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Après l’augmentation des frais de scolarité, la suppression de la bourse au mérite

Camille Cottais
19 juin 2022

Crédit visuel : Archives

Article rédigé par Camille Cottais – Journaliste

C’est la décision prise à la réunion du Bureau des gouverneurs du 30 mai dernier : la bourse au mérite sera supprimée à compter de janvier 2023. Si les étudiant.e.s en bénéficiant actuellement continueront de la recevoir jusqu’à la fin de leur diplôme, les nouveaux.elles arrivant.e.s ne pourront pas compter sur ce supplément de 1000 dollars par semestre.

La bourse au mérite offerte par l’Université d’Ottawa (U d’O) récompense l’excellence scolaire des étudiant.e.s, en leur offrant automatiquement 1000 dollars lors des semestres où ils.elles obtiennent une moyenne pondérée de plus de 8,50. Pour un programme de baccalauréat de quatre ans, les étudiant.e.s peuvent donc obtenir jusqu’à 8 000 dollars grâce à cette bourse.

Jessica Tchida est représentante des étudiant.e.s de premier cycle au Bureau des gouverneurs de premier cycle. Elle explique que lors de la réunion du 30 mai dernier, le budget 2022-2023 présenté par Jill Scott incluait, en plus de l’augmentation des frais de scolarité, la suppression de la bourse au mérite. Malgré l’opposition de Tchida et d’autres membres, le budget a été voté et approuvé.

Pourquoi une telle suppression ?

Patrick Charette, ex-responsable des relations médias de l’U d’O, confirme la fin de la bourse à partir de janvier 2023. Toutefois, il précise que les étudiant.e.s qui en bénéficient déjà, y compris celles et ceux admis.e.s pour l’automne 2022, ne seront pas affectés.

Il justifie la décision de l’établissement en soulignant qu’« une telle approche est similaire aux autres universités ontariennes qui, pour la plupart, n’offrent pas de telles bourses au mérite ». La principale raison invoquée est cependant l’augmentation du nombre d’étudiant.e.s admissibles à cette bourse, conséquence selon lui de l’introduction des notes qualitatives (S/NS) pendant la pandémie. Tchida confirme que l’Université a constaté une inflation des notes des étudiant.e.s durant la pandémie, ce qui n’avait pas été prévu dans les budgets initiaux.

Charette précise que l’U d’O possède néanmoins un très généreux programme de bourses : dans le budget 2022-2023, 156 millions de dollars sont consacrés aux bourses et à l’aide financière directe, soit 46 millions de plus que dans le budget de 2021-2022.

Selon une étudiante internationale en troisième année de psychologie, qui a souhaité rester anonyme, cette justification est absurde : « L’Université a accepté d’offrir l’option S/NS, personne ne l’a forcé. C’est comme si on nous avait fait un cadeau empoisonné ». Selon elle, l’administration aurait pu choisir une option moins radicale, comme augmenter la moyenne nécessaire pour obtenir la bourse, plutôt que de la supprimer définitivement. 

Elle précise en outre que l’option S/NS n’a été offerte pleinement que durant le semestre d’hiver 2020, et partiellement pendant l’automne 2020 et l’hiver 2021 : il ne s’agit donc plus, selon elle, d’une excuse valable aujourd’hui, alors que nous semblons retourner à une vie universitaire normale.

Selon l’étudiante, cette décision est révélatrice d’un problème plus général : celui du gouvernement des universités à la manière d’entreprises. Elle cite en exemple la présence de la Banque Royale du Canada à UCU. « L’important n’est plus de veiller au bien-être des étudiant.e.s, mais de faire le plus d’argent possible », fustige-t-elle.

La fin d’une bourse généreuse

Tchida a été déçue du choix de l’Université de supprimer la bourse au mérite, de nombreux.se.s étudiant.e.s en étant selon elle financièrement dépendant.e.s. Ajoutée à la hausse des frais de scolarité, elle pense que cette décision aura un impact négatif sur la capacité de certain.e.s à poursuivre leurs études.

Pour l’étudiante anonyme, l’éducation postsecondaire devient de plus en plus un privilège réservé aux personnes les plus aisées. Elle rappelle que ces augmentations constantes des frais de scolarité, et ces coupes dans l’aide financière des universités, s’ajoutent à la hausse du coût de la vie et des logements, qui, ensemble, créent une pression financière insupportable sur les étudiant.e.s.

Celle-ci pensait rester à l’U d’O pour y faire sa maîtrise, mais « ces décisions de plus en plus austères à l’égard des étudiant.e.s prises par l’Université » lui en ont coupé l’envie.

Manque de transparence

Tchida n’était pas au courant de cette suppression avant la réunion du Bureau des gouverneurs du 30 mai dernier. Elle explique que même le Syndicat étudiant de l’U d’O n’avait pas été informé de cette décision, contrairement à l’augmentation des frais de scolarité, qui a été le sujet de plusieurs discussions entre l’administration et les membres du syndicat. Selon elle, l’U d’O aurait dû consulter les étudiant.e.s, puisqu’il s’agit d’une décision ayant un impact direct sur leur accès à l’éducation. 

L’étudiante anonyme a quant à elle appris cette suppression par bouche à oreille. « Pourquoi cette décision a été cachée ? », se demande-t-elle. « Nous avons reçu un courriel, bien que très vague, concernant l’augmentation des frais de scolarité, mais aucune annonce publique concernant la bourse au mérite ». Celle-ci est par ailleurs toujours promue sur le site de l’U d’O.

 

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