Crédit visuel : Courtoisie
Article rédigé par Jessica Malutama — Cheffe du pupitre Sports et bien-être
À l’Université d’Ottawa (U d’O), la collaboration entre le Conseil des étudiants-athlètes noirs (CDEAN) et les Activités récréatives et sport interuniversitaire (ARSU) a donné un nouveau souffle à la diversité et l’inclusion dans le sport universitaire. Ensemble, il.elle.s redéfinissent les structures existantes pour mieux représenter les étudiant.e.s-athlètes racisé.e.s au sein des Gee-Gees et rendre le sport interuniversitaire plus inclusif.
Un levier pour la diversité sportive
« Le sport est un puissant vecteur de changement social », affirme Stefan Supplice, conseiller principal de la culture et du sport sécuritaire des Gee-Gees. Depuis la création du CDEAN, il se réjouit de voir les étudiant.e.s-athlètes s’impliquer et devenir « des ambassadeur.ice.s de nos valeurs dans la communauté ».
Ce partenariat entre les ARSU et le conseil étudiant, qui dure maintenant depuis quatre ans, a un impact au-delà du campus et touche la communauté d’Ottawa-Gatineau, informe le conseiller. Une évolution qui ne s’est pas faite sans défis : le temps, la taille de l’institution et la lenteur du changement ont constitué des obstacles majeurs, reconnaît-il.
Malgré ces difficultés, la mobilisation croissante des étudiant.e.s-athlètes et le renforcement du sentiment de communauté ont permis des progrès tangibles, relève le conseiller principal des Gee-Gees. D’après lui, l’U d’O s’est affirmée comme « leader en matière d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) dans le sport universitaire », un engagement qui lui a valu des reconnaissances à l’échelle provinciale.
Kwabena-Nana Gyimah, coprésident du CDEAN, insiste sur la nécessité de créer un environnement où les athlètes noir.e.s et racisé.e.s peuvent s’épanouir pleinement et se sentir représenté.e.s. Selon lui, un des plus grands atouts du CDEAN est de fournir un espace où ces dernier.ère.s peuvent être eux.elles-mêmes, sans avoir à modifier leur façon de parler ou de se comporter pour s’adapter aux codes culturels dominants, un phénomène connu sous le nom de « code switching ».
Ce projet prend forme à travers plusieurs actions clés, telles que la bourse du Conseil de défense des étudiant.e.s-athlètes noir.e.s des Gee-Gees, les événements communautaires Peace in the Streets, ou encore la journée Level-Up, qui « favorisent l’inclusion et permettent aux athlètes racisé.e.s de s’épanouir tant sur le terrain que dans leur communauté », indique le conseiller des Gee-Gees.
Un plan antiraciste dans le milieu sportif
La mise en place du plan de lutte contre le racisme des Gee-Gees marque un tournant dans la politique d’inclusion du sport universitaire, informe Supplice. Ce plan, né en réponse aux « préoccupations des étudiant.e.s-athlètes et entraîneur.se.s noir.e.s », sert de « feuille de route » pour renforcer l’engagement des ARSU en matière d’EDI et garantir une représentation plus équitable des athlètes racisé.e.s au sein des Gee-Gees. Supplice souligne que des formations annuelles sont proposées aux athlètes ainsi qu’au personnel.
Cependant, Janae Mckay, coprésidente du CDEAN, regrette l’absence d’un poste spécifiquement dédié au suivi de ces initiatives. Elle insiste sur la nécessité de ressources supplémentaires pour assurer la pérennité de ces projets « Il faudrait plus de temps et de ressources », affirme-t-elle. Supplice, de son côté, reconnaît que les « changements de personnel et des restructurations de postes » compliquent la mise en œuvre de ces projets.
Une avancée majeure a cependant été réalisée avec la création du poste de conseiller principal en culture et sport sécuritaire en janvier dernier. Cette fonction vise à instaurer un environnement respectueux et inclusif au sein des sports universitaires, en mettant en place des mesures concrètes pour assurer une expérience positive aux étudiant.e.s-athlètes, détaille Supplice. McKay reconnaît qu’il s’agit d’un progrès important, mais insiste sur la nécessité de « maintenir la pression » afin que ces engagements se traduisent en actions concrètes et durables.
Une vision pour l’avenir
Le CDEAN ne compte pas s’arrêter là. Gyimah souhaite « solidifier [le] conseil en tant que structure officielle sur le campus [pour] organiser et formaliser [son] fonctionnement ».
« Je pense que ce serait formidable si les étudiant.e.s-athlètes noir.e.s disaient ‘’Je veux aller à l’U d’O parce que c’est un espace sûr pour moi.’’ On pourrait presque dire que ce serait comme une université historiquement noire (HBCU). C’est vraiment cette vision que j’ai », exprime Gyimah. Supplice, pour sa part, évoque la finalisation d’un accord à long terme entre le CDEAN et l’ARSU, censé garantir « un soutien financier et logistique durable ».
McKay aspire à l’organisation d’un sommet national des athlètes noir.e.s, à l’image du Black Student Athletes Summit aux États-Unis. Elle estime que cet événement serait une occasion unique de recréer une atmosphère de soutien et de partage d’idées entre les étudiant.e.s-athlètes noir.e.s : « J’adorerais pouvoir recréer cette ambiance au Canada, parce que je pense qu’il n’existe rien de comparable ici ».
Afin de porter ces enjeux à un niveau politique et institutionnel plus large, le CDEAN prévoit d’intervenir au Parlement canadien en avril prochain. Cette prise de parole vise à sensibiliser les décideur.se.s aux défis que rencontrent les athlètes racisé.e.s et encourager des réformes en faveur d‘un sport universitaire mieux adapté aux besoins des athlètes.
Malgré un contexte financier difficile, Supplice souligne qu’une implication croissante des étudiant.e.s-athlètes et la collaboration des ARSU permettent de poursuivre les efforts pour inscrire les principes de l’EDI au cœur du sport universitaire à l’U d’O, qui entend s’affirmer comme modèle pour les autres établissements canadiens souhaitant renforcer la place des athlètes racisé.e.s dans le sport universitaire.