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Coupes budgétaires : une inquiétude ressentie sur le campus

Nisrine Nail
2 novembre 2023

Crédit visuel : Nisrine Abou Abdellah — Direction artistique

Article rédigé par Nisrine Nail — Cheffe du pupitre Actualités

Le mois de septembre dernier, une manifestation contre les coupes budgétaires à l’Université d’Ottawa (U d’O) s’est tenue au pavillon Tabaret. Celle-ci a été organisée par le Syndicat des étudiant.e.s employé.e.s de l’U d’O (SCFP 2626) dans le but de dénoncer le livre du budget de l’U d’O pour l’année 2023-2024. Quelle est la source de ces coupes, et quelles sont les répercussions selon les associations sur le campus ?

Entre surplus et déficit : les transferts interfonds

À la suite d’une analyse du livre du budget 2023-2024, le SCFP 2626 affirme que le déficit de l’U d’O est « inventé ». Catherine Larocque, présidente du Syndicat, remarque que l’Université déclare un déficit dans le fonds de fonctionnement de son budget de l’année 2023-2024, alors qu’ « il y a actuellement un surplus » et que « celui-ci a été transféré vers d’autres fonds ». Elle explique qu’en prenant compte de ces transferts, l’U d’O est en déficit, alors que ce n’est plus le cas si on les retire du calcul. Larocque présente les chiffres : « L’administration a transféré 38,8 millions de dollars du fonds de fonctionnement vers d’autres fonds, comme le fonds “projets en capital”, pour ensuite annoncer qu’ils ont un déficit de 10,6 millions. En réalité, le solde du budget avant les transferts interfonds a un surplus de 28,2 millions. »

Maisy Elspeth, commissaire à la revendication au Syndicat étudiant de l’U d’O (SÉUO), partage sa confusion au niveau des transferts interfonds. « J’ai beaucoup de questions à propos des fonds transférés. C’est bizarre qu’il n’y ait pas plus de détails », exprime-t-elle.

Luc Angers, vice-président de l’Association des professeur.e.s à temps partiel à l’U d’O (APTPUO), dénonce les coupes budgétaires de l’Université causées par le déficit déclaré. « Du côté professoral et du côté étudiant, on n’arrive pas à cerner pourquoi l’Université coupe dans les salles de classe, les départements, les facultés, les services et le personnel sans explication », proteste-t-il.

Baisse de services, baisse de qualité

La présidente du SCFP 2626 signale que l’U d’O a coupé de 5 % les budgets de toutes les facultés l’année dernière, et encore une fois cette année. « C’est choquant. On commence à perdre des programmes dans les facultés, comme le programme de traduction et d’interprétation. C’est alors ironique de se vanter d’être une université bilingue », commente Larocque.

Larocque ajoute qu’il y a un « manque » de remplacement des professeur.e.s partant à la retraite. Angers avise que l’APTPUO regroupe 2 500 membres qui donnent 60 % des cours dans diverses facultés. Certaines classes regroupent plus d’une centaine d’étudiant.e.s., et ce, sans assistanat. « On a de la misère à avoir des assistant.e.s. C’est une lutte avec l’administration pour que les membres obtiennent de l’aide », témoigne le vice-président. Elspeth fait aussi part de l’inquiétude des étudiant.e.s envers le manque d’offre de ce type de postes. Angers atteste que le nombre d’étudiant.e.s augmente, mais qu’il n’y a pas de soutien dans les classes pour répondre à cette hausse. « Ceux.celles qui participent à nos cours ne peuvent pas bénéficier d’une éducation de qualité si les problèmes sont si criants », juge Angers.

Le vice-président de l’APTPUO énonce un exemple de coupe dans sa faculté, la Faculté d’éducation. Il dévoile que l’U d’O a retiré comme ressource une technopédagogue dont le rôle était de soutenir les professeur.e.s lorsqu’ils.elles éprouvaient des soucis sur la plateforme Brightspace ou lorsqu’ils.elles voulaient améliorer la qualité de leur contenu académique en ligne.

Larocque rappelle que l’Université a coupé les bourses de 40%, incluant les bourses d’exonération partielle des étudiant.e.s francophones internationaux.les, et a éliminé complètement les bourses au mérite. Selon la présidente, l’U d’O met l’accent sur leur accueil, mais ne les soutient pas. Elle détaille que des services employés par ces dernier.ère.s, tels que le CARTU, ont subi des réductions budgétaires. « Les étudiant.e.s internationaux.les représentent un tiers, parfois la moitié, de certaines cohortes que j’enseigne. Ils.elles ont payé des sommes astronomiques pour étudier ici », reconnaît Angers.

Communication avec l’U d’O

Pour ce qui en est des communications entre l’Université et la coalition intersyndicale au sujet des coupes, Angers confie qu’il a l’impression « qu’on [les syndicats] les dérange ». Le vice-président de l’APTPUO souhaite résoudre ces enjeux « de manière conjointe » et éviter des griefs « puisqu’ils coûteraient plus cher à l’U d’O ».

De son côté, la présidente du SCFP 2626 convient que l’Université a « un problème de priorité et de présentation de l’information ». Elle précise qu’une lettre ouverte a été envoyée par la coalition intersyndicale, incluant une liste de revendications, à l’administration l’U d’O dans le but « d’améliorer les conditions des travailleur.euse.s et la qualité de l’éducation ».

Elspeth avoue que les réponses de l’U d’O sont « évasives ». Néanmoins, elle nuance que les dépenses pour l’éducation postsecondaire en Ontario sont « les plus faibles comparées aux autres provinces ». À son avis, les coupures mises en œuvre par le provincial influencent celles de l’Université. C’est pourquoi elle suggère plus de transparence au niveau de leur lobbying au gouvernement provincial. « On pourrait collaborer à ce niveau-là pour assurer une bonne éducation », estime la commissaire à la revendication.

La Rotonde a communiqué avec l’équipe médias et a reçu cette déclaration de la part de Jesse Robichaud, porte-parole de l’U d’O :

« Comme vous avez pu le constater, l’Université d’Ottawa partage ouvertement ses informations financières et budgétaires de manière transparente sur son site web et dans d’autres forums interactifs. Voici les états financiers consolidés du 30 avril 2023 vérifiés par KPMG, comptables professionnels agréés, la revue des résultats financiers 2022-2023 et le Livre du budget 2023-2024.

Nous ne sommes pas du tout d’accord avec les déclarations du SCFP 2626. Nous continuons à prioriser des expériences étudiantes enrichissantes à l’Université d’Ottawa. Des mesures responsables ont été prises pour nous assurer que nous puissions continuer à investir dans les programmes d’études et la recherche.

Il est important de noter que nous sommes présentement en négociation de renouvellement de la convention collective entre l’Université et le SCFP 2626 et ce travail important se poursuit en toute bonne foi. »

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