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Arts et culture

Les tatouages au travail, toujours tabous ?

Marie-Ève Duguay
13 février 2022

Crédit visuel : Nisrine Nail – Directrice artistique

Article rédigé par Marie-Ève Duguay – Cheffe du pupitre Arts et culture

Pour plusieurs, les tatouages et les modifications corporelles telles que les perçages représentent une forme d’expression personnelle importante. S’ils étaient auparavant perçus de manière plutôt négative, ils sont aujourd’hui beaucoup plus communs et acceptés. La question se pose alors : le fait d’avoir des tatouages impose-t-il toujours des limites ou des restrictions dans le milieu du travail ?

Une employée de l’Université d’Ottawa (U d’O) dans le domaine des finances, qui préfère rester anonyme, se confie sur son expérience en tant que femme tatouée et qui a « deux perçages évidents [sur] [son] visage ». Selon elle, aucun métier n’est impraticable avec des tatouages.

Aspect légal

Pourtant, d’après le cabinet d’avocats Minken en Ontario, la Charte canadienne des droits et libertés ainsi que le Code des droits de la personne de la province stipulent que les employeur.euse.s possèdent le droit de refuser d’embaucher une personne en fonction de ses tatouages et autres modifications corporelles.

Emilie Marcotte est gestionnaire dans une pharmacie locale et explique que, la majorité du temps, les personnes tatouées n’ont pas de difficulté à s’intégrer dans son équipe. Cependant, elle mentionne que si un.e individu.e se présentait avec des images haineuses ou violentes, sa compagnie se réserve le droit de refuser l’embauche. « Nous travaillons en service à la clientèle, ainsi nous devons être respectueux.euses et la façon dont nous nous présentons est très importante », mentionne-t-elle. Toutefois, Marcotte ajoute que, « si la modification peut être facilement cachée, et si le.la candidat.e est bien fait.e pour la position, le tatouage ne sera pas notre première préoccupation ».

Geneviève Picard, directrice des communications à l’Hôpital Montfort, partage une politique similaire pour les membres du personnel hospitalier. De fait, elle signale qu’ « aucun message, dessin ou image dégradants, discriminatoires, de mauvais goût, de propos à caractère haineux porté sur les vêtements ou sur le corps sous forme de tatouage visible n’est permis [chez les employé.e.s] ».

L’employée de l’U d’O affirme qu’elle croit aussi que si une personne se présente au travail avec des tatouages de nature violente, il est tout à fait justifiable « de refuser l’embauche [en raison des] tatouages ».

Discrimination…

Si la source anonyme n’a jamais vécu consciemment de discrimination concernant ses tatouages et/ou perçages, elle souligne qu’elle a toujours eu l’habitude de les camoufler lors de ses entretiens d’embauche. « Personne ne sait que je suis tatouée », confie-t-elle, et ses modifications corporelles n’influencent ainsi pas ses chances.

Outre dans le cas des tatouages « intolérables », la source anonyme n’est pas d’accord avec le droit qui est réservé aux employeur.euse.s et considère qu’il s’agit bel et bien d’une forme de discrimination. Elle affirme d’ailleurs que « si des employeur.euse.s refusent tout tatouage, [elle] ne voudrai[t] pas travailler pour ces gens, de toute façon » et qu’elle « préfère travailler avec des gens qui ont à cœur l’ouverture et la tolérance ».

Marcotte acquiesce et confirme qu’il y a effectivement « une discrimination certaine » lorsque l’apparence d’un.e futur.e employé.e possible influence la décision d’embauche.

… ou non ?

Il semblerait cependant que l’interdiction des tatouages et des perçages dans un lieu de travail ne soit pas toujours forcément un résultat de discrimination. Picard remarque dans la politique de Montfort une interdiction des tatouages au henné « en matière de prévention des infections ». Il est d’ailleurs indiqué que « les tatouages au henné et de papier sont interdits, car ces produits peuvent créer des particules qui peuvent s’avérer des sources potentielles de contamination ».

Discrimination ou non, tout n’est pas perdu pour les personnes tatouées. La source anonyme soutient que le télétravail peut heureusement servir de « solution », aussi temporaire soit-elle, pour les gens avec des tatouages et/ou perçages qui sont peut-être plus susceptibles d’être victimes de discrimination. Elle conclut que si les entrevues et le travail ont lieu en ligne, il est plus facile de garder certaines modifications corporelles hors de la vue des employeur.euse.s et ainsi, éviter cette forme d’injustice.

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