Inscrire un terme

Retour
Sports et bien-être

Se priver de manger pour maigrir, oui, mais à quel prix ?

Dawson Couture
4 avril 2021

Crédit visuel : Valé­rie Soares – Photo­graphe

Article rédigé par Marie-Ève Duguay – Journaliste

Parmi les régimes alimentaires qui gagnent en popularité, la pratique du jeûne est en tête de liste. Qu’elle soit employée pour perdre du poids ou améliorer sa santé, les avis des professionnel.le.s de la santé s’accordent quant à l’efficacité de cette méthode. 

Catherine Michaud, nutritionniste et membre de l’Ordre professionnel des diététistes du Québec et diplômée de l’Université d’Ottawa (U d’O), affirme que certaines recherches ont démontré que le jeûne peut avoir plusieurs bienfaits lorsqu’il est fait de manière sécuritaire. Pourtant, Michaud et Jennifer Neale, nutritionniste chez Nutrition IQ, mettent en garde par rapport à certains effets néfastes de cette pratique.

Les deux nutritionnistes s’accordent pour dire que cette méthode est le plus souvent pratiquée dans l’optique de perdre du poids. Michaud explique que, contrairement aux autres types de régimes, celui-ci met davantage l’accent sur le moment propice pour manger plutôt que sur les aliments consommés. 

Bienfaits variés

Michaud indique qu’il existe plusieurs types de jeûnes. La version alternative propose à un.e individu.e de manger normalement pendant une journée complète, et de se priver lors de la journée qui suit. Le jeûne intermittent, quant à lui, consiste en une prise alimentaire d’une durée spécifique suivie d’une période de jeûne. Par exemple, un.e individu.e pourrait s’alimenter durant une période de huit heures puis jeûner pendant seize heures. Elle poursuit avec la méthode 5 : 2, une sous catégorie du jeûne intermittent, qui indique de limiter ses apports caloriques pendant deux journées non consécutives, puis à manger normalement durant les cinq autres jours de la semaine.

La nutritionniste graduée de l’U d’O observe que nombreuses recherches démontrent des avantages liés à ce type de régime, notamment la perte de poids. Ces études révèlent également que le jeûne peut avoir des conséquences positives sur la pression sanguine, les taux d’insuline, ainsi que sur le métabolisme de glucose des individus diabétiques de type II. 

Cependant, les résultats soulignent qu’une prise de poids peut parfois avoir lieu lorsqu’une personne cesse de jeûner. Un manque d’études témoignant des effets de cette pratique à long terme influence Neale et Michaud à ne pas la considérer comme une solution durable.  

Conseils d’expertes

Michaud insiste sur le fait qu’elle ne recommande pas le jeûne pour « les enfants qui sont en pleine croissance, les femmes enceintes, les personnes qui sont sous leur poids santé, les personnes âgées et celles et ceux qui doivent prendre des médicaments en mangeant ». Dans ces cas-ci, les effets secondaires du régime pourraient avoir une influence plus importante. 

Neale souligne d’ailleurs qu’il existe d’autres types de régimes plus sécuritaires, comme la méthode de l’alimentation intuitive, basée sur l’écoute des signaux de faim et sur le respect de son anatomie. « C’est une façon de travailler en équipe et en harmonie avec son corps, et non contre lui », explique Michaud. 

Mise en garde

Malgré les avantages abordés par les recherches soulevées par Michaud, les nutritionnistes ne recommandent pas la méthode à leurs client.e.s. Entre conséquences nocives sur le corps et sur la santé mentale, elles estiment que ce régime peut s’avérer très néfaste, comme modifier les signaux de faim et de satiété d’une personne. En imposant ainsi des règles externes à son corps quant à son apport calorique, jeûner serait aller à l’encontre de « sa sagesse interne », explique Neale. 

Michaud fait savoir que le jeûne peut aussi avoir des répercussions sur le système digestif : la diarrhée ou la constipation sont souvent des effets secondaires qui accompagnent sa pratique. Elle ajoute qu’il peut aussi être la source de carences alimentaires, qui ont à leur tour des effets multiples sur la santé. 

Concernant la santé mentale, Neale affirme que ce régime peut mener à des pratiques alimentaires désordonnées, et que son manque de durabilité peut inviter les pratiquant.e.s à se blâmer pour l’insuccès du régime. Elle illustre que les personnes qui jeûnent vont souvent avoir des « derniers repas », durant lesquels ils.elles mangent le plus possible avant de se priver. Ce type de comportement peut d’après elle mener à l’hyperphagie, et au sentiment de perte de contrôle face à la nourriture. 

Michaud note qu’ « être bien dans son corps est déjà un défi pour certain.e.s », et que le jeûne peut influencer négativement ces personnes quant à leur perception de soi, et leur relation avec la nourriture. D’après les deux nutritionnistes, la ligne qui sépare les troubles alimentaires du jeûne est très mince. 

Pour les personnes qui désirent tout de même essayer le jeûne, Michaud insiste sur l’importance de consulter un.e professionnel.le de la santé. Que ce soit par son médecin de famille ou par un.e nutritionniste certifié.e, elle croit qu’il est primordial d’être accompagné.e afin d’être bien informé.e et de demeurer en sécurité. 

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire