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Arts et culture

Multitude : Stromae annonce son retour avec triomphe 

Dawson Couture
20 mars 2022

Crédit visuel : Courtoisie – Site web de Stromae

Critique rédigée par Dawson Couture – Journaliste

Neuf ans après le lancement de Racine carrée, Stromae fait son retour hautement anticipé avec Multitude. Au cours des 12 chansons livrées en 36 minutes, l’auteur-compositeur-interprète ne mâche pas ses mots. De façon réfléchie, la star belge prend la parole sur un éventail d’expériences et d’enjeux sociaux, y compris la maladie, le féminisme et la dépression.

Stromae superpose son lyrisme et son jeu de rôle caractéristiques sur une variété de nouvelles mélodies aux inspirations diverses, allant de rythmes sud-américains à l’instrumentation chinoise. L’expérimentation musicale sur cet album est évidente et, malgré quelques points faibles dans la deuxième moitié, Stromae parvient à nous fournir des performances émouvantes comparables aux classiques de sa discographie.

Les premiers singles, « Santé » et « L’enfer », ont été parfaitement sélectionnés pour promouvoir et représenter ce projet. Ils s’intègrent formidablement au sein de l’album et sont mis en valeur par les compositions qui les entourent, notamment « Fils de joie » et « La solassitude ». Multitude parvient par-dessus tout à faire bouger les auditeur.ice.s et à faire vouloir répéter ses refrains accrocheurs. Vous ne serez pas déçu.e.s !

Faire changer les idées

Dès l’introduction, Stromae nous met au courant de sa lutte contre le paludisme, une maladie dont le traitement a provoqué des troubles cognitifs majeurs chez le chanteur. Il parvient, dans la chanson « Invaincu », à mettre la table pour ce à quoi on peut s’attendre en termes d’intensité et de contenu. Il est prêt à verser ses larmes sur le papier dans l’optique de se libérer, mais aussi de potentiellement libérer les autres de leurs traumatismes.

Dans la chanson « C’est que du bonheur », qui apparaît plus tard dans l’album, Stromae nous invite à entrer dans sa vie de parent avec « les vomis, les cacas et puis tout l’reste ». De façon ironique et même typique de l’artiste, il décide de coupler un ton monotone avec une mélodie qui invite à danser sur un rythme moderne reggaeton et dancehall. Ce sont pourtant ses premières lignes qui révèlent tout : il déclare que la naissance de son fils lui a sauvé la vie.

Dans le contexte de la chanson qui la précède, « L’enfer », nous pouvons comprendre à quel point il pèse ses mots. Sur un simple fond de piano, Stromae rappelle calmement les sentiments qui ont accompagné ses pensées suicidaires en reconstituant avec brio les différentes facettes de cet état d’esprit. Alors que le refrain prend son cours, la musique enfle au point de véritablement briser. C’est pour imiter, on peut imaginer, la tête du chanteur qui ne cesse de réfléchir.

Une ouverture d’esprit

Lorsqu’il ne partage pas ses expériences personnelles, Stromae dénonce les injustices qu’il perçoit dans sa société. « Fils de joie » est sans doute un point marquant par lequel l’auteur cherche à rendre « hommage à toutes les femmes oubliées ». À travers les perspectives fictives du client, du fils et du proxénète d’une travailleuse du sexe, ainsi que d’un policier, Stromae met en lumière leur réalité. Il tente de réhabiliter leur image dans la perception populaire en les qualifiant de « héros ». Il est fortement recommandé d’écouter ce morceau pour la première fois avec le vidéoclip qui l’accompagne.

L’emploi de divers personnages pour présenter ces points de vue uniques se répète dans « La solassitude » et « Pas vraiment ». On ressent toutefois dans ces couplets que le chanteur ne s’absente pas complètement des expériences de couple qui sont véhiculées.

Dans d’autres chansons cependant, Stromae tente de mettre en valeur la réalité des femmes qui naviguent au sein d’une société qui les désavantage systématiquement. Quoique les chansons « Mon amour » et « Déclaration » pourraient être plus travaillées, tout le travail effectué pour être allié au sexe opposé est évident. Il aurait toutefois été utile d’inclure une artiste féminine, même si ce n’est pas typique de Stromae de faire appel à d’autres chanteur.euse.s-interprètes.

Dans ce paysage musical actuel qui est souvent dépourvu de sens et de perspicacité, il est rafraîchissant d’entendre ces vérités brutales servies d’une manière aussi élégante et accessible. Le talent et la gamme de Stromae sont pleinement exposés, sans compromettre ce qui a fait de lui un artiste unique dès ses humbles débuts.

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