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Sports et bien-être

Éclaircir les nombreux mystères du sommeil

Dawson Couture
17 avril 2021

Crédit visuel : Nisrine Nail – Directrice artistique

Entrevue réalisée par Thelma Grundisch – Cheffe du pupitre Sports & bien-être

Professeur de psychologie depuis près de 50 ans et ancien doyen de la Faculté des études supérieures et postdoctorales à l’Université d’Ottawa, Joseph De Koninck a dédié sa vie à l’étude de la somnolence et des rêves. Ce dernier donne ici ses meilleurs conseils pour mieux dormir et être en bonne santé. 

La Rotonde (LR) : Comment fonctionne le sommeil ?

Joseph De Koninck (JDK) : Le sommeil demeure un mystère quant à pourquoi on doit dormir. Ce qu’on sait, c’est qu’il est essentiel pour la récupération physique et mentale, et que si on en est totalement privé, on meurt. Nous sommes des animaux diurnes, dans le sens que notre activité principale se déroule dans la journée, et notre récupération se fait pendant la nuit. C’est une condition dont on ne peut pas se débarrasser : on a tou.te.s besoin du sommeil.

LR : Quels sont les différents cycles du sommeil, et à quoi servent-ils ?

JDK : On fonctionne avec ce qu’on appelle un cycle de repos-activité de 90 minutes sur les 24 heures [que composent une journée], beaucoup plus visible durant le sommeil. Lorsqu’on s’endort, la première heure et demie est caractérisée principalement par un sommeil lent profond, pendant lequel le cerveau se repose et il y a une restauration des cellules.

Elle est suivie d’un[e phase de] sommeil plus léger, que l’on nomme le sommeil paradoxal. Celui-ci reste un mystère : on est paralysé, et l’activité mentale est très intense. C’est là qu’on s’aperçoit qu’une bonne partie de l’apprentissage s’organise et s’enregistre.

Au bout d’une heure et demie, ça recommence et on a comme ça quatre ou cinq cycles par nuit, où sommeil lent et sommeil paradoxal s’alternent. On se réveille un petit peu à chaque fin de cycle pour changer de position, c’est très important pour assurer la circulation du sang et la qualité du sommeil.

LR : Quelles sont les conséquences de la perte du sommeil ?

JDK : J’ai fait il y a quelques années, un article sur le fait que le sommeil est le dénominateur commun de l’adaptation psychologique, mais aussi de la santé mentale et de la santé physique. Depuis une vingtaine d’années, on se rend compte que de nombreuses maladies sont liées au manque de sommeil.

Toutes sortes de problèmes de croissance sont liés à une perte de sommeil chronique ou partielle, car l’hormone qui en est responsable est sécrétée pendant le sommeil. De plus, il est important pour le système immunitaire. Si on se fait vacciner [par exemple], il est recommandé de se reposer juste après, car c’est pendant le sommeil que les cellules se régénèrent pour nous protéger contre les maladies et les virus.

Enfin, dormir est essentiel pour le système cardiaque, car il permet au corps de se reposer. Le cœur étant en fonction exécutive pendant l’éveil, il faut qu’il soit en fonction récupératrice pendant le sommeil. Donc sans sommeil, tout le système se dérègle. 

Sur le plan psychologique, c’est encore plus catastrophique. Si on n’a pas assez de sommeil, on manque de jugement, on manque de perspective, et on prend de mauvaises décisions. La dépression peut s’installer parce qu’on a une mauvaise perception de la réalité. Pendant le sommeil paradoxal, c’est ce qu’on appelle l’open season for the mind : on peut repenser à n’importe quoi, c’est une sorte de réalité virtuelle, de projection que le cerveau se fait. Si on n’a pas assez de sommeil ou que celui-ci est perturbé, on peut facilement faire des cauchemars ou même souffrir du somnambulisme.

LR : Comment maximiser la qualité de son sommeil et être plus en forme ?

JDK : Il faut d’abord être bien synchronisé, avoir de l’exposition à la lumière régulièrement, et ne pas rester à l’intérieur. L’activité physique est un bon synchroniseur et c’est primordial, tout comme les repas à des heures stables. Il s’agit d’être actif.ve, et de dormir le temps dont on a besoin. Il faut idéalement avoir les mêmes heures de sommeil pendant toute la semaine, ou bien récupérer pendant la fin de semaine afin d’éviter d’être en privation.

Niveau récupération physique, les trois premières heures de sommeil sont essentielles pour survivre […]. Il est recommandé de ne pas s’inquiéter ni d’essayer de régler ses problèmes avant d’aller se coucher, parce que les émotions prédominent alors, et notre cerveau n’est pas capable de gérer ça. Le soir c’est pour la détente et la relaxation. La respiration abdominale est la base de la relaxation pour remettre le système parasympathique et faire baisser la pression artérielle.

Quand on se réveille la nuit il faut attendre, être patient.e, voir lire un peu, tout en faisant attention aux différents types de lumières afin de rester détendu.e. Il faut privilégier les lumières rouges pour rester adapté à la noirceur, et éviter les lumières bleues des écrans qui imitent la lumière du soleil et réveillent.

Si l’on veut maximiser sa mémoire, c’est par le sommeil que celle-ci s’enregistre et devient permanente. Faire des siestes en début d’après-midi est une très bonne chose, de préférence entre une et quatre heure de l’après-midi, mais ça ne doit pas être une sieste de deux heures. Les microsiestes de 15 à 20 min sont excellentes.

Une tasse de café va vous donner à peu près une demi-heure de plus de vigilance, alors que des études montrent qu’une sieste de quinze minutes vous offre deux à trois heures de vigilance en plus. Même cinq minutes de repos auront déjà un effet sur votre concentration et votre système cardiaque. Il est donc très important de faire une sieste juste après avoir appris quelque chose, pour le retenir plus longtemps. 

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