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Sur la glace fine des finances étudiantes

Hai Huong Le Vu
8 novembre 2024

Crédit visuel : Sophie Désy — Photographe

Chronique rédigée par Hai Huong Lê Vu — Journaliste

Ah, l’ouverture d’un compte bancaire ! Pour plusieurs étudiant.e.s universitaires en quête d’autonomie, un compte bancaire est souvent synonyme d’achats en ligne, d’investissements et, surtout, d’indépendance financière. Mais, comment naviguer à travers  les nombreuses options qui s’offrent à nous ? 

J’étais dépendante d’un compte joint avec ma mère jusqu’à l’âge de 18 ans. Avant de poser mes pieds sur le sol canadien en 2022, le rêve d’avoir un compte bancaire indépendant me semblait étranger. Je préférais utiliser l’argent comptant : l’idée que chaque transaction effectuée avec la carte de ma mère puisse l’alerter me mettait mal à l’aise. Beurk ! Conséquemment, cette fonction limitait considérablement mon utilisation des cartes bancaires, et par cette logique, des comptes bancaires.

Mon arrivée au pays de la feuille d’érable a marqué le début de mon indépendance financière : j’ai dû dès lors ouvrir un compte indépendant. Je me disais qu’avec mon propre compte bancaire, je pouvais enfin gérer mon argent comme une grande, faire des achats en ligne sans crainte et même, peut-être, commencer à investir !

Or, très vite, la réalité m’a frappée. Débit ou crédit ? Qu’est-ce qu’un compte d’épargne ? Et l’investissement, comment ça marche ? Pourquoi les gens investissent-ils ? Tant de questions qui me donnaient des maux de tête. 

Le casse-tête des conditions et des frais bancaires

Premier obstacle : la preuve d’adresse. Comment payer le dépôt initial sans compte bancaire lorsqu’on veut louer un endroit, alors que l’ouverture d’un compte exige justement… une preuve d’adresse ? Heureusement, je vivais en résidence en première année, mais il n’y avait pas de contrat. Donc, j’ai dû utiliser mon forfait mobile. Et ce n’est pas tout. 

J’ai remarqué que plusieurs comptes sans frais annuels, proposés par les grandes banques, exigent un solde minimum. Des montants tels que 4 000 dollars par mois sont demandés. Comment atteindre un tel solde, lorsque je viens d’un pays où la monnaie est bien plus faible que celle du Canada ? D’ailleurs, le salaire minimum en Ontario, même à 17,20 dollars de l’heure, ne permet de gagner que 1032 dollars avant taxes par mois, pour un travail à temps partiel de 15 heures. Conséquemment, si cette condition n’est pas atteinte, nous nous trouvons contraint.e.s de payer des frais mensuels, parfois plus coûteux que les frais annuels d’autres types de cartes.

Effectivement, ouvrir un compte bancaire au Canada, en tant qu’étudiant.e international.e, peut ressembler au processus ardu d’apprentissage d’une nouvelle langue. La terminologie bancaire en particulier peut être un obstacle : CELI (compte d’épargne libre d’impôt), REER (régime enregistré d’épargne-retraite), HISA (compte d’épargne à haut rendement)… Tant de termes qui me paraissaient aussi obscurs que les règles du hockey.

Les cartes de crédit : mirage ou solution miracle ?

Les cartes de crédit, quant à elles, sont souvent présentées comme une solution miracle. Pourquoi ? On peut emprunter de l’argent pour effectuer des achats qui seront remboursés plus tard par nous-mêmes. D’un côté, elles offrent une certaine flexibilité et la possibilité de bâtir un historique de crédit, crucial pour obtenir des prêts importants à l’avenir. 

D’un autre côté, elles peuvent rapidement devenir un piège si l’on ne maîtrise pas les taux d’intérêt, les frais associés et les échéances. Comment évaluer notre limite de crédit sans connaître notre dépense mensuelle moyenne, notamment lorsque nous venons tout juste d’immigrer au Canada ? Dieu merci pour les banques qui proposent des comptes de crédit adaptés à la population estudiantine, comme la Banque de Montréal.

Le nombre de dettes de cartes de crédit est alarmant chez les jeunes. Une connaissance m’a déjà raconté que son amie s’en servait pour payer ses frais de scolarité. Curieuse, j’ai appelé l’Université, qui m’a confirmé que ce type de paiement n’est normalement pas autorisé. Est-ce que notre chère administration a eu connaissance de cette transaction ? Je n’en sais rien. Malgré tout, je me suis demandée si cette étudiante était au courant des frais de transfert et des taux d’intérêt qui s’accumulent en cas de retard de paiement. C’est pourquoi la littératie financière est cruciale.

Et puis, il y a le problème de la cote de crédit. Obtenir une carte de crédit sans historique de crédit peut s’avérer très difficile, surtout pour les cartes qui offrent des récompenses. Certain.e.s étudiant.e.s ne sont pas au courant de l’importance de bâtir un bon score de crédit dès le départ, ce qui peut les pénaliser plus tard lorsqu’ils.elles voudront louer un appartement, obtenir un prêt ou même trouver un emploi.

Se noyer dans un océan d’options

Dans un marché tellement compétitif, avec environ 80 banques réglementées au niveau fédéral, les étudiant.e.s ont tellement de choix lorsqu’il en vient à ouvrir un compte bancaire. Il est vrai que ces nombreuses options obligent les institutions bancaires à nous offrir davantage de promotions attirantes pour que nous nous tournions vers elles, mais, où peut-on trouver le temps nécessaire pour comparer toutes les possibilités ?

Toutes ces options demandent de la recherche : laquelle ne demande pas de frais mensuels ? Laquelle demande un solde minimum raisonnable ? Quelle banque a des employé.e.s qui maîtrisent bien la langue de notre choix ? Beaucoup d’entre nous sont des étudiant.e.s à temps plein, qui avons d’autres engagements, donc peu de temps pour nous soucier de questions comme celles-ci. 

Avec cette diversité d’institutions financières, ouvrir un compte bancaire au Canada est un peu comme apprendre à patiner : au début, nous sommes un peu maladroit.e.s, nous trébuchons, mais, grâce à la pratique et aux bons conseils, nous finissons par avoir confiance en nous et par apprécier la glisse.

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