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Sports et bien-être

L’écriture thérapeutique expliquée par Dima Dupéré

Johan Savoy
13 mars 2022

Crédit visuel : Courtoisie – HyggeLab Concept, Unsplash

Entrevue réalisée par Johan Savoy – Chef de pupitre Sports et bien-être

L’Université d’Ottawa ouvrait le 4 mars dernier un groupe bilingue d’écriture thérapeuthique afin d’étoffer sa gamme de services pour le bien-être de ses étudiant.e.s. Si cette pratique demeure moins médiatisée que le yoga ou la méditation, elle procure une certaine paix intérieure, comme l’explique Dima Dupéré, travailleuse sociale et psychothérapeute exerçant à Ottawa.

La Rotonde (LR) : En quoi consiste l’écriture thérapeutique et de quelle façon se réalise-t-elle ?

Dima Dupéré (DD) : Ce qui rend l’écriture thérapeutique, c’est l’interaction qui est faite avec le texte. On relit et on réfléchit sur nos réalisations et nos besoins. On peut se servir de cette pratique pour ventiler ou faire ressortir des émotions. De mon point de vue, je la vois plutôt comme la réalisation d’exercices spécifiques avec une interaction. Cette interaction peut d’ailleurs se faire entre le.la pratiquant.e et un.e thérapeute, mais aussi entre le.la pratiquant.e et lui.elle-même. L’objectif est d’apprendre à mieux se connaître, à mieux identifier ses émotions, à trouver des solutions et à apprendre à développer de la compassion pour soi.

En fonction de la situation vécue, on peut ainsi trouver des exercices qui permettent, par exemple, de faire le tri des émotions, d’identifier les problèmes, de regarder ses propres valeurs ou de changer sa perspective. Si on regarde ce type d’exercice, c’est très semblable à de la thérapie cognitive ou comportementale, où les gens regardent leurs pensées et essayent de trouver une façon de changer leurs émotions et leur comportement face à une situation.

LR : Quel est le rôle du psychothérapeute lors de la pratique ?

DD : Le rôle du psychothérapeute va dépendre de son approche clinique. Avec un groupe, son rôle est minime, il.elle présente l’activité, mène la méditation guidée et organise la discussion à la fin. Toutefois, on ne parle pas ici d’un groupe de thérapie où l’on met l’accent sur la personne qui partage ses expériences et son ressenti. Dans le cadre des ateliers d’écriture thérapeutique, les gens partagent ce qu’ils veulent et peuvent aussi très bien ne rien partager.

Lorsque la pratique est individuelle, la relation avec le.la client.e est déjà construite. Si je le.la connais, je sais comment le.la pousser ou non, dépendamment de ce dont il ou elle a besoin. Les exercices sont donc plus ciblés.

Les psychothérapeutes conseillent souvent à leurs client.e.s de garder un journal, ce à quoi ceux.celles-ci répondent parfois qu’ils.elles ne savent pas quoi écrire. L’écriture thérapeutique, quant à elle, sert à personnaliser la pratique en fonction d’un ressenti spécifique ou d’une situation particulière, comme un deuil par exemple.

LR : Quels sont les bienfaits de cette pratique ?

DD : Des études ont été réalisées aux États-Unis par un psychologue social nommé James Pennbaker, dans le cadre desquelles il a travaillé avec différentes populations pour voir comment l’écriture pouvait aider. Dans une université, il avait ainsi formé deux groupes d’étudiant.e.s dont un auquel il demandait d’écrire chaque jour sur le même sujet pendant 20 minutes. Il est ressorti que le groupe qui écrivait allait moins consulter les services de santé de l’université. Il a ensuite reproduit cette méthode avec d’autres populations, comme les populations carcérales, et toutes sont arrivées aux mêmes conclusions.

De plus, l’écriture thérapeutique permet aux gens qui ont du mal à s’exprimer à l’oral de le faire par écrit. Ces personnes sont d’ailleurs souvent à l’aise en ce qui concerne l’écriture et utilisent beaucoup cette façon de s’exprimer. Je pense ainsi que pratiquer l’écriture permet d’apprivoiser le verbal.

Plus globalement, elle aide à donner un certain sens à la vie, à trouver des patrons de comportements et à analyser des situations en regardant ce à quoi on a déjà fait face dans le passé. L’écriture permet aussi de mieux de se comprendre et représente un lieu où l’on peut évacuer ce qui est difficile. C’est donc un moyen de mieux contrôler ses émotions en devenant le.la témoin de ses propres expériences.

LR : Comment peut-on utiliser l’écriture thérapeutique dans le cadre d’objectifs professionnels ou académiques ?

DD : Il existe certains exercices de base comme la lettre. C’est un exercice qui permet d’écrire des choses qu’on a du mal à exprimer ou encore de trouver sa voix. Il existe également la pratique du dialogue qui permet de reproduire une situation qu’on a tendance à appréhender.

Par exemple, si je suis dans un cours dans lequel je ressens de la gêne à m’exprimer envers mon.ma professeur.e ou à mettre de l’avant mes suggestions, je peux imaginer et écrire un dialogue. Cela peut se faire en utilisant deux couleurs d’encre ou encore mes deux mains, si je me sens à l’aise. J’écris ainsi la question avec ma main dominante, la réponse du.de la professeur.e avec l’autre, et ensuite ma réponse et ainsi de suite. Souvent on se met à écrire et cela vient tout seul, et notamment des choses auxquelles on n’avait pas pensé.

Cet exercice permet ainsi de se préparer et souvent, mes client.e.s me rapportent que lorsqu’ils.elles le pratiquent avant une rencontre redoutée, ils.elles constatent souvent que cela s’est mieux passé qu’imaginé.

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