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Confusion concernant le remboursement de la PCU 

Dawson Couture
20 juillet 2022

Crédit visuel : Archives 

Article rédigé par Dawson Couture – Journaliste

Plusieurs Canadien.ne.s qui ont perdu leur travail lors de la pandémie ont reçu 2 000 dollars par mois dans le cadre de la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Ils.elles se réveillent aujourd’hui avec des avis de créance du gouvernement fédéral exigeant un remboursement. Deux ans après les premiers paiements, Ottawa tient sa promesse de récupérer le montant auprès de tou.te.s les demandeur.euse.s considéré.e.s inadmissibles, ainsi que l’impôt prélevé sur le revenu de leurs prestations. 

Tandis que certain.e.s sont surpris.e.s de recevoir des messages de l’Agence du revenu du Canada (ARC), plusieurs se retrouvent dans l’incapacité de rembourser les prestations. C’est le cas d’un étudiant de l’Université d’Ottawa (U d’O) ayant souhaité rester anonyme. Celui-ci a reçu un avis de créance en juin 2022 lui demandant le remboursement de son avance initiale de 2 000 dollars. Il estime qu’un délai de deux ans est raisonnable pour le recouvrement d’une dette, « mais pas si les gens ne savent pas qu’ils doivent la rembourser ».

Amin Mawani est professeur associé de fiscalité à la Schulich School of Business de l’Université York à Toronto. Il se dit sceptique quant au fait que les Canadien.ne.s auraient été mal informé.e.s des exigences établies par la PCU. D’après lui, les règles étaient simples et clairement énoncées sur le portail. Les bénéficiaires recevant les avis de créance n’ont ainsi, selon lui, pas respecté ou compris les directives.

Mauvaise communication ou malentendu ?

Adam Lavecchia est professeur adjoint en économie à l’Université McMaster. Il rappelle qu’à compter du 15 mars 2020, les Canadien.ne.s ayant perdu leur emploi et ayant gagné moins de 5 000 dollars (avant impôts) au cours des 12 derniers mois, ou en 2019, pouvaient demander une aide d’urgence sous la forme de la PCU. Il précise que les bénéficiaires ne pouvaient, en outre, pas gagner plus de 1 000 dollars de revenu d’emploi pendant au moins 14 jours consécutifs, au cours de la période de quatre semaines.

Un autre étudiant commençant ses études cet automne à l’U d’O et ayant également désiré garder l’anonymat a fait une demande pour la PCU lorsqu’il a été licencié au début de la pandémie. Il fait partie des 1,7 million de Canadien.ne.s qui ont été jugé.e.s non admissibles par l’ARC et qui doivent rembourser ce montant. Ce dernier fait valoir qu’il n’a jamais été avisé du fait qu’il allait devoir rembourser les 2 000 dollars initiaux.

Pour Mawani, les directives indiquaient clairement que les demandeur.euse.s allaient devoir rembourser leurs prestations s’ils étaient jugés non admissibles. Il est néanmoins difficile d’évaluer si les renseignements en ligne étaient suffisants, selon Lavecchia, alors que 17,8 % des récipiendaires sont désormais tenu.e.s de rembourser. Il ajoute que le stress de la pandémie a pu en conduire certain.e.s à réclamer un bénéfice auquel ils.elles n’avaient pas droit.

Un moment opportun ?

Alors que l’étudiant de l’U d’O dit avoir compris clairement les critères d’admissibilité, il affirme s’être senti laissé dans l’ignorance quant au besoin de rembourser l’avance de 2 000 dollars octroyée au début de la pandémie. Selon Emploi et Développement social Canada (EDSC), les bénéficiaires de l’avance qui n’avaient pas droit aux paiements de la PCU, ou qui ne les ont pas perçus pendant au moins 20 semaines, devaient payer une partie ou la totalité de l’avance. 

C’est le cas de ce même étudiant qui estime que le remboursement est juste, mais qui soutient que le manque de communication claire de la part du gouvernement lui a causé, ainsi qu’à d’autres, de la détresse économique. L’ARC avait initialement fixé un délai de traitement de deux à trois semaines pour la validation de l’admissibilité. Il lui a fallu deux ans pour être informé au sujet du remboursement. « J’aurais pu mettre de l’argent de côté au cours de ces deux années, mais devoir soudainement payer, c’est un peu ingrat », déclare-t-il. 

Mawani insiste que l’on doit garder à l’esprit que de tels bénéfices ont été développés dans un court délai et offerts pour la toute première fois en 2020. Les conditions de remboursement pour les citoyen.ne.s à faible revenu étaient également très généreuses à son avis. Alors que certain.e.s se sont fait demander de payer dans un délai de 30 jours ou moins, Lavecchia insiste que des plans de remboursement flexibles peuvent être négociés avec l’ARC.

L’étudiant de l’U d’O, ainsi que le futur étudiant, cherchent tous deux à négocier un plan de paiement. Le premier est incapable de payer la dette puisqu’il finance lui-même ses frais de scolarité, de subsistance et de logement. Le nouvel arrivant de l’U d’O estime pour sa part qu’avec une récession éventuelle, le moment est inapproprié pour réclamer l’argent.

Dans un monde parfait, Mawani convient que les bénéficiaires non admissibles auraient dû être informé.e.s plus tôt. Il affirme toutefois que si le gouvernement n’avait pas exigé le remboursement du montant aux récipiendaires inadmissibles, la population aurait, à juste titre, réagi négativement. Au total, Ottawa a versé 74 milliards de dollars pour soutenir 8,9 millions de Canadien.ne.s ayant perdu leur emploi en 2020. 

PCU ou PCUE ?

Lavecchia pense que la communication du gouvernement aurait pu être plus claire dans la distinction entre les critères d’éligibilité des étudiant.e.s pour la PCU et la Prestation canadienne d’urgence pour les étudiant.e.s (PCUE). Puisque la PCUE a été annoncée après la PCU, le professeur adjoint songe que certain.e.s étudiant.e.s auraient vraisemblablement fait une demande pour l’une alors qu’ils.elles auraient dû attendre l’autre.

Ottawa a annoncé fin juin que plus de 100 000 étudiant.e.s ayant appliqué incorrectement à la PCU pourront déduire le montant qu’ils.elles auraient perçu au titre de la PCUE du montant qu’ils.elles doivent pour les remboursements. Ils.elles auront ainsi à rembourser un écart de 750 dollars par mois.

Pour Lavecchia, cette décision permet de s’assurer que le remboursement est seulement égal aux prestations supplémentaires qui ont été reçues par erreur. Même s’il comprend que ce sera difficile pour certain.e.s étudiant.e.s d’effectuer ces paiements, il croit que renoncer à ces remboursements ou modifier les critères d’éligibilité serait injuste pour celles et ceux qui ont fait une demande légitime.

 

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