde qui y travaillait m’a arrêté et a demandé que je lui montre une pièce d’identification pour vérifier que je vivais réellement dans l’édifice.

Je savais qu’il n’avait pas le droit de me demander une pièce d’identification à ce moment-là. Je lui ai dit que je n’avais pas besoin d’une pièce d’identité pour entrer dans l’édifice. Dans toutes les résidences, la seule preuve nécessaire pour rentrer est la carte d’accès que j’avais déjà utilisé pour ouvrir les portes. Le garde a continué à insister pour que je lui montre une pièce d’identité.

Je lui ai dit que je ne lui montrerai aucune pièce d’identité et je lui ai fait savoir que je suis un conseiller communautaire pour la résidence et donc un employé de la résidence. Je lui ai montré ma photo, qui était sur le mur, avec les photos des autres conseillers de la résidence.

J’ai essayé de continuer mon trajet vers l’ascenseur pour accéder à ma chambre. C’est à ce moment-là que le garde a saisi ma valise. Il refusait de la lâcher, malgré le fait que je lui ai dit, de manière respectueuse, qu’il n’avait pas le droit de toucher mes affaires. J’ai essayé plusieurs fois de reprendre ma valise. Je lui ai dit que je retournais à ma chambre, puis il m’a dit qu’il ne me donnerais pas la permission de quitter le rez-de-chaussée tant que je ne lui montre pas une pièce d’identité.

Il m’a bloqué le passage physiquement et il m’a bousculé pour m’empêcher de quitter la salle. Je lui ai dit de ne pas me toucher. Les autres personnes présentes dans le rez-de-chaussée ont même confirmé auprès du garde que je vivais là, ce que le garde a choisi d’ignorer. J’ai continué à essayer de quitter le rez-de-chaussée, et le garde a continué à me restreindre physiquement. Je lui ai dit que ce qu’il faisait était de l’harcèlement et de l’abus.

La Rotonde: Selon vous, est-ce qu’il s’agissait d’un cas de profilage racial?

Wiliston Mason: Oui, je crois qu’il s’agit d’un cas de profilage racial. C’est du profilage racial quand quelqu’un assume qu’une autre personne a commis une infraction à cause de leur race. Je n’ai commis aucune infraction. Quand je suis entré, j’ai utilisé ma carte d’accès pour ouvrir la porte, ce qui est la norme dans toutes les résidences. Les gardes ne demandent jamais de fournir une pièce d’identité quand un.e étudiant.e entre. Le simple fait d’avoir une carte d’accès prouve que l’étudiant.e vit là, parce que les cartes sont seulement données aux étudiant.e.s qui habitent en résidence.

Un homme blanc est entré en même temps que moi sans taper sa carte. Le garde a pris la décision de me cibler. La seule différence entre moi et l’autre homme, c’est qu’il est blanc et que je suis noir. […] Bref, je ne peut concevoir aucune raison qui expliquerait cette situation, à part le profilage racial.

La Rotonde: Qu’avez-vous ressenti au moment de l’incident?

Wiliston Mason: C’était humiliant de me faire arrêter dans le rez-de-chaussée de l’immeuble où je travaille et je vis. […] Je me demandais ce que j’avais fait pour susciter cette réaction de la part du garde. […] Ce genre d’incident ne devrait plus avoir lieu. En plus, deux semaine avant l’incident, l’Université a mis en place un nouveau code de conduite vis-à-vis la discrimination en réponse à l’incident qui a eu lieu en juin [2019]. Au cours de la situation, je me disais qu’il fallait que je demeure respectueux tout en me défendant. Je me demandais ce qui allait se passer si la situation s’aggravait. Et si le garde utilisait de plus en plus de force? Je me demandais s’il allait me blesser.

Le fait que le garde ait ignoré ma photo sur le mur prouve qu’il ne voulait pas simplement vérifier si j’habitais dans le bâtiment. Il voulait me faire peur. J’ai subi une discrimination à cause de la couleur de ma peau. Depuis, à chaque fois que je rentre chez moi, j’ai vis de l’anxiété. Je me demande si un autre garde voudra abuser de son pouvoir pour prendre avantage de moi ou un.e autre résident.e.

La Rotonde: L’incident de profilage racial du 14 septembre est le deuxième cas signalé à l’U d’O dans les derniers 4 mois. Qu’est-ce que cela vous indique par rapport à notre campus?

Wiliston Mason: L’incident qui a eu lieu en juin et celui-ci prouve que notre campus n’est pas sans discrimination, comme le Recteur et les étudiant.e.s l’auraient espéré. Il y a toujours du racisme ainsi qu’un manque de tolérance et d’inclusion. Personne ne devrait vivre d’expériences comme la mienne. […] Je n’ai pas payé pour déménager à Ottawa pour vivre de l’harcèlement et de la violence aux mains de ceux qui sont censé assurer la sécurité du campus. Je ne pense pas que les règlements et politiques de l’Université vis-à-vis la discrimination sont assez strictes pour empêcher ce genre de situation. C’est clair que la formation offerte aux gardes est insuffisante.

La Rotonde: Depuis l’incident, vous sentez-vous en sécurité sur le campus?

Wiliston Mason: Avant le 14 septembre, je me sentais relativement en sécurité sur le campus. En tant qu’homme noir, je savais bien sûr que le racisme est une réalité. J’ai toujours su que c’était possible qu’un officier me traite différemment à cause de la couleur de ma peau. Après le 14 septembre, je me sens moins en sécurité que je me sentais avant. Je ne sais pas ce qui pourrait m’arriver aux mains d’un garde. Je dois me demander si une interaction négative aura lieu quand je suis tout simplement en train de me mêler de mes propres affaires. […] L’incident du 14 septembre m’a montré que certains gardes vont abuser de leur pouvoir tout simplement parce qu’ils le peuvent.

La Rotonde: Le nouveau code imposé par l’Université concernant la conduite des employés pour empêcher des situations similaires, pensez-vous que des solutions administratives comme celles-ci peuvent réellement être efficaces?

Wiliston Mason: Je pense que les solutions administratives peuvent être efficaces lorsqu’elles sont appuyées par d’autres ressources. Le Recteur a mis en place un comité pour faire des recommandations sur comment combattre le racisme et promouvoir la diversité et l’inclusivité, mais je me demande quelles solutions ce comité a trouvé à date. […]

C’est clair que le nouveau code de conduite est insuffisant. Au niveau de l’Université, je pense que leur première étape devrait être d’organiser une assemblée générale ou créer un forum en ligne pour que les étudiant.e.s puissent soumettre leurs idées par rapport à ce que l’Université peut faire pour créer un environnement plus sécuritaire. […] Si tous les membres de la communauté universitaire pouvaient donner leurs idées et suggérer des solutions, on pourrait peut-être trouver des solutions super efficaces. Si l’Université mettait sur pied une initiative qui regroupait les idées du personnel, des étudiant.e.s et des autres membres de la communauté, je pense qu’on trouverait une solution qui est à la hauteur.

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