Crédit visuel : Retranscription en directe de la cérémonie de l’École de gestion Telfer – Université d’Ottawa, YouTube
Article rédigé par Hai Huong Lê Vu — Journaliste
Les cérémonies de la collation des grades de l’Université d’Ottawa (U d’O) ont eu lieu du 6 au 9 juin au Centre Shaw. Cet événement a rendu hommage aux finissant.e.s qui ont travaillé dur pendant leurs études, mais a aussi fait ressortir les frustrations de certain.e.s étudiant.e.s.
Une cérémonie de grande importance…
Meet Mehta est un finissant en informatique qui a obtenu son diplôme le samedi 8 juin. Selon lui, la cérémonie de remise des diplômes a constitué une étape importante dans sa carrière. Il précise toutefois que cette cérémonie n’a pas été pour lui un événement tant « crucial ».
Aux yeux d’une finissante en histoire qui souhaite rester anonyme, la collation des grades a été une occasion « importante ». « Cette cérémonie représente la fin d’un chapitre de ma vie », affirme-t-elle. Elle ajoute que cette remise des diplômes a été l’occasion pour elle de faire le bilan de ses années passées à l’Université.
La finissante anonyme regrette n’avoir jamais eu l’occasion de participer avant à un bal des finissant.e.s ou à une cérémonie de graduation, ayant terminé son secondaire en plein milieu de la pandémie de COVID-19 ». Aucune célébration ne l’a ainsi aidé à franchir cette étape vers la vie universitaire. Elle se réjouit donc d’enfin participer à une cérémonie de graduation.
… à but lucratif ?
Chaque finissant.e des Facultés d’éducation, des sciences sociales, de génie, des sciences, de gestion et des arts a le droit à deux billets pour ses invité.e.s, tandis que les finissant.e.s d’autres facultés ont davantage de billets, comme en sciences de la santé (quatre) et en droit (trois). Des billets supplémentaires sont également offerts 90 minutes avant la cérémonie, sur la base du premier.e arrivé.e, premier.e servi.e. La finissante en histoire regrette ce choix : « J’aurais préféré avoir accès à des billets additionnels par un mode différent de celui appliqué actuellement par l’Université ».
Elle insiste également sur la nécessité d’attribuer des places assises pour les détenteur.ice.s de billets. D’après elle, cette mesure réduirait le stress vécu par les invité.e.s. En effet, actuellement, elle explique qu’il a fallu que ses invité.e.s arrivent tôt pour obtenir leur place de choix.
Quant au diplômé en informatique, il trouve que la location obligatoire de la toge est « inacceptable ». Les finissant.e.s doivent en effet payer au minimum 60 dollars plus taxes pour porter la toge pendant moins de quatre heures, dénonce-t-il. Le prix peut s’élever à 85 dollars si l’étudiant.e loue la toge le jour de la cérémonie.
Mehta raconte qu’il n’a pas eu à louer une toge lors de la collation des grades de son ancien collège, le Sheridan College. Il en déduit que « la cérémonie [de l’U d’O] devrait être gratuite ». Selon lui, une manière de négocier avec un.e tiers fournisseur.se de toges pourrait être de lui donner l’exclusivité des droits photographiques ou de l’inclure parmi les sponsors.
Une tribune pour la jeunesse
La collation des grades a été marquée par l’esprit des jeunes de l’U d’O, qui a exhorté son administration à désinvestir de l’occupation israélienne. De nombreux.ses étudiant.e.s ont porté des keffieh, foulards palestiniens, et ont affiché des drapeaux aux couleurs de la Palestine. Plusieurs ont également interrompu des cérémonies en scandant « Free Palestine », manifestant leur insatisfaction quant aux investissements de leur université.
Mohamed Aboudhal, major de promotion de la Faculté des sciences de la santé, a appelé l’audience à soutenir le peuple palestinien dans son discours : « Je tiens à remercier l’U d’O […] [qui] dit que “les occupations ne sont pas tolérées” ; et je dis amen à cela ! Vive Turtle Island ! Vive la Palestine libre ! ». Il faisait ici référence à la déclaration du 28 avril dernier de l’administration uottavienne, soulignant que les « occupations [des lieux universitaires] ne sont pas tolérées ».
Que la justice ne soit plus un rêve, mais une réalité, c’est également ce que souhaite Mame Fatou Ndiaye, majore de promotion de la Faculté des sciences sociales. Dans son discours, elle a souligné l’importance de réagir lorsqu’une injustice survient et d’opter pour la vérité, que ce soit au sujet des génocides en Palestine et en République Démocratique du Congo, de la crise au Soudan ou de l’esclavage des Ouïghour.e.s. L’Université a depuis supprimé les vidéos des cérémonies, habituellement disponibles en rediffusion sur YouTube.
En entrevue avec La Rotonde, Ndiaye a admis avoir été stressée avant son discours parce qu’elle savait que celui-ci ne plairait pas à tout le monde. Elle explique que lorsqu’elle rédigeait son discours, elle s’inquiétait déjà des conséquences négatives potentielles sur ses études et sa carrière. La finissante affirme néanmoins que le soutien qu’elle a reçu de la part de ses camarades de classe et de ses professeur.e.s présent.e.s lui a redonné confiance.
En réponse aux mécontentements des manifestant.e.s, Jacques Frémont, recteur et vice-chancelier de l’U d’O, a affirmé lors de la collation des grades de la Faculté de génie : « Nous croyons fermement à la liberté d’expression dans notre université, mais nous croyons aussi au respect de vos collègues qui méritent un bon après-midi. » Il a confirmé ensuite que le message des protestataires avait été entendu.