La vulnérabilité, une approche radicalement simple à la vie
Crédit visuel : Marie-Ève Duguay – Rédactrice en chef
Chronique rédigée par Dawson Couture – Chef du pupitre Sports et bien-être
Oser être vulnérable, c’est cela le courage. En tant qu’êtres humains, nous partageons un désir d’avoir l’air confiant.e.s et de paraître inébranlables face à l’adversité. La réalité est que cette façade cache souvent une honte profondément ressentie et elle inhibe la formation de relations interpersonnelles significatives. Dans un monde où on se sent de plus en plus isolé.e.s les un.e.s des autres, la vulnérabilité pourrait être la clé pour vivre une vie riche de sens.
C’est du moins la conclusion à laquelle j’ai décidé de souscrire lorsque j’ai pris ma santé mentale en main en 2022. J’avais trouvé un réel confort durant la pandémie à étudier et travailler toute la journée sans pour autant interagir avec personne. Ce que j’ai réalisé avec le temps, par contre, c’est que ce n’était pas une vie qui valait la peine d’être vécue. Avec les restrictions levées, il était temps de poursuivre l’inconfort.
Avoir honte de vivre
Si vous êtes comme moi, la vulnérabilité, si elle méritait même d’être définie, a toujours été synonyme de faiblesse. La distance émotionnelle était pour moi à la fois une façon d’augmenter mon prestige, mais aussi d’éviter d’être mésestimé par les autres. Les performances sociales, la productivité, le perfectionnisme et l’anxiété sont tous des modes de vie que nous avons pris en charge pour éviter d’être vu.e.s pour ce que nous pensons être : imparfait.e, blessé.e et rempli.e de honte.
On peut attribuer à Brené Brown la réhabilitation du terme « vulnérabilité », suite à son TEDTalk de 2010 intitulé « Le pouvoir de la vulnérabilité », maintenant la cinquième vidéo la plus regardée sur le site web. Cette travailleuse sociale et chercheuse à l’Université de Houston s’est spécialisée dans le domaine de la honte. Si la culpabilité peut être résumée avec la phrase « J’ai fait quelque chose de mauvais », la honte est de se dire « Je suis mauvais ». C’est donc une croyance qu’en raison de notre imperfection, nous ne sommes pas dignes d’amour.
La honte est une émotion destructrice fortement liée à l’addiction, la violence, la dépression et les troubles alimentaires. Ce sentiment surgit surtout lorsque l’on éprouve une peur ou un manque de réelle connexion humaine. Dans ses recherches, Brown a découvert que la seule grande différence entre ceux.celles qui ont et qui n’ont pas un fort sentiment d’amour dans leur vie est le fait de penser qu’ils.elles le méritent.
Elle souligne que notre réflexe de paraître invulnérable sape en fait les réponses d’ami.e.s ou autres personnes de notre entourage qui fourniraient une véritable protection émotionnelle. Elle me dirait certainement que le fait de refouler mes sentiments d’insuffisance et de solitude me rend plus insécure et seul. Reconnaître et parler de notre honte est donc notre point de départ pour un amour-propre.
Vivre pleinement
Le fait d’être gentil et inoffensif m’a longtemps servi d’armure contre le risque de confrontation et surtout de trahison. Trahison pour quoi au juste ? Et bien, pour participer de façon authentique à la société, cela demande un acte de foi. Il y a un certain niveau de confiance que l’on octroie aux autres lorsque l’on partage une partie de soi-même. Face à ce constat, nous pouvons soit essayer de contrôler leurs réponses ou accepter que nous n’ayons aucun contrôle.
Pour Brown, la vulnérabilité est donc d’embrasser l’incertitude, le risque et l’exposition émotionnelle. Comme l’a si bien décrit un.e participant.e dans une des études de la chercheuse américaine, « la vulnérabilité, c’est comme être nu sur scène et espérer avoir des applaudissements plutôt que des rires ». En nous montrant comme nous sommes, sans réserve, nous pouvons commencer à nous aimer pour qui on est, ainsi que découvrir l’essence des autres et forger des relations significatives.
Ce risque que l’on prend tous les jours peut paraître anodin. Cependant, dans une société où les besoins physiques sont la priorité, nous oublions souvent que le bien-être émotionnel et spirituel est tout aussi nécessaire à notre survie. Des recherches récentes ont démontré que la douleur émotionnelle peut être tout aussi forte, voire plus, que la douleur physique. Nous devons nous rappeler qu’en tant que créatures sociales, surtout dans un monde globalisé où nous sommes plus vulnérables au rejet, l’acceptation est fondamentale.
Être pleinement impliqué
Il peut paraître étrange dans une chronique sur la vulnérabilité que l’auteur ne rapporte pas beaucoup ses propres expériences. La vulnérabilité, cependant, ne veut pas dire transmettre l’histoire de ta vie à quiconque est prêt à écouter (ou lire)… Au contraire, cela signifie s’ouvrir aux bonnes personnes au bon moment. « Vivre une vie connectée consiste à fixer des limites, à consacrer moins de temps et d’énergie à la conquête de personnes qui ne comptent pas, et à prendre conscience de l’intérêt de cultiver les liens avec la famille et les amis proches », résume Brown.
Tout en fixant ses limites, il faut également apprendre à se valoriser. Cela peut commencer en pratiquant la bienveillance, la pleine conscience et la gratitude (pour ce que l’on a et ce que l’on est). Pour moi, cela signifie apprendre à aimer passer du temps avec moi-même, que ce soit d’aller voir un film ou de lire à un café seul. Toutes ces pratiques me permettent d’apprendre à ressentir mes sentiments et d’y répondre avec compassion. Il suffit ensuite d’avoir quelqu’un à qui confier ses émotions lorsqu’on en reconnaît le besoin.
Si j’ai retenu une chose de cette approche de la vie, toutefois, c’est que pour vivre, il faut prendre des risques ! Même si je suis choyé d’avoir grandi dans un environnement confortable et stable, ce n’est que lorsque j’ai fait face à l’inconfort que j’ai pu atteindre la croissance personnelle. Dans les mots de Brené Brown, si l’on veut participer et s’engager, on ne peut pas critiquer des estrades, il faut « entrer dans l’arène ».