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Arts et culture

Entrevue avec Soukaina Boutiyeb, « championne de la communauté francophone »

Jacob Hotte
7 juin 2023

Crédit visuel : 

Entrevue rédigée par Jacob Hotte – Journaliste

Soukaina Boutiyeb, ancienne pupille de l’Université d’Ottawa (U d’O) et militante pour les droits des femmes et la conservation de la francophonie, a récemment été nommée « championne de la communauté francophone » par l’U d’O. À cet effet, La Rotonde s’est entretenue avec elle afin de mieux définir son rôle et son militantisme en ce qui concerne la promotion de la langue et de la culture francophone en Ontario.

La Rotonde (LR) : Vous n’êtes pas originaire du Canada. Qu’est-ce qui vous a motivé à vouloir militer pour la préservation de la francophonie au Canada ?

Soukaina Boutiyeb (SB) : J’ai fait une partie de mes études secondaires, ainsi que l’entièreté de mes études postsecondaires en français, à Ottawa. Pendant mon parcours, j’ai été capable de découvrir une communauté combattante et riche, dotée d’une grande histoire, ce qui m’a poussé à vouloir y contribuer. Par mon travail, je tente de faire rayonner la réalité et les nouveaux visages de cette francophonie. Je veux aussi faire ma part concernant l’accessibilité des services en français pour tou.te.s, mais plus spécifiquement pour les femmes et les communautés immigrantes.

LR : Comment décririez-vous votre identité en tant que francophone vivant au Canada ?

SB : Je vois mon identité comme quelque chose de dynamique, qui évolue avec mon cheminement. En tant que francophone au Canada, notre communauté est protégée par la Loi sur les langues officielles. De même, c’est avoir œuvré au sein de la communauté francophone, mais aussi mon implication par rapport aux injustices linguistiques vécues par la communauté, qui ont contribué à mon identité franco-ontarienne. Aujourd’hui, je me considère comme Franco-Ontarienne, mais je ne sais pas quand j’ai réellement commencé à m’identifier en tant que Franco-Ontarienne. Même si ce n’est pas toute la population qui me voit ainsi, une identité est propre à soi et lorsqu’on contribue à une communauté, à mon avis, on a le droit d’y appartenir.

LR : Les identités franco-ontariennes et franco-canadiennes sont souvent assimilées à une forme de blanchité. Comment est-ce que vous interagissez avec cela et comment faites-vous pour tenter de promouvoir une plus grande diversité dans ces identités ?

SB : Mon travail à l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC) m’a donné l’opportunité de d’être témoin de la francophonie présente dans les quatre coins du pays, et je suis très privilégiée d’être capable de le faire. Par cela, j’ai aussi été capable de voir la fierté dans ses accents et sa pluralité culturelle.

Toutefois, on peut avoir l’impression que le leadership au sein de la francophonie canadienne est souvent réservé à certaines catégories de personnes. Le leadership peut être « très blanc », mais aussi « très homme » et destiné seulement à un certain groupe d’âge.

Je tente toujours d’y œuvrer avec authenticité, ce qui est important. Il faut être certain.e.s de ce que nous voulons accomplir en tant qu’individus, ainsi qu’être en pleine conscience de notre démarche. Il faut être à l’aise avec celle-ci, étant donné qu’elle sera remise en question. Il est donc nécessaire d’avoir une bonne colonne et de faire sa place, mais de le faire avec respect. Cela peut aussi être très fatiguant, étant donné que l’on peut être considéré.e comme le token qu’on utilise afin de cocher plusieurs cases.

LR : Pour tenter d’éclairer un peu votre rôle, comment expliquez-vous votre travail au sein des multiples organisations francophones ? Que cherchez-vous à accomplir ?

SB : J’aime beaucoup m’impliquer bénévolement. Je siège sur plusieurs conseils d’administration et je suis bénévole pour plusieurs organisations qui se concentrent sur la francophonie au niveau postsecondaire, l’accessibilité des services pour les personnes immigrantes ou en situation d’itinérance, etc.

Toutefois, mon emploi de tous les jours est celui de la direction générale de l’AFFC. Je cherche à faire ma part, à faire voir la pluralité de la francophonie, sur tous les niveaux, et à faire connaître la fierté de notre communauté le plus possible.

LR : Pour ceux et celles qui tentent de s’impliquer dans un tel militantisme, que leur suggérez-vous ?

SB : En général, je crois qu’on peut commencer le militantisme n’importe quand. On n’a pas besoin d’attendre pour débuter. J’invite les gens à foncer vers l’avant, parce qu’on a besoin de plus de personnes impliquées dans le dossier. L’accessibilité des services en français peut être un domaine très vaste, donc on a besoin du plus grand nombre de personnes possible afin de permettre à la communauté de rayonner.

Néanmoins, il est aussi important d’être conscient.e.s de nos privilèges et de nos défis. Par nos privilèges, on a la capacité de faire un grand changement, et en connaissant nos défis, on peut se préparer aux obstacles qu’on pourrait rencontrer.

Puis, j’encouragerais ceux.celles intéressé.e.s à ne pas hésiter à se connecter et à contacter les militant.e.s déjà présent.e.s dans le domaine. La communauté francophone est très connectée et c’est souvent ça qui fait notre force.

Finalement, je crois qu’il est important d’approcher notre travail avec légèreté. Malgré tous les défis, on réussit toujours à trouver une source de sourires et d’humour, ce qui nous permet de pousser encore plus loin dans notre cause.

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