Crédit visuel : Nicholas Monette – Directeur artistique

Chronique rédigée par Jacob Hotte – Journaliste

Jordan Peterson, auteur, psychologue et sectaire à temps plein, rend visite aux Ottavien.ne.s le 31 janvier 2023. Sa venue souligne le début de la tournée nord-américaine de son livre, Beyond Order : 12 more rules for life. Comme toute bonne personnalité controversée, son excursion attire beaucoup de critiques des résident.e.s de la capitale canadienne. Plus de 30 organismes ottaviens ont signé une lettre ouverte envoyée au Canadian Tire Centre, l’hôte de l’événement, afin de dénoncer l’organisation d’une telle conférence.

Peterson a beaucoup choqué au cours des dernières années par sa rhétorique discriminatoire. Ce dernier a été accusé à plusieurs reprises d’avoir proféré des discours transphobes, grossophobes, misogynes, racistes, etc. Un phénomène qui ne semble guère le soucier, bien que cela puisse lui coûter potentiellement sa carrière professionnelle et donc, son titre de psychologue.

« Homard » pas comme les autres

Peterson commence sa carrière d’influenceur en automne 2016, avec sa critique du projet de loi C-16. La loi avait été proposée afin d’interdire la discrimination basée sur l’identité de genre. Peterson, ne voulant pas proprement genrer ses étudiant.e.s, avait décrit le projet de loi comme une « attaque contre sa liberté d’expression ». Ce que plusieurs expert.e.s en droit canadien ont contredit en déclarant que cela serait le cas seulement s’il portait une attaque directe sur un groupe en particulier, comme une menace de mort.

Sa chaîne YouTube se popularise rapidement après l’incident, ses commentaires et critiques de divers sujets comme le privilège blanc et le marxisme viendront bâtir son public, dominé politiquement par la droite. Après plusieurs années, l’Ordre des psychologues de l’Ontario (CPO) l’oblige finalement à s’inscrire à une formation en matière de communication sur les réseaux sociaux, ce qu’il finit par refuser. En conséquence, le psychologue devra se rendre au tribunal, avec le risque que le CPO choisisse de révoquer son droit de pratiquer.

Ce n’était pas le dernier coup de Peterson, qui se fait ensuite suspendre son compte Twitter après avoir attaqué Elliott Page suite à sa transition. Un compte qui ne sera restauré que lors de l’acquisition du réseau social par Elon Musk. Il faut croire que le psychologue manque d’éclaircissement en ce qui concerne la liberté d’expression. La recommandation faite par le CPO n’est donc pas forcément une mauvaise idée pour encadrer ce dernier.

Priorité axée sur le profit

Malgré la lettre ouverte, le foyer des Sénateurs d’Ottawa semble tout de même avoir tourné la sourde oreille aux plaintes de la communauté. L’équipe de hockey n’a pas toujours été accueillante envers la communauté trans et queer d’Ottawa, mais récemment, les Sénateurs ont tenté quelques pas dans la bonne direction avec leur participation à Fierté dans la capitale. Pourtant, avec le manque d’initiative de leur aréna, l’organisme est de retour au point de départ. En valorisant le profit plutôt que le bien-être de la communauté LGBTQ+, l’image qu’ils tentaient de projeter est alors teintée par leur cupidité.

Face à cette situation, l’équipe ottavienne, l’aréna de hockey ou encore la LNH auraient dû prendre position. On observe alors un cas de capitalisme arc-en-ciel, où une compagnie ou un organisme tente de se faire démarquer comme allié pour la cause, jusqu’à tant qu’elle arrête d’en bénéficier. Plusieurs coopérations vont adopter un portrait plus inclusif pour le mois de la Fierté, pour finalement ne rien faire pour réellement aider la communauté, ou pire, contribuer aux stigmatisations queerphobes et transphobes.

Tout est bien qui finit plus ou moins bien

En plus de supporter le convoi de liberté, qui a restreint les mouvements et la sécurité des citoyen.ne.s de la capitale canadienne pendant plus d’un mois, la simple présence de Peterson dans la région ne fait qu’aggraver la situation des communautés marginalisées. Avec une hausse des crimes haineux, les discours qu’entretiennent les personnalités politiques comme Peterson, Andrew Tate ou Joe Rogan ne font qu’encourager les attaques.

Bien que sa présence ait causé de nombreuses discussions sur les réseaux sociaux, cette opposition ne semble pas s’être transposée dans la vie réelle. Comme l’a fait remarquer Peterson durant sa conférence, aucun.e de ses opposant.e.s ne s’est présenté en personne pour protester contre la venue du psychologue. Ce manque de manifestant.e.s en personne est décevant, mais compréhensible étant donné les circonstances et le danger de manifester pour certaines communautés marginalisées. Bien qu’ Ottawa n’ait pas pu éviter la venue de Jordan Peterson, on peut tout de même s’avérer heureux qu’il ne se soit pas éternisé.