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Éditorial

Oh Canada, terre de nos aïeux ?

Rédaction
1 juillet 2020

Crédit visuel : Pixabay

Par Caroline Fabre – Rédactrice en chef 

Alors que le Canada célèbre aujourd’hui son 153ème anniversaire, la pandémie de coronavirus bat toujours son plein à travers le monde. Si chaque année, le 1er juillet, date de la fête nationale, est célébré à coups de rassemblements et de fêtes à travers le pays, cette année semble couper à la tradition. Certes, la COVID-19 y est peut-être pour quelque chose, mais un mouvement baptisé #cancelcanadaday, initié par le site internet Idle No More a vu le jour sur les réseaux sociaux, et semble avoir pris de l’ampleur ces dernières semaines. En quoi consiste-t-il ?

Si les rassemblements de plus de 50 personnes sont toujours interdits, il semblait évident que les festivités liées à la fête nationale se dérouleraient en ligne. Mais, malgré les mesures mises en place pour la célébrer dûment, accordons-nous sur le fait que cette année restera mémorable, en de nombreux points. 

2020 restera entre autres marquée comme étant une année pivot dans la lutte contre le racisme systémique, et plus particulièrement racisme systémique perpétré envers la communauté noire. Le mouvement Black Lives Matter a pris de l’ampleur au sein de la société suite à l’assassinat de George Floyd par la police.

Vous ne voyez peut-être pas le rapport entre le titre de cet éditorial et le paragraphe précédent ? Il est pourtant bien simple : la lutte contre les discriminations, et la puissance des réseaux sociaux. 

Année sous le signe des protestations 

Succédant ironiquement au mois de juin, le mois national de l’histoire des autochtones, le premier juillet est, chaque année, l’immanquable rendez-vous des canadien.ne.s. Si la fête nationale rime avec rouge et blanc, bières, et feux d’artifice, pour une autre partie de la population, cette journée commémore également les massacres perpétrés à l’encontre de la communauté autochtone, le colonialisme, et le rappel constant des inégalités qui frappent les communautés minoritaires. Une journée pleine de réjouissances, vous en conviendrez. 

Mais cette année, un peu partout sur le web fleurissent les témoignages et les injonctions à ne pas célébrer la fête nationale, sous le hashtag #cancelcanadaday, en souvenir des promesses non tenues par les politiques, des traités non aboutis, et des inégalités que subissent les autochtones au quotidien. Un pan de l’histoire du pays est délaissé, quasiment laissé pour mort. C’est une bien belle leçon d’égalité que nous avons là.

Quelles mesures ont été prises par le gouvernement canadien à l’égard de ces dernières alors que le monde est entré dans un état d’urgence sanitaire ? Certes, des fonds ont été débloqués, et quelques livraisons de matériel médical ont été effectuées, mais tout cela a été jugés insuffisant par plusieurs chefs, qui déplorent l’absence de personnel. Encore une fois, preuve bien trop concrète du manque d’intérêt du gouvernement pour son propre peuple.

Il est bien simple de ne pas se sentir concerné.e par la situation des autochtones. Après tout, ils vivent parqués dans des réserves, isolés de tout et de tous. Mais justement, ne serait-il pas temps de se soucier d’eux, qui font partie intégrante du beau pays qu’est le Canada ? Oppression, marginalisation, stérilisations forcées, disparitions et assassinats. Voici l’horrible réalité qu’ils vivent au quotidien.

Reclus dans des réserves, où l’accès à l’eau potable est difficile, voire inexistant, où les logements sont délabrés, où le chauffage est rudimentaire dans l’un des pays les plus froids du monde, et où les taux de pauvreté, de suicide, de violence, et de violences policières battent des records. 

Peut-être n’êtes-vous pas bien renseigné, ou pas intéressé par le sort des populations autochtones ; cet éditorial ne vous intime pas l’ordre de ne plus célébrer la fête nationale canadienne, mais simplement de réaliser ce que vous célébrez réellement. Des années de discriminations, de racismes, de massacres, et de colonialisme. 

Il est simplement là pour demander aux gens de prendre réellement conscience quant à la raison de cette fête nationale. De réaliser que cette tradition est tirée d’années de colonisation et de nombreux génocides.

Comment s’éduquer ?

Comment pouvez-vous continuer à célébrer la fête du Canada tout en vous éduquant sur la situation ? En vous mobilisant et en supportant les communautés autochtones dans leurs combats. C’est un combat de tous les jours, pas seulement une tendance éphémère. Renseignez-vous sur la propre histoire de votre pays, favorisez les créateurs issus des Premières Nations, Métis, ou Inuit. Participez aux cagnottes, aux mouvements de résistance, et partagez les pétitions en ligne. 

Katie Beijer, étudiante en 3e année en baccalauréat en communication participe « régulièrement à des actions de solidarité relatives aux droits de l’homme et aux droits fonciers des autochtones. Mais en ce qui concerne la fête du Canada en particulier, je commence par ne pas la célébrer et je ne la reconnais pas comme une fête crédible ou honorable. J’enverrai des courriels à différents membres du Parlement, j’afficherai peut-être des affiches, mais surtout je soutiendrai les populations autochtones dans ma vie et j’appuierai les artistes et les organisations de base, par le biais de dons. » Elle organise également « des mouvements de solidarité autochtones à Ottawa depuis environ un an, et la décolonisation en fait partie intégrante ».

Idle No More, initiateur du mouvement met également à disposition une liste de ressources afin de « démanteler ces inégalités grâce au travail et aux ressources créés par les protecteurs des terres autochtones, les universitaires et les membres des communautés. »

« En tant que colons, nous devons nous impliquer, nous devons nous montrer, nous devons soutenir les communautés des Premières nations, des Inuits et des Métis, car il n’y aura ni paix ni justice et ce pays ne méritera pas d’être célébré tant que les peuples autochtones et leurs terres ne seront pas respectés par le gouvernement canadien », a conclu l’étudiante.

Si vous souhaitez tout de même célébrer la fête nationale, faites-le au moins en toute âme et conscience. Mais, oh Canada, est-ce vraiment comme cela que tu respectes tes aïeux et leurs terres ?

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