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« Face au pouvoir » : plainte déposée contre les services policiers d’Ottawa

Nisrine Nail
18 septembre 2023

Crédit visuel : Nartistic — Directrice Artistique

Article rédigé par Nisrine Nail — Cheffe du pupitre Actualités

Le 11 septembre dernier, une conférence de presse s’est tenue au pavillon Fauteux à l’Université d’Ottawa (U d’O). La discussion portait sur le racisme et la brutalité policière, ainsi que l’action juridique qu’entreprend une coalition de groupes communautaires et d’individus contre la Commission des services policiers d’Ottawa (CSPO). Cette coalition poursuit la CSPO au Palais de justice d’Ottawa pour violation de leur droit à la liberté d’expression, garanti par la Charte canadienne des droits et libertés. 

La conférence a débuté avec Jeffrey Bradley, étudiant au doctorat en droit à l’Université Carleton et plaignant, qui a reconnu le territoire autochtone non cédé. Il a notifié l’absence d’Atiya Husain, professeure en droit à Carleton, et s’est présenté pour la remplacer. Helyeh Doutaghi, coordinatrice du Groupe de recherche d’intérêt public de l’Ontario (GRIPO) de Carleton et modératrice de l’événement, a ensuite pris la parole. Elle a ainsi présenté les panélistes : Yavar Hameed, avocat représentant la coalition contre la CSPO, Robin Browne, coordinateur du 613-819 Hub Noir et plaignant, et enfin Sam Hersh, organisateur politique et communautaire et plaignant.

Plaignant.e.s, mais pourquoi ?

Selon la plainte officielle, la CSPO aurait imposé plusieurs restrictions sur les plaignant.e.s. Hameed a donné comme premier exemple le manque d’accessibilité aux réunions de la Commission. Selon lui, la Commission a refusé d’autoriser les délégations publiques virtuelles après avoir repris les réunions en personne en mars 2022, à la suite de l’assouplissement des restrictions imposées par la COVID-19.

L’avocat a aussi protesté contre l’obligation au public de soumettre leurs commentaires à l’avance pour être approuvés par la Commission. « C’est de la censure », a-t-il soutenu. Hameed a insisté que cela risquait de diminuer les possibilités afin de dénoncer la brutalité policière.

Ce dernier a rappelé que cette plainte est une action juridique communautaire. La coalition des plaignant.e.s consiste des groupes et des individus suivants : le GRIPO de l’U d’O, le GRIPO de Carleton, le Criminalization and Punishment Education project (CPEP), l’Association des Leaders Étudiants Noirs (ALÉN) à l’U d’O, le 613-819 Hub Noir, Robin Browne, Joseph Eastham et Sam Hersh.

Pour eux.elles, cette action est une occasion de discuter des abus commis par la police d’Ottawa. Hameed est d’avis que le pouvoir de la police est présentement « normalisé ». L’avocat a déclaré qu’« il est attendu que les policiers emploient de la violence pour ordonner le respect ». Selon lui et les divers.e.s membres de la coalition, une des manières de s’opposer à cette normalisation est de l’aborder en justice.

Étant tou.te.s concernés par les conséquences des restrictions imposées par la CSPO, ils.elles ont décidé de s’unir afin d’alléger les coûts. « Les mécanismes juridiques peuvent être complexes, et même inaccessibles », a ajouté Hameed. C’est d’ailleurs pourquoi les plaignant.e.s poursuivent la CSPO au Palais de justice d’Ottawa plutôt qu’à la Cour suprême du Canada.

Plus personnel qu’on ne le pense ?

Browne a énuméré certains événements marquants qui ont mené à la formulation des restrictions des délégations publiques. Le premier a eu lieu en novembre 2020, lorsque plus de 100 personnes se sont présentées à la CSPO avec l’intention de contester les augmentations au budget des services de police. Le second événement est celui du Convoi de la liberté en février 2022.

« Les restrictions semblent me viser particulièrement », a affirmé Browne. Le Hub Noir est une organisation visant à défendre les personnes noires dans la région d’Ottawa-Gatineau en plaidant des changements systémiques au sein de diverses institutions telles que la justice et l’éducation. Selon le plaignant, c’est pour cette raison qu’il se présente et prend régulièrement la parole aux délégations de la CSPO.

Pourtant, les nouvelles restrictions ne lui permettent plus de se manifester durant les réunions, suggère-t-il. Il explique d’abord que la priorité est donnée aux personnes qui ne se sont pas exprimées au cours des trois derniers mois. Browne poursuit qu’il n’est pas admissible à un remplacement. Le panéliste a ajouté qu’une proposition l’empêchant de prendre la parole, lancée par la présidente de la Commission, a été votée à l’unanimité en juin 2022. La raison aurait été que ce dernier « décrit la CSPO de manière inappropriée ».

En novembre 2022, le coordinateur du Hub Noir a appris qu’il serait banni de l’Hôtel de Ville d’Ottawa jusqu’en mars 2024. Après avoir revendiqué une révision de cette décision, en indiquant que cette exclusion avait affecté ses droits constitutionnels, la CSPO lui a permis de retourner sur les lieux, à l’exception de la salle du Conseil municipal. Browne conclut qu’il doute que cela ne soit une coïncidence.

À quoi s’attendre ?

Hersh a assuré que cette action juridique est un dernier recours. Le plaignant s’est alors demandé si d’autres commissions de services policiers au Canada étaient aussi « sévères » que celles d’Ottawa. Hameed s’attend à ce que la CSPO se défende sous prétexte que ce sont des mesures et des restrictions raisonnables. L’avocat est incertain du résultat, mais il soupçonne que la CSPO n’admettra pas d’avoir enfreint à la Charte canadienne des droits et libertés.

La conférence se termine avec l’annonce que d’autres panels auront lieu sur le sujet. Il est possible de rester au courant des mises à jour du procès en ligne ou via les réseaux sociaux des plaignant.e.s.

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