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Arts et culture

Tisser des liens entre autochtones et allochtones avec Sipi Flamand

Crédit visuel : Sipi Flamand — Courtoisie

Entrevue réalisée par Hai Huong Le Vu – Journaliste

En juin, Mois national de l’histoire autochtone, La Rotonde célèbre les contributions des personnes autochtones avec une série d’entrevues honorant leurs membres. Avec Sipi Flamand, Atikamekw Nehirowisiw et chef de la communauté Manawan, nous avons discuté de décolonisation et de résurgence culturelle et politique autochtone.

La Rotonde (LR) : Que signifie le Mois national de l’histoire autochtone pour vous ?

Sipi Flamand (SF) : Pour moi, ce mois représente une occasion pour entrer en dialogue entre les peuples autochtones et la société canadienne en général. Je pense que c’est important pour qu’on puisse célébrer ensemble, et développer ce dialogue dans l’optique d’une réelle réconciliation entre nos peuples.

C’est également important que nous puissions aborder la question des réalités des Premières Nations, des Inuits et des Métis. Ces peuples sont là depuis plusieurs millénaires, et si on veut partager le même territoire, il faut reconnaître le passé de ce dernier et les réalités que celui-ci a vécu. Si on veut ouvrir un dialogue ensemble, il faut être prêt.e.s à se prendre au sérieux, d’un côté comme de l’autre.

LR : Comment les communautés autochtones perçoivent-elles le Mois national de l’histoire autochtone ?

SF : Les communautés autochtones sont favorables au Mois national de l’histoire autochtone, car il permet de sensibiliser la population canadienne aux réalités et aux enjeux auxquel.le.s celles-ci font face. C’est aussi une opportunité de faire connaître nos cultures, nos langues et nos philosophies. 

Selon moi, le gouvernement doit investir dans ces populations davantage afin qu’elles aient plus de reconnaissance dans les lieux publics. C’est le cas en Nouvelle-Zélande, où la culture maorie est mise en avant. Le Canada peut véritablement avancer vers la réconciliation en donnant plus de place aux peuples autochtones politiquement, économiquement, socialement et culturellement.

LR : À vos yeux, quel est l’état actuel de la réconciliation et de la décolonisation au Canada ?

SF : C’est bien beau de parler de réconciliation, mais ce qu’on observe, c’est plutôt une réconciliation à sens unique, qui s’oppose à une autre vision de la manière dont on devrait agir avec la société en général. À mon avis, les aîné.e.s voudraient qu’on reconnaisse leur passé et leur histoire, mais qu’on leur donne aussi la possibilité de se réconcilier eux-mêmes au sein de leurs communautés. 

Pour qu’une véritable réconciliation soit possible, il faudrait pouvoir instaurer un dialogue égalitaire avec l’ensemble de la population et les gouvernements, sans qu’on nous impose des méthodes autoritaires, comme celles qu’on subit présentement avec les impôts.

LR : Quelles seraient les étapes essentielles pour que les Premières Nations, les Inuits et les Métis puissent exercer l’autodétermination ?

SF : Pour qu’on puisse vraiment exercer notre autodétermination, il faut nous donner le temps et l’occasion de nous développer et de réfléchir sur ce qu’on veut comme mode de gouvernance. Je parle ici de l’implication des aîné.e.s, des jeunes, des femmes et de nos autorités traditionnelles dans une gouvernance qui soit adaptée à notre réalité culturelle.

Je songe au principe du consentement ottoman, selon lequel tout individu peut exprimer son opinion et être entendu. En effet, jusqu’à maintenant, le modèle de gouvernance actuellement en place dans nos communautés est teinté de colonialisme : c’est un système qu’on nous a imposé.

Si on veut véritablement parler d’autodétermination, on doit pouvoir prendre le temps de réfléchir à un modèle de gouvernance qui nous correspond, en apprenant comment obtenir le financement nécessaire pour y arriver. Je pense aussi que les gouvernements doivent allouer des fonds pour qu’on puisse revoir le mode de gouvernance.

LR : De quelle manière la société canadienne peut-elle célébrer le Mois de l’histoire autochtone en vue de la réconciliation ? 

SF : Si la société canadienne souhaite s’engager dans une démarche de réconciliation avec les peuples autochtones, elle doit s’informer et sensibiliser la population à propos des questions autochtones. Par exemple, en ce moment, on peut trouver facilement de la littérature autochtone. Des événements tels que des festivals ou encore la Journée nationale des peuples autochtones, le 21 juin, sont également organisés partout au pays. Les personnes autochtones se rassemblent aussi souvent dans les centres urbains pour organiser divers événements. Sinon, allez dans les communautés : nous démontrerons notre ouverture à accueillir toute personne souhaitant participer à un échange interculturel.

Ensuite, la question est de savoir comment promouvoir le dialogue entre les sociétés autochtones et non autochtones tout au long de l’année, et pas seulement durant un mois. Chaque citoyen.ne du Canada doit s’engager et exiger que le gouvernement agisse afin qu’une véritable réconciliation soit possible dans nos relations avec les gouvernements. Je crois que les citoyen.ne.s ont le pouvoir d’agir et ont également la responsabilité de demander des comptes à leurs représentant.e.s élu.e.s.

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