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Éditorial

L’U d’O finalement bilingue?

Rédaction
16 novembre 2022

Crédit visuel : Nicholas Monette – Directeur artistique

Éditorial rédigé par le comité de rédaction de La Rotonde

Le 2 novembre dernier, l’Université d’Ottawa (U d’O) a annoncé la modernisation de son Règlement sur le bilinguisme, qui vise à réaffirmer son appui aux langues officielles et à soutenir la francophonie sur le campus. Nous vous présentons donc, encore une fois, un éditorial sur la question du bilinguisme à l’U d’O.

Un autre éditorial sur le bilinguisme, parce qu’il s’avère encore nécessaire de le faire. Il est vrai que cette annonce peut d’emblée paraître positive, puisque le nouveau Règlement rend obligatoire le bilinguisme de la part des membres de la haute direction de l’Université, permet aux employé.e.s d’utiliser l’anglais ou le français comme langue de travail et de supervision et s’engage à valoriser davantage la recherche en français, entre autres. L’annonce révèle néanmoins un problème plus large en ce qui concerne la francophonie sur notre campus.

Initiative tardive

Avant de se lancer dans la critique, prenons un peu de recul. Le Règlement sur le bilinguisme, qui est un des textes fondateurs de l’U d’O, a été adopté pour la première fois en 1974. En entrevue avec La Rotonde, Sanni Yaya, professeur titulaire et vice-recteur International et Francophonie de l’U d’O, confie que « cette modernisation constitue la première mise à jour majeure du Règlement depuis son adoption ».

Il s’agit donc d’un changement qui a été longuement attendu, et qui est bien reçu par plusieurs membres de la communauté. Jérémie Séror, directeur de l’Institut des langues officielles et du bilinguisme, confirme que « cela faisait très longtemps que le Règlement n’avait pas été revu en fond ». Il se dit ainsi « très heureux » de la nouvelle. 

Yaya mentionne également que « tous les secteurs consultés se sont prêtés à l’exercice avec enthousiasme » une fois le projet de modernisation proposé et enclenché. Nous, étudiant.e.s francophones, ne sommes toutefois pas complètement satisfait.e.s.

Bilinguisme, mais à quel prix ?

Ce n’est qu’en réponse à un rapport produit en 2021, qui témoignait d’une hausse de discriminations envers les francophones sur le campus, qu’a été annoncée la modernisation du Règlement sur le bilinguisme. Il aura donc fallu que les francophones de l’U d’O se heurtent à une panoplie d’obstacles – manque de choix de cours en français, professeur.e.s unilingues anglophones, etc. – avant que des actions concrètes soient prises. Et, déjà là, le caractère concret de ces actions est débattable.

Il est bien beau d’obliger les membres de sa direction à parler les deux langues officielles, mais pourquoi n’était-ce pas déjà le cas, surtout au sein de la « plus grande université bilingue du monde » ? Le terme « bilinguisme » est large, et il semble que l’U d’O n’arrive toujours pas à prendre en considération toutes ses facettes.

Le bilinguisme « actif » est maintenant obligé, mais à quel point est-ce que cela sera respecté et combien de temps est-ce que cela durera ? Est-ce qu’éventuellement, pour se conformer au Règlement modernisé, une connaissance limitée du français sera acceptable, ou est-ce qu’une maîtrise complète de la langue sera exigée ? Et encore, est-ce que les membres bilingues de la direction auront vraiment le bien-être des francophones à cœur, surtout celui des Franco-Ontarien.ne.s et des autres francophones en milieu minoritaire ? Après tout, le bilinguisme ne signifie pas forcément une sensibilité à notre cause. 

Yaya souligne que, dans son préambule, le Règlement modernisé déclare viser « à favoriser sur son campus la progression vers l’égalité réelle entre le français et l’anglais, ainsi que l’épanouissement de la francophonie et du bilinguisme, en tenant compte de la situation minoritaire du français au Canada. » Il reste à voir si cela sera vraiment le cas. 

Nous reconnaissons que le fait d’obliger sa haute direction à parler le français est une grande étape. C’est un pas vers l’avant. Mais, concrètement, nous pensons que cela ne changera pas grand-chose pour nous, étudiant.e.s francophones.

Encore des changements à faire

Nous l’avons déjà mentionné, et nous le répéterons encore : ce qu’il faudrait vraiment, c’est une refonte au niveau des cours offerts en français et l’embauche de davantage de professeur.e.s francophones. 

Oui, comme le souligne Séror, la mise à jour du Règlement a clarifié les attentes et les droits des personnes francophones et bilingues en ce qui concerne les politiques linguistiques de l’U d’O. En revanche, il ne sert à rien d’affirmer que le bilinguisme et la francophonie sont valorisés à l’Université si les étudiant.e.s mêmes ne le ressentent pas.

Nous sommes exaspéré.e.s de recevoir des travaux et des lectures en anglais dans nos cours en français, d’avoir moins d’options de choix de cours que nos collègues anglophones et, en plus, de devoir payer si cher pour un tel niveau d’éducation.

Si l’U d’O priorisait vraiment la francophonie, pourquoi avoir retiré l’exonération partielle des frais de scolarité pour les étudiant.e.s internationaux.ales francophones ? Pourquoi est-il si difficile de recevoir des soins de santé dans notre langue ? Pourquoi est-il presque impossible de suivre tous ses cours en français ?

La réponse à ces questions est toujours la même : l’U d’O préfère protéger son image et son argent que de s’attaquer aux véritables problèmes.

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