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Éditorial

Université d’Ottawa Inc. : longue vie au capitalisme universitaire !

Rédaction
13 février 2023

Crédit visuel : Marie-Ève Duguay – Rédactrice en chef 

Éditorial rédigé par le comité éditorial de La Rotonde

Le 7 février dernier, l’Université d’Ottawa (U d’O) a conclu un nouveau partenariat avec le Mouvement des Caisses Desjardins. Cette collaboration s’ajoute à une longue liste d’ententes entre l’U d’O et des institutions privées.

Il suffit d’ouvrir les yeux pour prendre conscience des nombreux partenariats qu’a conclus l’U d’O avec de grandes entreprises. Avez-vous remarqué que la marque Coca-Cola n’est pas disponible sur le campus ? C’est plutôt la marque Pepsi qui a le privilège d’occuper nos machines distributrices. Le café Starbucks s’infiltre quant à lui dans pratiquement tous les restaurants du campus. Des guichets de la banque RBC dans un bâtiment de  l’Université… 

Bref, les grands noms ont le monopole sur notre chère université. L’U d’O a fixé le cap vers la capitalisation, et elle ne semble pas vouloir changer les choses. Qu’est-ce que cela veut dire pour nous ?

Marchandisation du savoir

La présence de grandes compagnies et d’institutions – voire d’intérêts privés – sur le campus de l’U d’O va à l’encontre des valeurs fondamentales que devrait avoir un tel établissement scolaire. L’U d’O devient ainsi une simple entreprise, une usine à diplômes et nous, étudiant.e.s, sommes les premier.ère.s à en ressentir les effets.

La preuve est dans les faits : selon le Règlement 120 de l’U d’O, un partenariat avec Desjardins ou Pepsi, par exemple, rapporte plus de 500 000 $  à l’Université. L’U d’O se dit en dette – une tentative de justifier ses partenariats ? – alors qu’elle a déclaré un surplus budgétaire de 42 millions de dollars pour l’année 2020-2021. D’après l’U d’O, ces partenariats ont pour but de « bonifier l’expérience étudiante sur le campus »…

Pour un établissement scolaire qui a retiré la bourse de mérite pour les nouveaux.elles étudiant.e.s de premier cycle, qui augmente sans cesse les frais de scolarité et qui refuse de payer un salaire décent à ses professeur.e.s à temps partiel, il est difficile de croire que de telles commandites peuvent vraiment nous être utiles. L’U d’O n’a clairement pas besoin de ces partenariats pour survivre : elle ne vise qu’à se remplir les poches. 

Il convient de faire un aparté pour souligner l’hypocrisie marquante qui découle de ces partenariats. L’U d’O tente d’être carboneutre, mais elle se fie à des entreprises comme Pepsi, qui sont en fait tout le contraire.

Conséquences fâcheuses

La présence de grandes corporations sur le campus de l’U d’O vient, bien entendu, avec son lot de conséquences. La plus marquante est, selon nous, l’impact qu’ont ces entreprises sur le domaine de recherche.

La marchandisation du savoir de l’U d’O se manifeste effectivement aussi par l’augmentation des budgets de recherches externes, financées par le parrainage des entreprises envers l’U d’O. En finançant les recherches – que ce soit en offrant des bourses, en fournissant des matériaux, etc. – les corporations telles que RBC et Desjardins, entre autres, gagnent le droit de fortement influencer les sujets de recherche. C’est exactement ce que s’engage à faire Desjardins, qui va maintenant, selon le site web de l’U d’O, «  soutenir la campagne rePENSER, l’appel à l’action de l’Université d’Ottawa pour bâtir l’avenir de l’éducation supérieure ».

C’est un phénomène que nous observons de plus en plus, et qui pourrait éventuellement faire remettre en cause les résultats de ces recherches. Et ainsi remettre en cause l’U d’O et les diplômes qu’elle offre.

Nous ne pouvons pas non plus négliger l’impact qu’a la privatisation de l’U d’O sur nous, étudiant.e.s. La majorité des étudiant.e.s de l’U d’O sont dans la vingtaine : nous sommes, aux yeux des institutions et des compagnies comme RBC, influençables. C’est également le cas des étudiant.e.s internationaux.ales, dont les informations concernant les options financières, entre autres, viennent directement de l’Université, et donc de ces entreprises. 

La capitalisation et la privatisation de l’U d’O sont deux phénomènes qui mènent ainsi à une hausse de son revenu, mais aussi à une baisse de son abordabilité, voire de son accessibilité. C’est en faisant affaire avec ces institutions bancaires et privées que l’U d’O arrive à profiter de nous. Nous ne bénéficions pas du capital qui tombe dans les mains de l’U d’O : nous sommes plutôt le marché cible des entreprises, qui nous forcent ainsi à débourser notre argent. 

Priorités douteuses 

Bref, en tant qu’étudiant.e.s, nous passons encore une fois au second rang des priorités de l’U d’O. Nous réclamons depuis un certain temps déjà la construction de nouveaux espaces d’étude et d’immeubles plus accessibles, mais sans succès. Pourtant, l’U d’O a toujours l’espace pour placer de nouveaux guichets, de nouvelles succursales de restaurants… Les professeur.e.s se plaignent d’un manque de matériel fonctionnel – par exemple des micros -, alors que l’U d’O baigne dans son argent.

Qu’est-ce que cela signifie pour le futur de notre système d’éducation ? Il semblerait que l’opinion des acteurs financiers qui « supportent » l’U d’O – ils sont d’ailleurs partout : au Bureau des gouverneurs, au Sénat de l’Université, etc. – ait plus de poids que celle des étudiant.e.s, du personnel de soutien, et même des professeur.e.s. 

Ainsi, la privatisation et la marchandisation de l’U d’O sont synonymes d’hypocrisie et d’avarice. Encore une fois, l’U d’O démontre que son intérêt premier n’est pas l’éducation de ses étudiant.e.s, mais qu’elle cherche plutôt à augmenter son capital. Vous l’aurez compris, l’U d’O ne recule devant rien quand il est question d’argent. Même quand il est question du succès de ses étudiant.e.s.



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