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Gouvernement Ford : une nouvelle déception pour les institutions postsecondaires en Ontario

Hai Huong Le Vu
21 février 2024

Crédit visuel : Jurgen Hoth – Photographe

Article rédigé par Hai Huong Le Vu — Journaliste

L’annonce du plafond des étudiant.e.s internationaux.ales par le gouvernement fédéral canadien le 22 janvier dernier a bouleversé les institutions postsecondaires du pays. En Ontario, près d’un cinquième du budget des universités et des collèges est financé par cette catégorie d’étudiant.e.s. Cette proportion s’explique, en partie, par des années de subventions décroissantes du gouvernement ontarien de Doug Ford.

Selon un rapport de Higher Education Strategy Associates (HESA), entre 2011 et 2022, la province ontarienne a diminué le montant de fonds dans ses transferts aux institutions postsecondaires, soit une baisse de 12 % (figure 4.2).

Figure 4.2 : Évolution des transferts provinciaux aux institutions par province sur une période de cinq et 10 ans, 2011-2012 à 2021-2022

Crédit visuel : HESA

Moins d’argent investi, une éducation plus coûteuse

Delphine Robitaille, présidente du Syndicat étudiant de l’Université d’Ottawa (SÉUO) et étudiante en troisième année de sciences sociales, constate que la subvention du gouvernement provincial pour l’éducation supérieure ne suffit pas. Elle confirme que l’Ontario est la province qui a le moins de financement par étudiant.

Figure 4.3 : Dépenses provinciales par étudiant à équivalent temps plein, 2021-2022

Crédit visuel : HESA

Pour François Hastir, directeur général au Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), « ce n’est pas quelque chose qui est surprenant ». Il met en lumière que cette baisse a conduit au moindre de programmes offerts en français. Cela a poussé les francophones à quitter la province pour étudier ailleurs, renchérit-il.

L’insuffisance d’investissement provincial dans les universités et les collèges a incité la publication du rapport Harrison recommandant au gouvernement Ford d’augmenter les frais de scolarité. Hastir réfute cette recommandation. Selon lui, augmenter les frais de scolarité est synonyme de donner un fardeau financier à la jeunesse en Ontario dans un contexte inflationniste. L’étude de HESA démontre que les frais de scolarité payés par les étudiant.e.s de premier cycle au niveau postsecondaire en Ontario sont parmi les plus élevés au Canada de 2022 à 2023 (figure 5.2).

Figure 5.2 : Moyenne des frais de scolarité et des frais obligatoires pour les étudiants de premier cycle par province, 2022-2023

Crédit visuel : HESA

Dépendance des étudiant.e.s étranger.ère.s

Luc Angers, vice-président de la mobilisation des membres de l’Association des professeur.e.s à temps partiel Université d’Ottawa (APTUO), révèle que l’U d’O reçoit des millions de dollars annuellement grâce au nombre croissant d’étudiant.e.s internationaux.ales chaque année. Entre 2022 et 2023, les frais de scolarité de ces dernier.ère.s en Ontario sont les plus élevés au Canada, soit environ 9000 $ de plus que la moyenne au pays selon HESA (figure 5.6).

Figure 5.6 : Frais de scolarité des étudiants internationaux de premier cycle par province, universités canadiennes, 2022-2023

Crédit visuel : HESA

Robitaille fait remarquer que, suite à l’annonce du plafond des étudiant.e.s internationaux.ales, l’Ontario prévoit émettre la moitié des permis d’études en 2024 qu’émis en 2023. La présidente du SÉUO observe que cette situation est « très inquiétante » pour les universités et les collèges canadiens. Elle estime qu’il y aura des coupes budgétaires additionnelles à l’U d’O. Elle poursuit en dévoilant qu’il y a plus de 30 % des étudiant.e.s internationaux.ales sur le campus.

Hastir constate que la présence des étudiant.e.s internationaux.ales dans les institutions collégiales et universitaires bilingues et francophones permet d’accroître le flux d’immigrant.e.s qui parlent français en Ontario. À son avis, cela permet aux Franco-Ontarien.ne.s d’éviter l’assimilation. Face à la restriction fédérale de cette démographie, le directeur général du RÉFO propose une voie d’admission privilégiant les candidat.e.s de la francosphère.

Question de subvention ou de gestion ?

Le recteur de l’U d’O, Jacques Frémont, indique que l’éducation francophone dans les institutions postsecondaires subit un sous-financement « chronique » de 50 millions de dollars par année. Robitaille témoigne des conséquences de ce « sous-financement », en soulignant les lacunes au niveau des cours obligatoires en français et d’une insuffisance de ressources académiques dans la langue de Molière.

La présidente du SÉUO dénonce le manque de communication de l’administration centrale de l’U d’O sur la question du budget et des investissements. « Alors que le recteur dit qu’il veut travailler en partenariat avec les groupes syndicaux sur le campus, ne pas les inviter à des réunions budgétaires importantes montre clairement un manque de transparence », déclare Robitaille.

Angers énonce que les dirigeant.e.s provinciaux.ales et fédéraux.ales ont négligé la mission d’assurer une éducation de qualité dans les universités et les collèges. La présidente du SÉUO souligne que si le gouvernement ontarien souhaite avoir des institutions académiques de renommée internationale, il faut investir « pour que ce soit une réalité ». Hastir soupire que celui-ci s’éloigne du principe d’accessibilité de l’éducation.

Le 12 février dernier, le ministre des Finances de l’Ontario, Peter Bethlenfalvy, a confirmé qu’il n’entrevoit pas de hausse des droits de scolarité dans les institutions postsecondaires de la province.

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