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Arts et culture

VACHES, the musical : un Broadway proprement franco-ontarien

Dawson Couture
29 juillet 2022

Crédit visuel : Marianne Duval – Courtoisie 

Entrevue réalisée par Dawson Couture – Journaliste

Après deux ans d’attente, VACHES, the musical sera finalement dévoilé au grand public au mois d’octobre 2022. Ce « Broadway franco-ontarien » promet de raconter une histoire par et pour des franco-ontarien.ne.s. Pour en discuter davantage, La Rotonde s’est entretenue avec deux anciens Gee-Gees : le metteur en scène, Dillon Orr, et le co-créateur du spectacle, Stéphane Guertin.

La Rotonde (LR) : Pouvez-vous nous parler brièvement de votre parcours jusqu’à votre plus récente contribution à VACHES, the musical ?

Dillon Orr (DO) : Je suis originaire de Windsor-Tecumseh dans le Sud-Ouest ontarien, mais j’ai fait mes études en théâtre à l’Université d’Ottawa (U d’O) et à l’École nationale de théâtre à Montréal. Je suis sorti de mon séjour au Québec encore plus convaincu que je devais faire du théâtre franco-ontarien. J’avais quelque chose à dire à travers ce filtre plus intime et rassembleur. J’ai été contacté en 2018 pour être metteur en scène pour VACHES, the musical. Les deux auteurs, Stéphane Guertin et Olivier Nadon, avaient le rêve d’apporter l’esthétique Broadway au théâtre franco-ontarien. C’est grâce à leur vision et leur réputation que j’ai voulu en prendre part.

Stéphane Guertin (SG) : Quand j’ai commencé à étudier le théâtre à l’U d’O, j’avais le goût d’écrire, surtout de la poésie. Je me suis tourné progressivement vers le théâtre et l’improvisation, avec le groupe Improtéine. Ce que j’ai surtout retenu de cette expérience c’est à quel point l’humour pouvait amener du contenu et de l’émotion. 

C’est dans cette optique qu’Olivier Nadon, le co-créateur du spectacle, et moi-même avons voulu créer une comédie musicale. J’avais une certaine connaissance du genre en tant que performeur et chanteur. Notre but ultime était de créer un musical dans la vraie tradition Broadway, mais à saveur franco-ontarienne. Orr a été en mesure de chercher des comédien.ne.s et chanteur.euse.s pour concrétiser notre vision.

LR : Comment avez-vous cherché à adapter vos influences et votre esthétique au genre de la comédie musicale ?

DO : Il a fallu m’armer pour pouvoir m’attaquer proprement au genre musical. Je suis parti à la recherche de ses origines et je suis tombé sur de vieilles pièces de Bertolt Brecht, un metteur en scène allemand du 20e siècle. Il était l’un des premiers à vouloir laisser tomber le quatrième mur et inclure l’audience dans le spectacle. J’ai aussi été inspiré par le théâtre pauvre d’origine polonaise. Avec les budgets que l’on a en Ontario français, ce serait normalement impossible de faire un Broadway. Il fallait donc misé sur les comédien.ne.s. 

Le fait d’avoir eu Brian St-Pierre pour s’occuper de la musique était un immense plus ; c’est un génie de la musique. J’ai ensuite pu recruter Janie Pinard, la chorégraphe par excellence. 

SG : J’ai toujours voulu faire une comédie musicale, mais c’est énormément coûteux en temps et en argent. En discutant avec Nadon, nous savions que pour monter un Broadway franco-ontarien, il fallait qu’il y ait une touche identitaire représentative de l’Ontario français. Nadon a eu l’idée de prendre cette anecdote de Louis Racine, un agriculteur et chanteur de Casselman, qui a installé une génératrice et passé du courant en tracteur aux autres agriculteur.rice.s de la région lors de la crise du verglas, ce qui a permis de sauver plusieurs vaches. Il y avait un drame réel à explorer dans cette histoire, mais aussi une certaine folie et absurdité que l’on cherchait à transmettre. Avec un titre comme VACHES, the musical, les gens savent exactement à quoi s’attendre.

LR : Quelles thématiques avez-vous voulu explorer à travers le spectacle ? 

DO : Le spectacle raconte une histoire très personnelle tout en étant extrêmement universelle. S’il y a une chose que j’ai retenue de l’École nationale de théâtre, c’est que pour parler du monde, il faut parler de soi. La comédie musicale porte sur l’exode des jeunes ruraux vers les grandes villes, la fatigue des agriculteur.rice.s, la corruption des gouvernements des petites villes. Ce ne sont pas des thématiques uniquement franco-ontariennes. Le but était d’utiliser ces référents très propres à nos expériences pour parler à tout le monde. 

SG : Il y a plusieurs thématiques que l’on explore à travers de cette histoire, dont celle de la vente de la ferme familiale. C’est une expérience que j’ai vécue avec ma propre famille. Le récit est donc un drame quotidien. Jean, l’agriculteur, a toutes les raisons du monde de vouloir léguer sa terre à sa famille. Sa fille, quant à elle, a aussi toutes les raisons de ne pas vouloir la garder. Le spectacle ne se veut pas moralisateur cependant. C’est avant tout le thème du rassemblement qui est à retenir. 

LR : Y-a-t’il un moment lors du tournage de VACHES, the musical qui vous a particulièrement marqué comme franco-ontarien et/ou comme artiste ?

DO : J’étais extrêmement fier de trouver une façon originale et comique de conceptualiser des vaches sur scène. Tout notre décor est bâti à partir d’objets que l’on pourrait retrouver dans le fond d’une grange. À la place d’avoir de grosses marionnettes ou des projections, j’ai décidé un jour d’apporter des gants de vaisselle roses de la maison. Les vaches sont donc devenues le comédien penché, fesse face au public avec les gants de vaisselle en dessous de leurs pattes. Ce moment de transformation est tellement payant.

SG : Le fait d’avoir pu rassembler des acteur.rice.s talentueux.euses d’à travers l’Ontario français pour conter une histoire franco-ontarienne dans des communautés franco-ontariennes était extrêmement spécial. Nous sommes capables de contribuer à l’identité franco-ontarienne sans que les personnages aient à brandir le drapeau. 

LR : Votre projet a déjà remporté les deux Prix coup de foudre de Réseau Ontario, le prix RADARTS et ROSEQ. À quoi peuvent s’attendre les membres de l’auditoire au mois d’octobre ?

DO : C’est un musical court d’environ une heure et demie. Cinq comédien.ne.s jouent 27 personnages qui chantent et dansent dans un contexte très chaotique. Le spectacle n’arrête pas de surprendre. Il est d’une absurdité énorme, mais qui est tout aussi touchante. Au final, c’est une grande comédie où l’on ne peut pas s’arrêter de rire.

SG : Il y a des gens qui attendent avec leurs billets en poche depuis deux ans. C’est enfin le moment où ils.elles pourront en profiter. Si une chose est certaine, c’est qu’ils.elles vont rire. J’ai surtout hâte de voir à quels moments cela se produira davantage. Nous avons des scènes de drame qui deviennent presque comiques dans leur absurdité. Dans ces moments, il pourrait y avoir autant de gens avec la larme à l’œil que d’autres qui rient aux éclats. Chacun.e sera en mesure de trouver son compte à travers cette expérience.

 

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