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Éditorial

Droits des femmes : un pas en avant, deux pas en arrière 

Rédaction
6 mars 2023

Crédit visuel : Archives

Éditorial rédigé par le comité éditorial de La Rotonde

Mercredi prochain, le 8 mars, marquera la Journée internationale des droits des femmes. Nos réseaux sociaux seront bombardés de publications inspirantes sur les femmes d’aujourd’hui. Nous verrons partout des messages d’appréciation sur les avancées qui ont été faites vis-à-vis des mouvements féministes. Nous, à La Rotonde, allons plutôt nous poser la question : qu’avons-nous réellement à célébrer ? 

Vous nous excuserez pour notre pessimisme flagrant, mais il est difficile pour nous de célébrer les droits des femmes si ceux-ci ne se font toujours pas respecter. Nous pouvons aujourd’hui observer la preuve concrète que les droits des femmes ne tiennent qu’à un fil. Ainsi, cette année, nous profitons de la Journée internationale des droits des femmes pour montrer à quel point les droits des femmes sont en train de régresser, plutôt qu’avancer.

Montée de la misogynie

Vous vous direz peut-être que nous exagérons, que la situation n’est pas aussi grave que nous la faisons paraître. Il suffit pourtant de ne passer que quelques minutes sur Internet pour le constater. 

Partout sur le Web, nous sommes les témoins d’une montée des discours misogynes. Les « symboles » misogynes, comme le masculiniste Andrew Tate, utilisent leurs plateformes pour partager leurs croyances dangereuses quant aux femmes. Tate a d’ailleurs partagé plusieurs fois qu’il croit que les femmes appartiennent aux hommes, qu’elles sont de bons moyens pour se faire de l’argent. Nous remarquons également une hausse des commentaires haineux en ligne – comme le montre si bien le compte Twitter de J. K. Rowling – envers les femmes transgenres  ;  bref, des commentaires qui traduisent la croyance que toutes les femmes ne méritent pas les droits qu’elles ont si difficilement acquis.

Ce genre de misogynie, qui joue un rôle énorme dans la banalisation des propos haineux contre les minorités, ne se limite malheureusement pas au monde virtuel. Nous n’avons pas à regarder loin pour l’observer : les professeures dans le monde académique doivent par exemple faire plus d’efforts pour se faire reconnaître dans le milieu et pour se faire respecter par leurs étudiant.e.s.

Nous entrons, en 2023, dans une nouvelle ère de backlash – nous faisons ici référence à la théorie développée par Susan Faludi – avec la montée du conservatisme. Le progrès que nous avons fait depuis le début du 21e siècle en termes de droits des femmes est donc remis en question, tout comme les lois que nous avons auparavant considérées comme acquises.

Chaque femme compte-t-elle vraiment ? 

Dans le cadre de la Journée internationale des droits des femmes de cette année, le gouvernement fédéral du Canada a adopté le thème « chaque femme compte ». Ce thème est un peu ironique, considérant tous les événements qui démontrent que chaque femme ne compte effectivement pas.

Prenons par exemple le cas de toutes les femmes autochtones disparues ou tuées depuis les dernières années. Celles-ci sont disproportionnellement victimes de crimes au Canada par rapport au reste de la population. Elles sont beaucoup plus susceptibles de vivre des conditions d’itinérance, et sont encore plus sensibles à l’épidémie de surdosage au pays. Le gouvernement ne semble rien faire pour leur venir en aide. Pouvons-nous alors réellement célébrer leurs droits ?

La pandémie a elle aussi contribué au recul en matière des droits des femmes. Les violences sexuelles et les féminicides qui en ont découlé ont eu de graves conséquences sur ces avancements. Ce n’est pourtant pas un phénomène qui ne se retrouve qu’au pays : le recul en matière des droits des femmes est global.

Allons voir nos voisins du Sud, qui en juin dernier, ont invalidé le droit constitutionnel à l’avortement en annulant l’arrêt Roe v. Wade, en vigueur depuis 1973. Ce changement s’avère dangereux pour toutes les femmes, mais surtout celles qui sont en situation précaire, et touche ainsi particulièrement les minorités. 

Que dire des femmes musulmanes, qui sont continuellement victimes du patriarcat et de l’islamophobie, au pays comme ailleurs ? Forcer les femmes à enlever leur voile, comme le font la France et le Québec, est tout autant une violence que les forcer à le porter, comme en Iran et en Arabie Saoudite, par exemple.

Oser rêver ?

Il est décourageant de faire face à tout cela. Nous en convenons. Certes, il est important de mentionner ces reculs, non pas comme excuse pour se plaindre, mais plutôt pour inciter les gens à rester vigilants. C’est Simone de Beauvoir qui a affirmé sagement : « N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant. »

Les grandes féministes de l’histoire seraient sans doute déçues de constater l’état des choses. Elles nous inciteraient pourtant à ne jamais baisser les bras, et à continuer à nous battre pour les droits fondamentaux des femmes d’ici et d’ailleurs.Le 8 mars prochain, nous ne célébrerons donc pas. En commençant par cet éditorial, nous, à La Rotonde, allons plutôt nous servir de cette journée internationale pour informer les gens sur les injustices et les obstacles auxquels se heurtent les femmes.

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