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« Semer nos âmes et reconquérir nos racines »

Mabinty Toure
21 février 2023

Crédit visuel : Marie-Ève Duguay – Rédactrice en chef 

Chronique rédigée par Mabinty Touré – Journaliste

Dans le cadre du Mois de l’histoire des Noir.e.s, le Comité du sida d’Ottawa (CSO) a invité les femmes noires à participer à son événement Hair, Mind, Body and Soul le 11 février dernier. Cet événement a été conçu pour mettre en lumière les pratiques de soins personnels des femmes noires et discuter de la santé sexuelle.

J’ai été attirée par le thème de l’atelier Soul, « semer nos âmes et reconquérir nos racines », animé par Jodianne Beckford, fondatrice de Noire Girls Plant. L’atelier consistait en une méditation guidée, tout en apprenant à prendre soin des plantes.

Bienfaits d’être en communauté

En tant qu’étudiante internationale qui vit au Canada depuis deux ans, ce n’est pas souvent que je ressens un sentiment d’appartenance. Cependant, arrivée dans les couloirs du Centre Communautaire de la Côte-de-Sable, j’ai été immédiatement accueillie par l’odeur familière du thiep sénégalais et du poulet braisé. 

Les rassemblements communautaires ont rythmé ma vie, plus particulièrement mon enfance. Qu’il s’agisse d’une réunion de famille ou d’une rencontre dans la communauté burundaise, je prends du plaisir à voir les gens se retrouver dans le même espace et se sentir connectés les uns aux autres. Les rassemblements communautaires nous permettent de ressentir de la chaleur humaine, mais surtout, de supporter la santé mentale et le bien-être des personnes à travers la communauté. 

Ancré.e.s dans la terre

Après le repas, les membres du CSO et Beckford ont distribué à chaque participant.e un kit contenant tout le nécessaire pour prendre soin de sa première plante. Cela m’a fait me souvenir que ma connexion avec la nature remonte à bien plus longtemps que cet atelier.

J’ai grandi en voyant ma mère prendre deux à trois heures de son temps, les dimanches matin, pour s’occuper de notre jardin. En y réfléchissant, l’observer mettre du temps à part, malgré son emploi du temps chargé, représente mon premier exemple de self-care. Veiller au bien-être de la flore de notre maison était comme une métaphore de son épanouissement personnel, comme si ses fleurs et ses plantes en bonne santé représentaient son bien-être.

L’animatrice Beckford a également été introduite à cet univers par sa mère, pendant qu’elle traversait une période de dépression. Pour sa mère, c’était une façon de créer des liens avec elle et de lui donner des outils pour se sentir mieux. Comme un legs de techniques de guérison d’une mère, à sa fille, et maintenant, à la communauté.

En plantant nos affirmations dans les nouvelles plantes (à l’aide de papier soluble), Beckford nous a permis de réfléchir à nos aspirations, et surtout à ce qui pourrait aider à notre bien-être. Regarder ces plantes pousser dans le futur sera comme regarder nos affirmations grandir, ou comme un gage de notre amour pour nous-mêmes dans tous les aléas de la vie.

Ce fut agréable de voir chaque participant.e connecter avec les autres autour des plantes et d’observer leur volonté d’apprendre à s’occuper de leur propre personne. En plus des plantes, Beckford avait inclus dans son kit des cartes d’affirmations positives afin d’encourager l’autocompassion. Avoir des plantes dans notre entourage a non seulement des vertus thérapeutiques, mais aide aussi à améliorer notre productivité et notre santé physique.

Santé mentale

Dans les discours de santé mentale, je remarque une très grande emphase sur le fait qu’un individu est responsable de sa propre guérison. Je comprends que l’élan vers la guérison devrait venir de soi, mais je me rends compte que, selon les circonstances, ce n’est pas toujours si simple. Ce type d’ateliers nous donne l’occasion de nous rappeler que nous ne sommes pas seul.e.s. Vous recevez un beau message et vous savez que vous n’avez pas à supporter seul.e le poids de vos problèmes. Le CSO travaille fortement pour transmettre ce message de partage communautaire, surtout pour le bien-être des personnes vivant avec le VIH/sida, affectées par celui-ci, touchées par lui.

Quand on parle de self-care, je pense directement à des actions individuelles : un masque du visage, faire du magasinage, allumer une bougie en prenant un bain, etc. Pourtant, prendre soin de soi comprend également le fait de s’asseoir un samedi soir avec des membres de sa communauté et planter des affirmations dans nos pothos.

À la fin de l’atelier, je pouvais lire la relaxation sur le visage de chacun.e des participant.e.s. Je me suis rendu compte que cette multitude d’inconnus portait chacun leur poids de problème. La gestion de la santé mentale reste un sujet tabou dans la communauté noire. Cependant, le CSO a réussi ce jour-là à ouvrir un espace de guérison pour toutes les générations.

Participer à cet atelier m’a permis de me recentrer dans ma vie. Cet atelier gratuit a largement contribué à ouvrir mon esprit sur les différentes façons de prendre soin de ma personne, des techniques qui peuvent également inclure mon entourage. Aujourd’hui, ma plante est un rappel constant de cet exercice thérapeutique, mais surtout un témoignage de mon épanouissement personnel !

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