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Éditorial

Le combat contre la violence à l’égard des femmes continue

Rédaction
23 novembre 2020

Crédit visuel : Nisrine Nail – Directrice artistique

Par Caroline Fabre – Rédactrice en chef

Depuis 1999, chaque 25 novembre commémore la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, et cette année, il faut en parler. Alors que le coronavirus sévit depuis un an déjà, les chiffres faisant état des cas de violences conjugales au sein des foyers canadiens ont explosé. Et ce, dans l’indifférence quasiment totale.

La date a été choisie en hommage aux sœurs Mirabal, devenues les symboles du combat pour éradiquer la violence à l’égard des femmes. Les trois militantes dominicaines furent assassinées le 25 novembre 1960 sur les ordres du dictateur du pays, Rafael Trujillo. Et 50 ans après, la situation n’a pas énormément changé. 

Pandémie et violences

C’est sans grande surprise que les cas de violence faites aux femmes ont augmenté durant l’année 2020. L’Onta­rio Asso­cia­tion of Inter­val and Tran­si­tion Houses rapporte que depuis le début du mois de mars, le nombre d’ap­pels de femmes victimes de violences domes­tiques a consi­dé­ra­ble­ment augmenté. Un sondage réalisé par l’organisme Réseau des femmes du sud-ouest de l’Ontario expose que les cas de violence faite aux femmes ont augmenté de plus de 40 % par rapport à l’an passé dans la région.

Avec les différents confinements, et le télétravail, la population est amenée à passer bien plus de temps cloîtrée chez elle. Les personnes victimes de violences conjugales se retrouvent souvent dans l’incapacité de demander de l’aide à cause de l’isolement forcé dans lequel elles sont plongées, piégées avec leur.s agresseur.euse.s.

L’augmentation de tels actes de violence était donc tristement prévisible. Pour y répondre, le gouverment du Canada a annoncé avoir mis en place un programme de 207,5 millions de dollars pour venir en aide aux personnes en situation d’itinérance et aux femmes qui fuient la violence fondée sur le sexe. Alors, débloquer des fonds pour ces organismes, c’est bien. Mais qu’en est-il des personnes considérées comme vulnérables, et soumises à d’autres formes de violence ?

Parce que la violence à l’égard des femmes est loin d’être uniquement sexuelle. La Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la définit comme « tous actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée. »

La Fondation canadienne des femmes a de son côté élaboré un signe de la main afin que les femmes qui sont victimes de violence conjugale puissent discrètement réclamer de l’aide durant un appel vidéo. Le Manitoba a mis en place un nouveau cours de sensibilisation à la violence familiale, offert en ligne aux employé.e.s du gouvernement et aux autres travailleur.euse.s de première ligne de la province.

Chiffres atterrants

La COVID-19 est sûrement à blâmer pour cette année, mais en période de pandémie ou non, les chiffres concernant les violences conjugales sont alarmants. À l’échelle mondiale, il y a eu 87 000 féminicides en 2017, rapportait l’Organisation des Nations Unies. Un chiffre démesuré, qui peut faire penser que cette violence ne se déroule pas dans un pays aussi civilisé que le Canada.

Et pourtant. En 2019, l’Observatoire canadien du fémicide pour la justice et la responsabilisation estimait qu’environ une femme était tuée par son conjoint tous les sept jours au Canada. C’est en moyenne une femme ou fille tuée à chaque deux jours quelque part dans notre pays. 

Une autre idée préconçue serait de penser que ces violences, ces attaques, ne prennent place que dans des foyers établis, dans des couples formés depuis longtemps. Or, Statistique Canada révélait en 2008 que les personnes de 15 à 24 ans étaient quatre fois plus à risque de subir de la violence conjugale que les individues de 45 à 54 ans. Ça ne se passe pas que dans les couples mariés, avec des enfants. Il est temps d’ouvrir les yeux, et de mettre en place des mesures pour éradiquer la violence de nos vies. Et pour cela, il s’agirait de prendre les survivantes au sérieux. 

Société profondément misogyne

Fin octobre, l’influenceuse Élisabeth Rioux avait dénoncé sur son compte Instagram les comportements violents de son ex-partenaire à l’égard de son enfant et d’elle. Au lieu de prendre au sérieux un sujet de telle envergure, des animateur.rice.s de Le Canal Nouvelles et de QUB Radio lui ont reproché la façon dont elle avait dénoncé ces abus par le biais de ses réseaux sociaux. Ils lui ont également reproché sa pseudo superficialité, et son effet dit négatif sur les jeunes.

Au lieu de parler de ses photos en bikinis et d’une fois de plus blâmer la victime, n’y avait-il un autre combat, bien plus important, à mener ? Comment les survivantes de ces abus sont-elles supposées parler de leur situation, si c’est pour être publiquement moquées par la suite ? Comment est-on supposé vaincre la misogynie quand même les femmes ne se soutiennent pas entre elles ?

Car le 25 novembre commémore également la tuerie de l’École polytechnique de Montréal, datant du 6 décembre 1989, dans laquelle quatorze femmes ont été assassinées sous prétexte qu’elles étaient… Des femmes. Affirmer que la société actuelle n’est pas machiste reviendrait à bafouer leur mémoire, mais aussi la mémoire de toutes celles qui survivent à la violence au quotidien.

Ce n’est pas pour rien que depuis 1981, la période s’étendant du 25 novembre au 10 décembre symbolise 16 jours d’activisme pour lutter contre la violence fondée sur le sexe. Les deux dates ont été choisies dans le but de lier, de façon symbolique, la violence faite aux femmes et les droits humains.

Si vous êtes dans une situa­tion de violence et avez besoin de services, vous pouvez contac­ter ces lignes de crise :

CALACS : 613–789–8096

Fem’aide : 1 (877)-336–2433

Ligne d’ur­gence pour les femmes victimes de violence (dispo­nible 24 heures sur 24) : 613–745–4818

Programme des soins aux victimes d’agres­sions sexuelles et d’abus par un parte­naire : 613–761–4366

Services pour femmes battues : 613–745–3665 (Voix et ATS)

Téléas­sis­tance pour les femmes victimes de violence : 1–866–863–0511

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