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Arts et culture

Repousser les limites du théâtre avec Nick Gray

Mabinty Toure
11 novembre 2022

Crédit visuel : Nick Gray – Courtoisie

Entrevue réalisée par Mabinty Toure – Journaliste 

Le 26 octobre 2022, Jeunesse Ottawa a annoncé les gagnant.e.s du 25e prix annuel RBC Esprit de la capitale (RBC Capital Spirit). Parmi elles et eux, Nick Gray, étudiant à l’Université d’Ottawa (U d’O), se démarque dans la catégorie Arts et culture avec des œuvres qui tentent de « repousser les limites du monde du théâtre ».

La Rotonde (LR) : Pouvez-vous commencer par vous présenter ? 

Nick Gray (NG) : Mon nom est Nick Gray. Je suis en troisième année du programme d’arts interdisciplinaires à l’U d’O. Je me considère aussi comme acteur, écrivain, metteur en scène et dramaturge.

LR : Qu’est-ce qui vous a poussé vers le monde du théâtre et de l’art ? Comment avez-vous commencé à écrire vos propres œuvres ? 

NG : Tout a commencé à l’école secondaire. Lorsque j’y étais, je devais choisir les cours dans lesquels j’allais me spécialiser. Parmi eux, j’ai choisi le théâtre. C’est dans cette classe que j’ai découvert mon intérêt pour l’écriture à travers un exercice centré sur l’écriture d’un personnage théâtral. Il nous fallait choisir un script et je me souviens avoir regardé la pile de scripts qui avaient été proposés par la professeure et je me suis dit : « tous ces scripts sont nuls. Pourquoi est-ce que je n’écrirais pas quelque chose de plus intéressant » ?

Ce moment m’a permis d’écrire ma première pièce de théâtre qui fut très appréciée par ma professeure et l’ensemble de la classe. J’ai donc poursuivi cette passion tout le long de mon parcours scolaire. Après avoir fait partie de la performance de fin d’année, en plus d’être le chef accessoiriste, j’ai gagné un prix. Puis, j’ai poursuivi ce cursus jusqu’à aujourd’hui !

LR : Pouvez-vous nous parler de votre travail ? Comment arrivez-vous à créer un espace d’inclusion et de diversité ? 

NG : Je me décris comme un observateur du monde qui m’entoure. J’aime apprendre et je m’inspire constamment de mon entourage pour mes œuvres.

J’aime avoir une distribution diverse, non pas uniquement à cause de l’importance de la diversité, mais aussi parce que cela rend les histoires racontées plus intéressantes. Je pense qu’il est important de créer des rôles qui mettent en valeur des acteur.ice.s que l’on ne voit jamais dans ces rôles. Par exemple, en 2021, j’ai fait un spectacle intitulé GOREgeous au festival Fresh Meat. Dans cette performance, j’ai choisi de faire jouer deux acteur.ice.s humoristiques dans des rôles « dramatiques » parce que sinon personne n’allait leur donner la chance de le faire. J’aime défier les gens et montrer différentes facettes des acteur.ice.s avec qui je travaille et bien sûr de moi-même.

LR : Comment décririez-vous la scène théâtrale d’Ottawa en matière d’inclusion et de diversité ?

NG : C’est une question très intéressante parce que d’une certaine manière, j’ai été bien accueilli par la scène théâtrale d’Ottawa, mais j’éprouve des problèmes avec elle. Récemment, j’ai expérimenté certaines difficultés. J’ai de nouveau participé au festival Fresh Meat il y a quelques semaines. À l’occasion de cette pièce, je cherchais à engager un acteur noir pour le spectacle. Lorsque j’ai auditionné pour les rôles principaux et deux autres petits rôles, j’ai reçu 48 candidatures. Ce qui m’a vraiment déçu, c’est que la majorité de ces personnes ont auditionné pour les rôles des deux filles blanches, qui étaient des rôles secondaires. J’ai compris qu’il n’y a probablement pas beaucoup d’acteurs noir.e.s qui accèdent à ce type de ressources parce qu’il n’y a tout simplement pas beaucoup d’opportunités.

J’aimerais voir plus de diversité, y compris plus de minorités dans des histoires qui n’ont rien à voir avec le fait d’être une minorité, comme être une personne noire, être une personne autochtone, être un membre de la communauté LGBTQ+, etc. Je souhaite mettre en scène une distribution diversifiée : raconter une histoire qui est enrichie par leur expérience vécue, mais pas définie par elle. Je trouve que la communauté théâtrale a un manque de ce côté-là.

LR : Quels sont les défis que vous devez relever en tant qu’écrivain et acteur noir ?

NG : Je dirais que c’est difficile de trouver les opportunités aux bons endroits. Je me considère comme un bon metteur en scène et rédacteur donc je suis confiant lorsqu’il s’agit d’appliquer pour de nouveaux projets. Cependant, cela peut être parfois difficile d’éviter le racisme dans certaines situations. J’ai été choisi pour jouer dans un spectacle et j’ai découvert que la principale raison pour laquelle le directeur m’avait choisie pour le spectacle était qu’il voulait avoir une distribution diverse. J’ai senti que mon talent n’était pas le facteur décisif pour la distribution, et cela m’a déçu. Je trouve souvent que lorsque les histoires ne tournent pas autour du racisme, de l’expérience vécue ou du traumatisme, on aura plus tendance à voir des acteur.ice.s blanc.he.s dans ces rôles.

Je ne suis pas intéressé par le fait d’être un token. Ça ne me dérange pas de faire partie d’une histoire qui parle de racisme. Mais je ne veux pas être au premier plan de l’expérience noire parce que je suis une personne biraciale à la peau claire. Mon expérience ne s’aligne pas toujours sur celle de toutes les personnes noires. Je ne souhaite pas avoir ce genre de rôles.

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