Crédit visuel : Nartistic — Directrice Artistique
Éditorial rédigé par le comité éditorial de La Rotonde
Lorsque nous écrivions notre article sur les possibles impacts de la Loi C-18, nous ne pensions pas que moins d’un mois après, nous nous retrouverions éclipsés de la scène publique, ou du moins des réseaux sociaux. Il n’est plus possible pour les comptes des médias canadiens, dont La Rotonde, de publier leurs nouvelles sur les plateformes de Meta (Instagram, Facebook). D’ici décembre, celles-ci risquent de ne plus apparaître sur Google. Il est donc nécessaire pour notre journal de réfléchir aux répercussions de cette loi tout en se questionnant au sujet de notre dépendance à ces plateformes.
Depuis que la Loi C-18 a été adoptée, les médias semblent se retrouver au milieu d’une guerre des nerfs entre le gouvernement canadien et Meta. La législation avait pour objectif d’obliger les « géants du Web » à compenser les médias en raison des grands revenus générés lors du partage des nouvelles sur leurs plateformes. Cette loi, aussi bien intentionnée soit-elle, semblerait plutôt laisser les médias à la merci des corporations.
À La Rotonde, nous considérons que les impacts de la Loi C-18 auraient été moins sévères si le gouvernement avait accompagné jusqu’au bout les médias en prenant en charge les négociations. Au lieu de suivre l’exemple de l’Australie, il aurait aussi pu être intéressant que le gouvernement mette en place un fond indépendant où les revenus des compagnies privées comme Meta reversent leurs revenus, plutôt qu’une taxe. Somme toute, la réalité de cette situation est celle-ci : il est temps que les journaux, ainsi que nos lecteur.ice.s deviennent moins dépendant.e.s des médias sociaux !
Dépendre à nos dépens
Les médias sociaux ont, depuis des décennies, créé des plateformes qui réunissent toutes les informations et tout le monde au même endroit. On peut avoir accès à nos nouvelles, aux dernières aventures de nos ami.e.s ou à nos célébrités préférées, au bout de nos doigts. Surtout pour nous, en tant que média étudiant, les réseaux sociaux nous permettaient d’atteindre notre cible principale : les étudiant.e.s. En effet, ceux.celles-ci utilisent principalement ces plateformes et il s’agissait donc du lieu idéal, pour non seulement promouvoir nos articles et nos contenus, mais aussi interagir directement avec notre lectorat.
Maintenant que cela n’est plus possible, de nombreuses questions s’imposent. Est-il trop tard pour changer nos habitudes de consommation ? Dans une société capitaliste, où le rythme de la vie ne cesse de s’accélérer, nous n’avons parfois pas le temps de manger, de dormir et d’accomplir toutes nos tâches quotidiennes. Pouvons-nous nous attendre à ce que tout le monde fournisse les efforts nécessaires pour aller chercher leurs nouvelles ailleurs que sur les réseaux sociaux ? Nous constatons notamment que les étudiant.e.s ne semblent pas avoir remarqué la disparition des nouvelles canadiennes sur leur plateforme. Pourtant, c’est notre droit à l’information et à l’accessibilité de cette information qui sont en jeu !
En plus d’une perte de visibilité, il s’agit d’une réalisation que nous devons repenser notre forme de consommation de l’actualité. Une grande majorité des médias offre de nos jours des applications ou des abonnements payants pour avoir accès à leur contenu. Il ne s’agit pas de solutions accessibles aux petits médias, qui touchent une certaine population qui n’a pas non plus les moyens de s’abonner à un journal pour lire des articles.
Il est vrai que la dépendance aux réseaux sociaux provient d’une envie de s’adapter aux nouvelles formes de consommation. Il est maintenant nécessaire de trouver de nouvelles manières de partager nos nouvelles, et ce, sans retomber dans une nouvelle relation asymétrique, qui nous demanderait dans dix ans de changer drastiquement nos manières de faire.
Temps pour un renouveau
Notre rôle en tant que journal étudiant est de s’assurer que nous partageons au travers de nos articles et de notre travail les sujets d’intérêts pour la communauté étudiante. Il est de notre devoir de continuer à couvrir ce qui se passe dans la « micro société » qu’est l’Université d’Ottawa. La Loi nous invite à trouver de nouvelles solutions pour pousser nos lecteur.ice.s à retrouver nos nouvelles.
En outre, nous devons pallier à ce manque d’accessibilité en nous adaptant aux différentes manières dont nos lecteur.ice.s consomment leurs informations. Chez nous, cela veut dire se concentrer sur notre contenu audiovisuel, ainsi qu’aux formes plus traditionnelles de promotion, comme les affiches. Nous pensons donc exploiter davantage YouTube et TikTok afin de produire du contenu audiovisuel riche et diversifié.
Il est aussi crucial d’utiliser d’autres méthodes indépendantes de toutes plateformes, comme les infolettres. Celles-ci permettent de transmettre les nouvelles directement aux boites de courriers électroniques de nos lecteur.ice.s, et sont une manière de les tenir au courant des articles publiés par un journal. Nous sommes actuellement en préparation de lancer une nouvelle infolettre moderne et soignée pour garder notre public à l’affût des changements de l’environnement universitaire.
La Loi nous amènera aussi à collaborer de manière accrue avec des groupes sur le campus comme les associations étudiantes ou les clubs universitaires. Ces deux groupes nous aideront à établir une relation de proximité avec les étudiant.e.s afin de faire connaître le journal. Si nous avons discuté dans nos locaux de l’impact de cette loi sur notre travail, nous invitons aussi ceux.celles qui nous lisent à observer les impacts de la Loi sur leur vie de tous les jours. Il s’agit d’une opportunité de découvrir des alternatives aux médias sociaux et aux navigateurs de recherches comme Google, et un rappel qu’il faut approfondir nos recherches pour accéder à des nouvelles vérifiées et factuelles.
La Rotonde a tout de même été le journal le plus censuré du Canada, a vécu de nombreux scandales et a bravé le silence de l’administration de l’Université d’Ottawa. Ce n’est donc pas cette loi qui nous empêchera de continuer à représenter et à défendre les intérêts des francophones et des étudiant.e.s, ainsi que de permettre à nos lecteur.ice.s de consommer des nouvelles qui les intéressent et dans lesquelles ils.elles peuvent se retrouver !