Crédit visuel : Dawson Couture – Co-rédacteur en chef
Article rédigé par Dawson Couture – Co-rédacteur en chef
Entourant la région urbaine d’Ottawa, les plus de 200 kilomètres carrés d’aires vertes protégées constituent depuis longtemps un pilier du paysage de la région. Ce territoire, géré majoritairement par la Commission de la capitale nationale (CCN), n’est pas pour autant protégée contre le développement urbain par une loi quelconque. Avec l’avènement de nouveaux projets d’expansion des lignes de transport, est-il temps de s’inquiéter du futur de la Ceinture de verdure ?
Cette région, localisée sur le territoire non-cédé Anishinaabe Algonquin, a été proposé en 1950 afin de contrôler l’expansion urbaine de la ville d’Ottawa. Elle héberge aujourd’hui de vastes écosystèmes vierges tout en accueillant 3,5 millions de visiteur.e.s annuellement. « En offrant un accès immédiat à la nature et la possibilités d’une variété d’activités récréatives, c’est devenu un véritable bijou de la ville pour les résidents d’Ottawa », insiste Paul Johanis, Président de l’Alliance pour les espaces verts de la capitale du Canada (AEVCC).
État des lieux
Le Plan Gréber a établi en 1950 la Ceinture de verdure autour de la ville d’Ottawa. Avec le temps, le gouvernement fédéral a acheté des territoires, notamment par l’expropriation, pour achever la zone qui existe aujourd’hui (y compris la tourbière Mer Bleue et le marécage Rocailleux). Cependant, lorsque des communautés à l’extérieur de la Ceinture ont commencé à prendre de l’ampleur, telles que Orléans, Barrhaven et Kanata, plusieurs routes et autres infrastructures ont brisé la continuité territoriale de cette zone.
Ce n’est qu’en 1985 que la CCN a été autorisée à gérer la région en vertu de la Loi sur la capitale nationale. Selon Benoît Desjardins, conseiller en communications stratégiques pour la société de la Couronne canadienne, la propriété est « l’outil le plus important utilisé par la CCN pour protéger l’intégrité territoriale de la Ceinture de verdure ». Aujourd’hui, seulement 26 % des terrains de la région appartiennent à des tiers partis autres que la CCN, principalement à d’autres ministères fédéraux, enchaîne-t-il.
Selon Johanis, a gestion de la société d’État est toutefois à double tranchant. Même si la conservation a toujours été une priorité pour la CCN, il affirme que son orientation peut varier selon la composition du conseil d’administration. « Ce n’est pas absolu, il y a toujours un risque qu’avec le temps, la CCN puisse réévaluer l’intégrité de la Ceinture de verdure », conclut-il.
Cela fait maintenant dix ans que l’agence fédérale a renouvelé son plan directeur, un document qui fournit les orientations pour les décisions d’aménagement et de gestion de la Ceinture de verdure. Dans la plus récente version (2013), la CCN a inclus les « limites arbitraires » du territoire en premier dans la liste des menaces à l’intégrité écologique de la région, suivies par la fragmentation du paysage par le développement urbain. La CCN « prévoyait » toutefois élaborer une définition légale des limites dans la durée de vie du plan, ce qu’elle n’a pas encore réussi à mettre en place.
Une barrière écologique
Si la crise climatique n’était pas aussi évidente en 2013, Johanis insiste qu’elle est maintenant devenue incontournable. Selon lui, le nouveau plan stratégique devra tenir compte de l’accélération des changements climatiques et prioriser la préservation de la faune et la fleur autour d’Ottawa.
Desjardins rassure que la révision du plan, prévue pour 2024, « devra considérer les effets croissants du changement climatique ainsi que la nécessité d’engager en réconciliation avec les communautés autochtones ». Les principales orientations du plan pourront néanmoins « être reconduites », selon lui.
Le représentant de la CCN a également annoncé l’élaboration d’une stratégie décennale d’adaptation au climat en partenariat avec la ville d’Ottawa et la ville de Gatineau. Selon lui, cette stratégie « comprendra des mesures visant à gérer les plus grands risques liés au climat », comme les phénomènes météorologiques de l’an dernier.
Pour Johanis, le derecho de l’année dernière soulève des inquiétudes quant à la capacité de la CCN à entretenir à elle seule la Ceinture de verdure. La CCN est toujours dans le processus de nettoyer la région après que des vents de plus de 180 km/h ont balayé la zone le 21 mai dernier, détruisant ainsi 70 % de la canopée. En raison du « sous-financement » de la CCN par le gouvernement fédéral, le président craint qu’elle « va vouloir se défaire de certains terrains » et les vendre à des tiers partis privés.
Une solution possible : transformer la région en parc national. La part du budget de Parc Canada mis de côté pour la création de nouveaux parcs nationaux urbains pourrait servir, selon Johanis, à combler les besoins de la CCN pour aménager la Ceinture de verdure. Malgré le soutien de l’AEVCC à cette idée, le maire Mark Sutcliffe s’y est opposé lors de sa campagne.
La Ceinture se resserre
Aujourd’hui, quelques projets de transport risquent de fragmenter davantage la Ceinture de verdure. L’étape 2 de l’expansion du projet de train léger franchira les frontières non-officielles de la région, notamment près de l’aéroport international Macdonald-Cartier.
L’initiative qui a cependant attiré le plus d’attention est le prolongement du boulevard Brian-Coburn et la construction d’un autre couloir pour le Transitway de Cumberland vers l’est. Après avoir évalué sept options, la ville d’Ottawa a sélectionné l’option 7 en 2021, un plan qui couperait à travers la Ceinture de verdure.
La CCN a jusqu’à présent refusé de permettre un tel développement près de la tourbière Mer Bleue, préférant l’option 1 et 4. L’option 1 est également soutenue par l’AEVCC comme étant « la meilleure solution pour assurer l’intégrité de la Ceinture de verdure », selon son président. Cette option ajouterait des voix additionnelles pour les autobus au corridor existant de la rocade de Blackburn.