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Sports et bien-être

Démystifier les croyances : la place des personnes trans dans le sport

Daphnée-Maude Larose
5 décembre 2023

Crédit visuel : Nisrine Abou Abdellah — Directrice Artistique

Article rédigé par Daphnée-Maude Larose — Journaliste

La victoire de Lia Thomas, première nageuse transgenre à remporter un titre universitaire aux États-Unis, ainsi que l’exclusion des personnes trans des compétitions féminines d’athlétisme par World Athletics, font débat. Ces évènements remettent en cause la place des personnes trans dans le sport de haut niveau ainsi que les inégalités qu’elle pourrait engendrer. Les recherches du Centre canadien pour l’éthique dans le sport n’offrent pas encore de conlusions définitives et les informations diffusées par les médias peuvent tromper certain.e.s. 

Une mauvaise représentation par les médias

Selon Sylvain Croteau, directeur général de Sport’Aide, le principal obstacle en ce qui concerne les personnes trans dans le sport est l’ignorance et le biais de certaines informations, tous deux perpétrés par les médias. Une grande majorité des personnes ayant de fortes opinions sur l’inclusivité des sportif.ive.s n’ont jamais discuté avec des individus issus de cette diversité, souligne-t-il.

Croteau est d’avis que le sensationnalisme avec lequel jouent les médias est néfaste. Il explique que ces derniers ne couvrent habituellement que les jugements, les généralités et les exceptions dans le but d’attirer l’attention, notamment dans le cas de Lia Thomas. « Je trouve que ce n’est pas aidant pour le débat », dit-il. Ali Greey, champion.ne canadien.ne en boxe et étudiant.e au doctorat à l’Université Queen’s, ajoute que les journaux traitent uniquement les victoires des personnes trans et non de leurs défaites, contribuant à l’idée qu’elles seraient plus performantes.

Le directeur général affirme qu’il aimerait que les médias fassent la vraie part des choses. Il y a quelques semaines, une athlète québécoise a refusé de faire la compétition contre une femme trans. Croteau insiste sur l’importance de définir ce qu’est une femme trans. Il explique que lorsqu’un individu vient tout juste d’annoncer sa transition, utiliser ce terme est justifiée puisqu’il y a un enjeu d’intégrité et de sécurité pour la personne concernée. En revanche, s’il s’agit d’une personne dont la transition est complétée et assumée, alors il est simplement question d’une femme, énonce-t-il. Croteau précise qu’il n’est alors plus nécessaire de faire référence à elle en tant que femme trans.

De fausses croyances

Greey souligne qu’environ 1 % de la population est trans aux États-Unis, dont près de la moitié d’entre eux.elles sont des femmes trans. Si celles-ci participaient aux compétitions aux mêmes taux que les autres femmes dans le National Collegiate Athletic Association (NCAA), elles seraient presque 1000 à participer, poursuit-iel. Cependant, iel observe que cela n’est pas le cas, seules quelques-unes participent aux compétitions. Ces sportives sont grandement sous-représentées dans leur domaine.

La.le doctorant.e poursuit avec le sujet de la testostérone, un argument souvent utilisé pour discréditer la place des femmes trans dans le sport. Iel explique que jauger cette hormone est très difficile, les scientifiques ne savent souvent pas comment la mesurer ou évaluer la quantité présente dans un corps.

Il y a aussi cette idée selon laquelle la testostérone améliorerait considérablement les performances sportives, mais selon Greey, ce n’est pas prouvé. Iel énonce qu’il n’y a pas d’étude qui affirme la présence d’un lien clair entre une meilleure réussite et un taux élevé de cette hormone. Au contraire, iel révèle que « certaines analyses estiment qu’une haute présence de testostérone pourrait, en fait, avoir un impact négatif sur une performance ». Le.la champion.ne croit que c’est une substance très complexe et qu’ainsi, on ne peut pas se baser sur celle-ci pour inclure ou exclure des sportif.ive.s.

« Beaucoup de gens pensent que les personnes trans font des choix de vie pour se donner un avantage dans un cadre de compétition, alors que c’est tellement faux », soutient Croteau. Il développe que ces individus existent en dehors de leur pratique sportive. Le directeur général rappelle qu’« ils ont des ami.e.s, des études, une famille, etc. ».

La problématique des vestiaires

« Les gens, et cela inclut les médias, voudraient qu’on ait une solution parce qu’on est exposé à quelque chose de nouveau, de déstabilisant, mais [cela] prend du changement et de l’adaptation », affirme-t-il. Les attentes sont irréalisables, puisque le public souhaite avoir une réponse qui rend tout le monde heureux, continue Croteau.

En patientant pour l’arrivée d’une solution « miracle », s’il y en a une, les organisations sportives et les centres sportifs devraient se concentrer sur le bien-être des athlètes trans en les accommodant dans les vestiaires, recommande le guide d’Éducation physique et Santé Canada. Ces lieux peuvent les mettre dans des situations très inconfortables où ils.elles ne se sentent pas en sécurité, selon Greey.

Créer un troisième espace inclusif et universel est un bon moyen de les épauler, soutient-iel. Cependant, celui-ci ne doit pas se retrouver à être un endroit exclusif aux diversités : ce serait discriminatoire et problématique, précise-t-iel. « Ce troisième vestiaire ne doit pas devenir l’espace pour les autres genres », explique-t-iel, mais un espace ouvert, fréquenté par tous ceux.celles qui le souhaitent.

Croteau croit qu’il est important d’être inclusif.ive et compréhensif.ive à l’égard de cette diversité. C’est notamment ce qu’il tente d’effectuer avec son organisation Sport’Aide, qui consiste à prévenir les violences et le harcèlement envers les minorités de genres dans un contexte sportif.

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