Inscrire un terme

Retour
Actualités

Dans la peau d’un page à la Chambre des communes

Jessica Malutama
8 novembre 2023

Crédit visuel : Courtoisie (Page Instagram du Programme des pages : hoc_pages_cdc)

Entrevue réalisée par Jessica Malutama — Journaliste

Chaque année, le Programme des pages à la Chambre des communes est composé d’une majorité d’étudiant.e.s de première année de l’Université d’Ottawa (l’U d’O). Dans un entretien accordé à La Rotonde, Thomas De Ladurantaye, étudiant en droit à l’U d’O, qui fut page et membre de la cohorte 2022-2023, est revenu sur son passage à la colline parlementaire.

La Rotonde (LR) : Comment décririez-vous le Programme des pages ?

Thomas De Ladurantaye (TDL) : Le Programme des pages rassemble à une quarantaine de jeunes de partout à travers le Canada. Cette expérience leur donne l’occasion de se trouver au cœur de la démocratie canadienne et de voir en quoi consiste le Parlement du Canada. Pour être admissible, il faut être un.e étudiant.e. de première année inscrit.e dans l’une des quatre institutions postsecondaires admissibles de la région de la capitale nationale. Nous sommes les seul.e.s au Canada à avoir un accès privilégié à tous les évènements politiques et diplomatiques qui se tiennent à la Chambre des communes.

LR : Qu’est-ce qui vous a incité à vouloir intégrer le Programme ? 

TDL : Bien que je me sois toujours intéressé à la politique et que je vienne de la région, je ne connaissais pas le Programme des pages. Ce qui est très drôle, c’est que je l’ai découvert quelques jours avant la date limite pour soumettre sa candidature, en tombant sur un ami lors d’une petite soirée. Sans cette rencontre, je n’aurais jamais trouvé le Programme, car je crois qu’il manque de visibilité.

LR : En tant que page, quelles responsabilités avez-vous eu à endosser à la Chambre des communes et à l’extérieur de la colline parlementaire ?

En ce qui concerne le rôle d’un.e page, à l’extérieur de la colline du Parlement, nous devons toujours rester politiquement neutre. Par exemple, nous ne pouvons pas participer à des manifestations, partager notre opinion politique sur la place publique ou prendre part à des débats avec notre cercle social rapproché parce que nous possédons des informations confidentielles. Le but d’un.e page est de toujours préserver une belle image parce que nous représentons, avant tout, l’administration de la Chambre des communes et des client.e.s particulier.ère.s.

À l’intérieur de la Chambre des communes, notre rôle est surtout symbolique. Nous servons des verres d’eau aux membres de la Chambre, nous distribuons des papiers à ces dernier.ère.s ainsi qu’aux interprètes, et nous répondons aux demandes particulières des politicien.ne.s.

Nous avons aussi un accès privilégié aux député.e.s. Nos superviseur.e.s organisent parfois des rencontres avec ces dernier.ère.s où nous pouvons en apprendre davantage sur eux.elles sur le plan personnel et voir leur côté plus humain.

LR : Qu’est-ce que vous avez observé dans votre rôle comme page ?

TDL : Avant cette expérience, je voyais la politique canadienne plus sérieusement, mais parfois, c’est vraiment une grande garderie. Par exemple, l’image que les politicien.ne.s projettent à la télévision est travaillée. Les partis politiques sont motivés avant tout par une logique et une rhétorique partisanes. Cela peut freiner certaines avancées politiques si l’on pense notamment au projet de loi sur la taxe carbone, et je trouve cela dommage. Je pense que tout le monde cherche à faire avancer le Canada, mais avec l’intention de prendre le pouvoir.

Les comités de la Chambre des communes ont peu de visibilité, mais ils sont aussi très importants. Ce sont des sortes de mini-Chambres des communes où l’on ne débat que d’un sujet. Par exemple, le Comité permanent des finances discute spécifiquement des finances. Parfois, lors des commissions parlementaires, les comités sont présents et on fait venir des expert.e.s universitaires pour qu’ils viennent parler d’une doctrine qu’ils ont développée ou pour participer à la réforme d’un système.

LR : Comment cette expérience est-elle venue nourrir et façonner votre vision de la politique canadienne ?

En ayant vu comment se déroule la politique à la Chambre, je comprends les gens qui sont en faveur du Sénat. Les sénateur.rice.s essaient d’être indépendant.e.s et de défendre leurs propres idées. Ils.elles sont élu.e.s jusqu’à 75 ans de concurrence et puisqu’ils.elles n’ont pas à faire campagne, ils.elles peuvent développer une vision long-termiste et effectuer un travail plus approfondi d’analyse quand vient le temps d’étudier des projets de loi.

J’ai aussi l’impression qu’une réforme électorale où l’on voterait pour le.la premier.ère ministre et pour notre député.e de circonscription est nécessaire. Le.la premier.ère ministre pourrait choisir lui.elle-même les député.e.s qui forment son Cabinet. Tous.tes les autres constitueraient une opposition composée de tous les partis politiques. Cela permettrait d’avoir le meilleur des deux mondes, car les ministères seraient composés des meilleur.e.s candidat.e.s, et on pourrait peut-être avoir une politique moins partisane au Canada qui bénéficierait aux Canadien.ne.s.

LR : Que retenez-vous de votre passage à la Chambre des communes et qu’aimeriez-vous transmettre aux étudiant.e.s ?

TDL : Il est important de bien utiliser son droit de vote. Parfois, il est arrivé que des député.e.s aient gagné des élections par quelques votes, mais les choses auraient pu être toutes autres si les gens avaient voté. Même si la démocratie canadienne comporte des défauts, je crois qu’elle offre une stabilité politique qui n’est pas à sous-estimer.

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire