Dans les gradins des Gee-Gees : entre ferveur et inégalités d’audience
Crédit visuel : Jürgen Hoth – Photographe
Article rédigé par Emily Zaragoza – Journaliste
Le 1er octobre 2023, une foule de 24 000 spectateur.ice.s a assisté à la rencontre opposant les Ravens aux Gee-Gees dans le cadre du match Panda. C’est un public moins nombreux qui était présent à l’édition féminine du Classique Colonel By ou encore au Tri-meet de natation la semaine dernière. Comment expliquer la disparité dans la fréquentation des évènements et quel est l’importance des spectateur.rice.s pour les Gee-Gees ?
Pourquoi assister aux matchs des Gee-Gees ?
Spencer Murdock est agent d’information sportive pour les Gee-Gees. Pour lui, assister aux matchs permet aux étudiant.e.s de l’Université d’Ottawa (U d’O) d’avoir une expérience étudiante riche et de visionner du sport de haut niveau dans un environnement amusant. « Notre objectif est d’enflammer l’esprit du campus. Chaque match est une chance d’atteindre cet objectif pour nos étudiants-athlètes, nos entraîneurs et notre personnel », renchérit-il.
Rose-Anne Joly, entraîneure-cheffe de l’équipe de basketball féminine, rejoint cette pensée. Elle encourage les étudiant.e.s à venir à un match pour apprécier le spectacle, puis revenir si l’expérience leur a plu. D’autant que, selon elle, « prendre le temps de venir supporter les joueuses peut faire une différence [sur l’issue du match] ».
D’après Kevin Otoo, MVP du championnat des Sports universitaires de l’Ontario (SUO) en 2023, la rencontre de basketball masculin du 6 décembre contre Carleton ne se serait pas soldée par une victoire 79 à 78 sans les spectateur.rice.s. Suite au coup de sifflet final, il a déclaré à La Rotonde que « [les supporters] nous ont gagné ce match aujourd’hui ! J’ai perdu ma voix après avoir crié, j’adore la nation Gee-Gees ! » Alors que l’équipe d’Ottawa perdait de 19 points, « la foule est devenue folle » ce qui a galvanisé les joueurs et renversé l’issue du match, a raconté l’entraîneur-chef James Derouin.
Et l’argent dans tout ça ?
Pour assister à un match comme celui du 6 décembre, les spectateur.rice.s « standards » ont dû débourser 12 $, « soit le tarif destiné au grand public », explique Murdock. Les étudiant.e.s et les jeunes bénéficient d’un tarif préférentiel de 7 $ afin « d’assurer qu’il est abordable pour eux de venir soutenir nos équipes », précise-t-il.
Joly partage le sentiment que l’Université cherche à conserver des prix accessibles. Selon l’entraîneure-cheffe, une famille de deux parents et deux enfants peut venir assister à un match sans se ruiner, puisque « pour une sortie en famille, le montant reste raisonnable ».
Pour les matchs de la série rivalité, opposant les Gee-Gees et les Ravens, Murdock explique que ces évènements sont plus coûteux, permettant ainsi que les revenus de la vente des billets ne soient pas exclusivement dédiés « au recouvrement des coûts d’exécution, d’exploitation et de personnel des évènements ».
Il précise, par ailleurs, que la hausse du prix des billets est due à l’augmentation des dépenses causée par l’inflation couplée à d’autres facteurs socio-économiques. L’entraîneure-cheffe a observé, quant à elle, une forte augmentation des frais de déplacement ces dernières années. « La hausse du coût de la vie fait en sorte qu’on se retrouve un peu limité en termes de repas qu’on peut commander, parce que le budget que je reçois du Département des sports n’a pas autant augmenté », explique Joly.
Même tribune pour toutes les équipes ?
Derrière la question de l’argent peut également se cacher l’enjeu de la reconnaissance. Alors qu’il a décroché avec ses coéquipiers d’aviron la médaille de bronze lors des championnats des SUO, Vincent Ménard a confié espérer plus de considération de la part de l’U d’O et de financements à la hauteur de leurs accomplissements.
Selon Joly, la visibilité offerte à une discipline ou à une équipe tient un rôle majeur dans sa reconnaissance par le public. Elle ajoute que le Département des sports travaille pour informer la communauté universitaire, mais également pour faire la publicité des Gee-Gees au-delà des frontières du campus. À l’échelle nationale, le sport universitaire gagne de plus en plus en visibilité, comme l’attestent les chiffres du rapport annuel 2022-2023 d’U SPORTS : les abonnés Instagram ont augmenté de 27 % en un an et les pages du site internet ont cumulé 6,7 millions de vues entre le 31 mars 2022 et le 1er avril 2023, soit une augmentation de 67 %.
Murdoch constate l’intérêt grandissant pour le sport universitaire au sein de l’U d’O, notamment en raison d’une légère hausse de participation aux rencontres depuis la fin de la pandémie. Il remarque surtout une augmentation importante des billets vendus pour les matchs de basketball et de soccer féminin. « Cela correspond à la popularité croissante de ces deux sports au Canada, ainsi qu’au haut niveau de succès des équipes », conclut-il. Cette affirmation est corroborée par Joly qui déclare que les matchs de l’équipe féminine de basketball ont vu leur fréquentation augmenter significativement.
Il existe tout de même un écart avec l’équipe masculine en raison du manque de soutien et de visibilité des femmes dans le sport à l’échelle nationale et internationale, déplore-t-elle. « Corriger cette inégalité va être un travail de longue durée. Il faut démontrer que le sport féminin a autant sa place », enchaîne Joly.
L’entraîneure-cheffe encourage les étudiant.e.s à venir assister à un de leur match afin de « constater qu’il y a autant d’ambiance que dans les matchs des équipes masculines ». La prochaine rencontre de l’équipe aura lieu à la Place TD le 2 février lors du Classique Capital Hoops.