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Un comité par, pour et avec les Franco-Ontarien.ne.s

Dawson Couture
17 février 2022

Crédit visuel : Dereck Bassa – Photographe

Article rédigé par Dawson Couture – Journaliste

La Coalition nord-ontarienne pour une université de langue française annonçait le 1er février la mise en place d’un comité d’expert.e.s chargé de l’élaboration de recommandations pour l’Université de Sudbury (U de S) qui souhaite devenir une université pour les francophones. Le comité doit présenter leur revue de la vision et des impératifs pour cette institution, au plus tard au début du mois d’avril.

Le comité a été créé suite à la décision de l’UL de couper la moitié de ses programmes en français. Il regroupe d’ancien.n.e.s professeur.e.s de l’Université Laurentienne (UL) dont Jean-Charles Cachon, Aurélie Lacassagne et François Boudreau, ainsi que l’enseignante à la retraite, Marguerite Mbonimpa. Ils.elles se penchent principalement sur le mandat, la gouvernance et la programmation que devrait avoir l’U de S.

L’échec du bilinguisme

La décision de l’UL de couper plusieurs programmes en français et de mettre fin à la Fédération Laurentienne a été un véritable choc pour la communauté franco-ontarienne. L’Université a affirmé que cette restructuration lui permettrait d’économiser des millions de dollars par année.

Cachon, professeur émérite en gestion à l’UL, n’a pas mâché ses mots. Pour lui, les événements entourant l’UL sont venus cristalliser l’aboutissement de sa politique de bilinguisme. « Reprocher à une minorité d’avoir de faibles nombres dans ses classes est une absurdité puisque c’est la définition même d’une minorité », dénonce-t-il. Lacassagne, professeure invitée en sciences politiques à l’Université d’Ottawa, est du même avis. Selon elle, les institutions bilingues en Ontario présentent toujours un risque de minorisation, d’assimilation et d’inégalité, puisqu’elles n’offrent aucune garantie aux minorités.

C’est pour cela qu’il est impératif selon eux.elles d’avoir des institutions unilingues autonomes, tant pour les anglophones et les francophones que pour les peuples autochtones. « Dans notre esprit, les institutions sont les garants du maintien de la minorité », soutient Cachon.

Un comité en plein travail

D’après Cachon, il existe depuis longtemps un consensus auprès de la communauté francophone du Moyen-Nord pour une université francophone à part entière. « Ce qu’on nous demande, c’est de traduire par écrit la volonté de la communauté, comme elle a été exprimée depuis des dizaines d’années », souligne-t-il.

Lacassagne confirme que cette « feuille de route pour l’U de S » sera une véritable synthèse de nombreux rapports, lettres et consultations au sujet de l’avenir du postsecondaire dans le Moyen-Nord. Elle ajoute que les quatre membres du comité apporteront chacun.e leur expertise en tant que défenseur.e.s de longue date des droits des Franco-Ontarien.ne.s. Il n’y aura donc aucune surprise dans le rapport, appuie Cachon.

En tête de l’ordre du jour pour Cachon et ses collègues se trouve la restauration des programmes en français coupés par l’UL en mai 2021. Cela doit comprendre, selon lui, une inévitable transition des programmes de langue française restants à l’UL. Il lui est donc impératif que, dans l’intérim, ces programmes et les étudiant.e.s desservi.e.s soient protégé.e.s.

Pour ce faire, Lacassagne se montre ouverte à une panoplie de possibilités. Elle rapporte entre autres qu’un des mandats du comité est d’enquêter sur la possibilité de coopération avec d’autres institutions postsecondaires en Ontario. Cela s’inscrit dans leur plan d’assurer un accès continu aux services universitaires de langue française aux francophones de la province.

Représentativité, aujourd’hui et demain

Les deux ancien.ne.s membres du corps professoral ont dit avoir appris de l’absence de volonté réelle à l’UL de protéger et de promouvoir les droits des minorités. Cachon, qui a passé 38 ans de sa carrière à l’UL, reproche au Conseil des gouverneur.e.s d’avoir démoli le cœur de cette institution l’an dernier. Ce faisant, le professeur émérite affirme que l’institution s’est dessaisie de son mandat de préserver les droits des francophones.

Dans le cadre de la rédaction du rapport, Cachon est catégorique quant à la nécessité de réformer le leadership des institutions postsecondaires. En général, explique-t-il, les Conseils des gouverneur.e.s sont non-élu.e.s et sont plutôt sélectionné.e.s par la haute-direction des universités. Selon lui, les candidat.e.s font souvent partie d’une clique qui se partage en rotation les sièges exécutifs au sein des institutions de la région. Ceux.celles-ci cherchent avant tout à maintenir leur statut, ajoute-t-il, et contribuent de façon minimale dans les discussions à remettre en question un consensus préétabli.

Afin de garantir une université par, pour et avec la communauté francophone du Moyen-Nord, Lacassagne estime que la représentativité dans les coulisses du pouvoir est la clé. Comme ses collègues, elle cherche à aller au-delà de la simple consultation, qu’elle décrit comme étant une véritable maladie. « Il n’est plus temps de consulter, mais d’écouter et de prendre action », déclare-t-elle.

En particulier, Cachon suggère de remplacer une portion du Conseil des gouverneur.e.s à l’U de S par « des représentant.e.s de la communauté, choisie.s dans la communauté ». Il ajoute que les professeur.e.s et étudiant.e.s devraient également avoir un mot à dire dans la gouvernance et l’offre de cours de l’Université. C’est le seul moyen, selon lui, de garantir la pérennité de la langue française dans les institutions postsecondaires francophones.

Le comité planifie de remettre son rapport préliminaire début mars afin de le faire circuler, à la discrétion de la Coalition. Cela aura pour but d’alimenter le rapport final prévu pour début avril.

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