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Sports et bien-être

Surprise et colère de l’équipe d’athlétisme suite à une décision de l’Université d’Ottawa

Camille Cottais
19 juillet 2022

Crédit visuel : Archives

Article rédigé par Camille Cottais – Journaliste

L’Université d’Ottawa (U d’O) a récemment pris la décision de faire passer l’équipe d’athlétisme des Gee-Gees de tiers 1 à tiers 2, réduisant ainsi considérablement ses fonds et services. L’équipe, qui s’est illustrée par ses succès et sa diversité, dénonce cette décision « insensée ».

Kylee Fowler est étudiante en deuxième année en sciences de l’activité physique et athlète en athlétisme et course de fond à l’U d’O. Elle explique que les équipes de l’Université sont divisées en trois tiers : le tiers 1 correspond à une dizaine d’équipes universitaires, comme la natation, le football, le rugby féminin ou encore le soccer féminin. Le tiers 2 désigne les clubs universitaires, notamment le rugby masculin et le golf. Finalement, le tiers 3 s’applique aux clubs compétitifs, recouvrant une vingtaine de sports tels que l’équitation, le ski ou l’escrime.

La différence principale entre les tiers est leur financement :  les sports tiers 1 reçoivent le plus d’argent de l’U d’O, notamment l’équipe de football. Celle-ci bénéficie de la plus grande portion des fonds, déclare Brooklyn McCormick, étudiante en quatrième année en sciences de la santé à l’U d’O et membre de l’équipe d’athlétisme. Le choix de rétrograder l’équipe d’athlétisme du tiers 1 au tiers 2 a été pris en raison des contraintes budgétaires suite à la pandémie, a expliqué l’U d’O aux membres de l’équipe.

Ces dernier.e.s dénoncent cependant une décision imposée, sans aucune solution alternative. « Nous avons eu une rencontre avec la directrice du Service des sports Sue Hylland. Nous pensions pouvoir débattre, mais pas du tout : c’était une présentation de la décision finale, il n’y avait pas de place pour la discussion », déplore McCormick.

Une décision lourde de conséquences

Cette décision n’est pas sans conséquence pour la soixantaine de membres de l’équipe d’athlétisme. Leurs déplacements pour les compétitions ne seront plus financés et ils.elles ne seront plus couvert.e.s pour leurs entraînements au Centre de haute performance. McCormick précise que le financement de l’Université sera de 40 000 dollars par année, ce qui est, selon elle, à peine suffisant pour couvrir le salaire des entraîneur.se.s.

« À chaque fois que l’on doit se rendre en compétition, il faudra payer 600 ou 700 dollars par personne. Personne dans l’équipe n’est capable de payer ce montant, sachant que nous faisons une douzaine de compétitions par année », développe-t-elle. Brianna Asiamah, étudiante en quatrième année en service social à l’U d’O et elle aussi membre de l’équipe d’athlétisme, ajoute que cette décision va également les priver des services de santé auxquels ils.elles avaient précédemment accès, comme les physiothérapeutes et les services de santé mentale.

Les membres de l’équipe ont été informés tardivement de cette décision, à quelques mois de la rentrée. Or, McCormick souligne que la plupart des étudiant.e.s-athlètes de son équipe ont appliqué à l’U d’O précisément pour continuer l’athlétisme au niveau tiers 1, tout comme les nouveaux.elles arrivant.e.s en septembre. « Si j’avais su que l’équipe allait être rétrogradée au niveau tiers 2, j’aurais changé d’université », affirme-t-elle. C’est également le cas de Asiamah, qui souhaitait rester pour sa maîtrise à l’U d’O, mais qui a changé d’avis suite à cette décision.

Selon elles, en plus des démissions que l’U d’O  va connaître parmi les étudiant.e.s de cette équipe, l’Université a aussi perdu la confiance de ses athlètes. « Si nous sommes si peu supporté.e.s par l’Université, pourquoi voudrait-on continuer à porter fièrement les Gee-Gees ? », se demande McCormick. Asiamah a ainsi décidé de porter cette année le maillot de son club, les Ottawa Lions, plutôt que celui du Gris et Grenat, pour contester cette décision.

« Discrimination et favoritisme »

Les membres de l’équipe d’athlétisme soulignent que cette décision est discriminatoire et constitue du favoritisme. Selon McCormick, l’équipe d’athlétisme est une des plus diversifiées de l’Université, avec une forte présence de femmes, de personnes racisées et de personnes handicapées. Il s’agit de la seule équipe permettant aux para-athlètes de concourir avec les personnes valides, et du seul sport avec la natation dont l’équipe est mixte.

McCormick rapporte que lors de la rencontre avec la directrice du Service des sports, celle-ci a confié qu’il n’était pas dans les plans de l’Université d’accommoder les para-athlètes. Pour Asiamah, par ce choix, l’U d’O donne la priorité à ses revenus plutôt qu’à ses valeurs de diversité et d’éthique. McCormick relève ainsi un décalage entre le discours et les actes, l’U d’O se déclarant pro-diversité et pro-santé mentale pour les étudiant.e.s sans agir en conséquence.

Cette décision illustre selon les athlètes un phénomène de favoritisme entre les disciplines, et notamment une préférence pour le football. Roger Archambault, directeur adjoint Haute performance, a admis que l’équipe d’athlétisme était déjà, avant cette décision, moins financée que les autres équipes : environ 100 000 dollars par année contre 700 000 par exemple pour l’équipe masculine de football. Selon McCormick, ce montant est même sous-estimé, puisque le budget de l’an passé indique un coût pour l’U d’O de 1.9 million de dollars concernant l’équipe de football, pour seulement 50 000 dollars de profits.

Pourtant, l’équipe d’athlétisme n’a pas moins de succès que les autres : cette année, elle a envoyé six athlètes dans les ligues USPORTS et Sports Universitaires de l’Ontario (OUAs) ; une réussite qui ne se répète pas nécessairement pour d’autres équipes Gee-Gees du tiers 1. La décision de l’U d’O est donc d’autant plus injuste, selon les athlètes de l’équipe.

McCormick affirme qu’avec cette réduction des fonds alloués, le programme ne va plus fonctionner. Les membres se demandent également pourquoi leur équipe devrait supporter la dette pour toutes les autres. Ainsi, Fowler explique que leur coéquipière Doyin Ogunremi a calculé que l’équipe d’athlétisme coûte si peu cher à l’U d’O qu’il suffirait de couper 2 % des fonds de chaque autre équipe tiers 1 pour la maintenir. Malgré les diverses propositions, l’Université s’est montrée réfractaire à toute discussion.

 

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