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Arts et culture

Oxygène, une claustrophobie dans un futur pas si lointain 

Dawson Couture
27 novembre 2021

Crédit visuel : Site officiel de Netflix – Courtoisie

Critique rédigée par Dawson Couture – Journaliste

Quoi de neuf dans le septième art pour oublier l’isolement que nous vivons depuis les deux dernières années ? Un film presque entièrement filmé à l’intérieur d’une capsule cryogénique de la taille d’un cercueil, pourquoi pas ! Mais ce film, Oxygène, ne cherche pas à nous ennuyer ; il s’agit plutôt d’un appel à vivre et à se révolter face aux dilemmes existentiels. 

Disponible sur Netflix depuis mai 2021, Oxygène met en scène la formidable actrice et cinéaste, Mélanie Laurent, qui est surtout connue pour ses rôles dans Je vais bien, ne t’en fais pas, Inglourious Basterds, Enemy et Six Underground. Le film se fonde sur une prémisse digne des grandes histoires de science-fiction. 

Prémisse à couper le souffle 

C’est dans une chambre cryogénique médicale hermétique que se réveille le personnage de Laurent, qui n’a plus conscience de qui elle est ou de comment elle s’est retrouvée à cet endroit. L’unité est contrôlée par une intelligence artificielle (IA), la Médicale interface de liaison opérationnelle (MILO). MILO informe la protagoniste qu’en raison d’un problème non spécifié, elle épuise rapidement ses réserves d’oxygène. Afin de survivre, elle se voit obligée d’affronter ses peurs et de se creuser la mémoire, tout en évitant les tentatives de l’IA pour la rendormir. 

Pour ceux et celles inaccoutumé.e.s au genre de la survie en milieu fermé, soyez conscient.e qu’un espace limité ne restreint pas nécessairement l’envergure d’une œuvre. Au contraire, ce genre a permis au réalisateur Alexandre Aja de jouer avec les émotions de la protagoniste. Bien que cette nouvelle approche par Aja ne se démarque pas dans la première moitié du film, les révélations et les moments de tension de la seconde moitié sont efficaces et palpables.

Thématiques grandioses en changement

La performance passionnante de Laurent permet d’explorer des thèmes qui résident au fond de l’expérience humaine moderne. Que signifie être humain ? Comment savons-nous ce qui est réel ? Peut-on se fier à nos sens et nos souvenirs ? En plus d’explorer ces questions, l’intrigue examine la mémoire comme fondement de l’identité ainsi que l’isolement, source à la fois d’anxiété et de méditation.

Plus encore, Oxygène met en évidence les dilemmes scientifiques de notre ère et le fait d’une manière manifestement équilibrée et incertaine. Le film aurait pu se jeter à l’encontre de la trajectoire actuelle des sciences naturelles dans le domaine de l’IA, de l’éthique et de la bureaucratisation, entre autres. Cependant, il semble rester avant tout à l’écart de questions politiques, en dépit du terrain fertile pour la critique.

La cadence de l’œuvre permet toutefois de bien digérer ces divers thèmes au moment où ils surgissent. C’est cela qui rend les 45 dernières minutes si géniales. L’auditoire est confronté à un déluge de révélations stratégiquement espacées pour transformer sa perception de l’état psychologique de la protagoniste, son identité, les solutions possibles et le dénouement du récit.

Tout est dans l’exécution

Oxygène repose entièrement sur le jeu de Laurent qui est, comme toujours, impeccable. Sa façon de communiquer la panique, l’angoisse et l’espoir, tout en démontrant l’évolution psychologique du personnage, est exceptionnelle et émouvante. Il est difficile d’imaginer une autre personne dans ce rôle.

Pour que la prémisse du film tienne la route, il fallait qu’elle soit soutenue par une bonne piste sonore. La trame musicale est à l’image de films de science-fiction atmosphériques tel 2001 : A Space Odyssey et présente une ressemblance frappante à celle de Hereditary. Bien qu’Oxygène ne soit pas effrayant à proprement parler, on peut ressentir l’influence des titres d’horreur du réalisateur. La musique sert ici à extérioriser et à amplifier les sentiments antérieurs de l’héroïne, et à imposer ainsi ce sentiment de crainte sur son public.

Plusieurs plans cinématographiques soulignent davantage la solitude et le désespoir et vont au-delà de ce que l’on pourrait imaginer possible dans cet espace clos. Plutôt que de montrer l’environnement qui entoure sa capsule, un zoom arrière graduel révèle un espace vide infini autour du personnage de Laurent, qui démontre son incertitude quant à ce qui se trouve « là dehors ». Elle pense peut-être pouvoir s’échapper, mais vers quoi s’échappe-t-elle ? Cependant, si ces entreprises créatives sont ambitieuses et bien exécutées, elles souffrent parfois de leur rareté et des effets spéciaux numériques qui n’offrent pas de quoi se vanter.

Pour les films qui tentent de faire plus que de divertir, la question se pose : est-ce qu’ils devraient se fier à ce que leur public reste assez longtemps pour être véritablement engagé dans l’intrigue ? Bien que les recommandations de Netflix ne soient pas toujours fiables, Oxygène vaut la peine d’y consacrer un après-midi tranquille.

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